Librairie de L. Hachette et Cie (p. 322-324).

CXXIII

JÉSUS RAMENÉ DEVANT PILATE.



Les clameurs de ce peuple excité par les calomnies des Pharisiens et des Princes des Prêtres, attirèrent Pilate, qui interrogea de nouveau Jésus ; mais le Sauveur ne répondit plus rien.

Jacques. Pourquoi ne répondit-il pas ? Il aurait peut-être convaincu Pilate de son innocence.

Grand’mère. Notre-Seigneur voyait le fond du cœur égoïste et lâche de Pilate ; il savait que la peur de l’Empereur et des Juifs l’empêcherait d’être juste. D’ailleurs, quand Pilate lui avait demandé : « Qu’est-ce que la vérité ? » il ne s’était même pas donné la peine d’attendre la réponse du Sauveur.

Notre-Seigneur garda donc le silence, jugeant que toute parole serait inutile.

Pilate, voyant que Jésus ne disait plus rien pour sa défense, était fort embarrassé.

Louis. Il me semble qu’il n’y avait pas de quoi être embarrassé. Il voyait que Jésus était innocent ; il devait le dire aux méchants Juifs, les chasser et protéger le pauvre Jésus contre leur méchanceté.

Grand’mère. Certainement ; c’est ce qu’il aurait fait s’il avait été un homme honnête, courageux et craignant de mal faire ; mais Pilate était lâche, il avait peur de se faire des ennemis et de perdre sa place de Gouverneur de la Judée ; il voulut donc contenter les Juifs, sans pourtant commettre une injustice trop visible à l’égard de Jésus, et il crut avoir trouvé un moyen très-habile.

Il était d’usage qu’aux fêtes de Pâques le Gouverneur romain accordât aux Juifs la grâce d’un condamné à mort. Il y avait dans les prisons de Jérusalem un brigand célèbre, nommé Bar-Abbas, condamné à mort pour ses crimes. Pilate espéra qu’en Le proposant au peuple avec Jésus, tout le monde préférerait Jésus, car ce brigand était fort redouté.

Pilate rappela donc au peuple rassemblé autour de son palais, quel était l’usage des fêtes de Pâques, et il leur demanda s’ils voulaient délivrer Bar-Abbas ou Jésus.

Les Pharisiens excitèrent si bien la foule que presque tous crièrent à Pilate :

« Non, pas Jésus, mais Bar-Abbas.

— Et que ferai-je de l’autre ? dit Pilate.

— Qu’il soit crucifié ! » vociférèrent les Juifs.

Ce qui est frappant et ce qui n’a pas été l’effet du hasard, c’est que le nom hébreu de Bar-Abbas, signifie fils de roy. Jésus, Fils de Dieu, sauvait ainsi d’une mort justement méritée, le coupable Bar-Abbas, qui représentait tous les coupables fils d’Adam, tous les fils coupables de notre premier père.