À genoux/Je donnerais ma vie entière pour pouvoir

Alphonse Lemerre (p. 86).

VIII


 
Je donnerais ma vie entière pour pouvoir
Une dernière fois dormir, grand Ange noir,
Dans ta couche sur ta chère tête, dussé-je
Ensuite et pour toujours m’enfouir dans la neige
Des tombes ! Il faudra que je te dise encor :
Je t’aime ! et que ce cri, comme le chant d’un cor
Douloureux ou la voix funèbre d’une cloche,
Mugisse dans ton cœur comme dans une roche !
Et que toute la nuit, quand nous serons couchés
L’un près de l’autre, froids, tristes et rapprochés,
Il emplisse ton cœur lentement, ô Maîtresse,
Comme l’appel dernier d’une armée en détresse,
Et qu’il t’éveille, et qu’il te fasse jusqu’au jour
Pleurer d’orgueil, et puis encor pleurer d’amour.