Sa maman s’appelait Flora,
A connaissait pas son papa,
Tout’jeune on la mit à l’école,
À Batignolles.
A poussa comme un champignon,
Malgré qu’alle ait r’çu pus d’un gnon,
L’soir, en faisant la cabriole,
À Batignolles.
Alle avait des magnièr’s très bien,
Alle était coiffée à la chien,
A chantait comme eun’ petit’ folle,
À Batignolles.
Quand a s’balladait, sous l’ciel bleu,
Avec ses ch’veux couleur de feu,
On croyait voir eune auréole,
À Batignolles.
Alle avait encor’ tout’s ses dents,
Son p’tit nez, oùsqu’i pleuvait d’dan,
Était rond comme eun’ croquignolle,
À Batignolles.
A buvait pas trop, mais assez,
Et quand a vous soufflait dans l’nez
On croyait r’nifler du pétrole,
À Batignolles.
Ses appas étaient pas ben gros,
Mais je m’disais : Quand on est dos,
On peut nager avec eun’ sole,
À Batignolles.
A gagnait pas beaucoup d’argent,
Mais j’étais pas ben exigeant !…
On vend d’l’amour pour eune obole,
À Batignolles.
Je l’ai aimée autant qu’j’ai pu,
Mais j’ai pus pu lorsque j’ai su
Qu’a m’trompait, avec Anatole.
À Batignolles.
Ça d’vait arriver, tôt ou tard,
Car Anatol’ c’est un mouchard…
La marmite aim’ ben la cass’role,
À Batignolles.
Alors a m’a donné congé,
Mais le Bon Dieu m’a ben vengé :
A vient d’mourir de la variole.
À Batignolles.
La moral’ de c’tte oraison-là,
C’est qu’les p’tit’s fill’s qu’a pas d’papa,
Doiv’nt jamais aller à l’école,
À Batignolles.
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