Vies choisies des Pères des déserts d’Orient/13


Ad Mame et Cie (Nouvelle éditionp. 175-194).

SAINT JÉRÔME.


Nous allons faire connaître la vie monastique de saint Jérôme sans entrer dans le détail de ses autres actions, qui ne sont pas de notre sujet. Quoiqu’il soit un très-grand docteur de l’Église, nous ne le considèrerons ici que comme solitaire. Il était de Stridon en Dalmatie, où il naquit vers l’an 329 ; mais il fit ses principales études à Rome, sous le fameux Domat, grammairien. Après avoir été baptisé, il voyagea en France, s’arrêta quelque temps à Trêves, et vint à Aquilée dans les Gaules, où il fit connaissance avec saint Valérien, évêque de cette ville, et avec d’autres excellents personnages.

Son amour extrême pour l’étude avait beaucoup paru à Rome par ses progrès, et ce fut aussi pour s’y perfectionner qu’il fit le voyage des Gaules. Son application n’avait pas seulement servi à enrichir son esprit des belles connaissances de la littérature, elle avait été un moyen de le retirer des occasions où la jeunesse licencieuse fait quelquefois de tristes naufrages. Aussi, depuis qu’il eut reçu le saint baptême, Dieu lui fit la grâce de vivre dans une grande abstinence, et de sanctifier ses études par la vertu. On doit mettre entre ses pratiques de piété, durant son séjour à Rome, celle d’aller tous les dimanches, avec ses compagnons, visiter les reliques des saints dans les catacombes d’autour de cette ville.

Avant de quitter celle d’Aquilée, il délibéra longtemps du lieu qu’il choisirait pour vivre dans la retraite et vaquer paisiblement à l’étude. Il n’en eût pas trouvé les moyens dans sa patrie, où il aurait été trop importuné par des gens qui pensaient tout autrement que lui. À Rome, il était trop connu ; il entreprit donc le voyage d’Orient, résolu de s’y établir. Évagre, Innocent et Héliodore le suivirent, et il ne porta avec lui que les livres dont il avait déjà fait un amas choisi. Après avoir parcouru la Thrace, le Pont, la Bithynie, la Galatie, la Cappadoce, la Cilicie, et être resté quelque temps à Tarse, lieu de la naissance de saint Paul, il vint à Antioche, et se retira dans le désert de Chalcis, sur les confins de la Syrie et de l’Arabie, où il embrassa la profession monastique.

Il y eut pour compagnons Innocent, Héliodore et Hylas. Le prêtre Évagre était resté à Antioche, d’où il lui faisait tenir les lettres qui lui étaient adressées de divers endroits. Pour réussir dans ce nouveau genre de vie, il se recommanda aux prières de saint Théodose et de quelques autres saints solitaires de Syrie, qu’il avait vus en passant lorsqu’il méditait sa retraite. « Je voudrais bien, leur dit-il, être maintenant avec vous ; et, quelque indigne que je sois de vous voir, j’aurais bien de la joie d’embrasser toute votre sainte communauté. Je verrais une solitude plus agréable que toutes les villes du monde, des déserts habités comme le paradis terrestre par une multitude de saints. Mais puisqu’un aussi grand pécheur que moi ne mérite pas de vivre en votre compagnie, je vous conjure du moins, et je suis sûr que vous pouvez obtenir cette grâce pour moi, de prier Dieu qu’il me délivre des ténèbres de ce monde. Je vous l’ai déjà dit de bouche, et je vous le répète encore aujourd’hui, il n’y a rien que je souhaite avec tant de passion que de me voir affranchi de la servitude du siècle… Il me semble qu’une vaste mer m’environne de tous côtés, et, dans la situation où je me trouve, je ne saurais, ni avancer ni reculer. C’est donc de vos prières que j’attends le vent favorable du Saint-Esprit pour continuer ma course et pour arriver heureusement au port. »

Le désert de Chalcis fut donc ce port où il se retira ; mais après y avoir goûté quelque temps le calme de la solitude, le Seigneur, qui voulait l’éprouver et le sanctifier par la tribulation, tempéra les douceurs de son repos par de grandes amertumes. La mort lui enleva Innocent et Hylas, et son cher Héliodore le quitta pour retourner en Italie. À ces tristes séparations, qui firent beaucoup souffrir son cœur, succédèrent diverses maladies dont il fut attaqué ; et enfin dans l’intervalle de ses maux il fut tourmenté de tentations très-fâcheuses, causées par le souvenir des délices de Rome, qui frappaient son esprit bien vivement. Il s’en explique ainsi à la vierge Eustoquie, dans l’excellente lettre qu’il lui écrivit sur la virginité, et qui fit beaucoup de bruit à Rome lorsqu’elle y parut.

