Évelina/Lettre 9
LETTRE IX.
- M. Villars à Évelina.
Je n’ai pas la force de résister à une sollicitation pressante. Loin d’usurper sur vous, mon enfant, une autorité qui porte atteinte à votre liberté, je ne consulte que la prudence pour m’épargner les angoisses du repentir. Votre impatience de voir Londres, ne me surprend point, puisque la vivacité de votre imagination vous peint cette ville avec des couleurs si avantageuses ; je souhaite seulement que votre attente ne soit pas trompée. Vous refuser, ce seroit exalter vos idées. Je ne demande pas mieux que de contribuer au bonheur de mon Évelina : ainsi je vous accorde mon consentement. Partez, mon enfant ; que le ciel soit votre guide ! qu’il vous conserve et vous fortifie ! Je le prierai nuit et jour pour votre félicité. Qu’il vous prenne sous sa garde, qu’il veille sur vous, qu’il vous préserve de tout danger, de toute adversité ! Qu’il écarte de votre personne le vice, autant qu’il est éloigné de votre cœur ! Qu’il me donne enfin la dernière consolation que je lui demande, celle de fermer les yeux dans les bras d’une fille qui m’est si chère, et qui mérite tant de l’être.