O folz des folz
Nauck (1p. 423-424).

O folz des folz, et les folz mortelz hommes
Qui vous fiez tant és biens de fortune,
En celle terre és pays où nous sommes,
Y auez vous de chose propre aucune ?
Vous n’y auez chose vostre nesune ,
Fors les beaulx dons de grace et de nature.
Se fortune donc par cas d’aventure
Vous toult les biens que vostres vous tenez,
Tort ne vous fait, ainçois vous fait droicture :
Car vous n’aviez riens quant vous fustes nez.
Ne laissez plus le dormir a grans sommes
En vostre lict par nuyt obscure et brune,
Pour açquester richesses a grans sommes
Ne conuoitez chose dessoubz la lune,
Ne de Paris jusques à Pampelune,

Fors ce qui fault sans plus à créature,
Pour recouurer sa simple nourriture.
Souffise vous d’estre bien renommez
Et d’enporter bon loz en sepulture :
Car vous n’aviez riens, quant vous fustes nez.
Les joyeulx fruicts des arbres et les pommes,
Au temps que fut toute chose commune,
Le beau miel, les glandes et les gommes
Souffisoient bien à chascun et chascune ;
Et pour ce fut sans noise et sans rancune .
Soyez contens des chaulx et de froidure,
Et ne prenez fortune doulce et seure ;
Pour voz pertes griefue dueil ne menez ,
Fors à raison, à point et à mesure :
Car vous n’aviez rien, quant vous festes nez.
Se fortune vous fait aucune iniure,
C’est de son droit, jà ne l’en reprenez,
Et perdissiez jusques à la vesture :
Car vous n’aviez rien, quant vous fustes nez.