À qui sont les nids ?

À qui sont les nids ?
Revue pédagogique, second semestre 18869 (n. s.) (p. 221-222).

À QUI SONT LES NIDS ?



— « Dans les rochers ou dans les branches,
N’allez pas, mes petits amis,
Ni dans les aubépines blanches,
N’allez pas dénicher les nids. »

Ainsi parle, un jour, à l’école,
Le maître, et Jacques dit : « Pourquoi ? »
Pierre demande la parole :
— « C’est qu’un nid, ça n’est pas à moi ! »

— « Les oiseaux, c’est à tout le monde ! »
— « Non ! » dit Pierre, un blond à l’œil bleu.
— « À qui donc ? que Pierre réponde ! »
— « Monsieur, les nids, c’est au bon Dieu : »

Et toute l’école de rire ;
Mais toute l’école avait tort…
L’enfant, que l’innocence inspire,
Dit parfois un mot juste et fort.

Oui, les nids sont à la nature ;
Ils ne sont pas à qui les prend ;
C’est un méchant qui les torture ;
Qui les gâte est un ignorant.


Le ver, l’insecte, mille bêtes,
Rongent l’orge et le blé, le fruit…
Les ailes d’oiseaux, toujours prêtes,
Suivent la vermine qui fuit !

Fort utile sans qu’il le veuille,
Le moineau-franc donne le ton :
Le hanneton mange la feuille,
Et le moineau le hanneton.

Pour les épis, que Juillet donc,
Les fourmis sont des ennemis…
Le fourmilier happe et dévore
D’un seul coup beaucoup de fourmis !

Quelle loi, quel garde-champêtre
Conduirait l’insecte en prison ?
L’hirondelle, seule peut-être,
Met un moustique à la raison !

Non, non, le nid n’est à personne :
Où qu’il soit, il faut le laisser.
Car, pour n’importe quelle somme,
Vous ne pourriez le remplacer !

Puis, si vous avez un cœur tendre,
Songez aux mères des oiseaux,
Et comme c’est joli d’entendre
Leurs chansons près de ces berceaux :