« Dans le temps, dit-il, que je demeurais au désert et que je vivais dans cette vaste solitude, qui, brûlée par les ardeurs du soleil, n’a rien que d’affreux pour les solitaires qui l’habitent, combien de fois me suis-je imaginé être à Rome au milieu des délices ! Assis que j’étais tout seul dans le fond de ma retraite, plongé dans un abîme d’amertume, revêtu d’un sac dont la seule vue faisait horreur à la nature, et qui servait à couvrir un corps tout défiguré et une peau toute noire, semblable à celle d’un Éthiopien, toute mon occupation était de passer les jours et les nuits dans les larmes et les gémissements. Étais-je accablé de sommeil et forcé malgré moi d’y succomber, je laissais tomber sur la terre nue un corps qui n’était plus qu’un véritable squelette. Je ne vous dis rien de ma nourriture, car dans le désert les malades mêmes ne boivent que de l’eau, et ils s’imaginent qu’il y a de la délicatesse et de la sensualité à manger quelque chose de cuit. Enfermé donc que j’étais dans cette espèce de prison, à laquelle je m’étais volontairement condamné pour éviter les feux de l’enfer, et n’ayant pour toute compagnie que les scorpions et les bêtes farouches, je ne laissais pas de me trouver souvent en esprit au milieu des dames romaines : sous un visage défait et abattu par un jeune continuel, je cachais un cœur agité par de mauvais désirs ; dans un corps tout de glace et dans une chair déjà morte avant l’entière destruction de l’homme, la concupiscence entretenait un feu que rien ne pouvait amortir.

« Me voyant donc sans appui et sans ressource, je me jetais aux pieds de Jésus-Christ, les arrosant de mes larmes, et les essuyant avec mes cheveux, et passant les semaines entières sans manger, afin de dompter ma chair rebelle et la soumettre à l’esprit. J’ai passé très-souvent les jours et les nuits à crier et à me frapper la poitrine, jusqu’à ce que le Seigneur, dissipant la tempête, eût remis le calme dans mon cœur. Je craignais d’entrer dans ma cellule, qui avait vu naître tant de mauvaises pensées. Animé contre moi-même d’une juste colère, et traitant mon corps avec la dernière sévérité, je m’enfonçais seul dans le désert ; et si je rencontrais quelque vallée profonde, quelque haute montagne, quelque rocher escarpé, j’en faisais aussitôt un lieu d’oraison, et comme une espèce de prison où je mettais ma misérable chair à la chaîne. Là, abîmé dans mes larmes et ayant sans cesse les yeux élevés au ciel, je m’imaginais quelquefois être en la compagnie des anges, et je chantais dans les transports de ma joie : Nous courrons après vous, attirés par l’odeur de vos parfums. » (Cant., 1.)

Pour faire diversion à ces pensées qui l’obsédaient, il ajouta à ses travaux l’étude de la langue hébraïque. Mais, accoutumé à la lecture de Cicéron et des meilleurs auteurs latins, il ne pouvait sans répugnance se remettre à des alphabets et à des vétilles de grammaire ; de sorte que, rebuté par ce travail, il le quittait et le reprenait par intervalles, et se délassait de son ennui par les belles-lettres, qu’il n’avait pas abandonnées malgré la rigueur de sa pénitence. Mais Dieu, qui en voulait faire un des plus profonds interprètes de l’Écriture pour l’utilité de son Église, lui envoya une fièvre violente, durant laquelle il eut une vision où il lui fit connaître combien ce goût pour les auteurs profanes lui déplaisait, et le compte rigoureux qu’il en rendrait un jour s’il continuait à s’y appliquer avec une ardeur si peu convenable à son état de solitaire. Voici comment il en parle dans la même lettre à la vierge Eustoquie : « Telle était ma misère et l’excès de ma passion, qu’après avoir tout quitté pour servir Dieu et gagner le royaume du ciel, j’emportai avec moi les livres que j’avais amassés à Rome avec beaucoup de soin et de travail, et dont je ne pouvais me passer. Je jeûnais et je lisais Cicéron ; et, après de longues et fréquentes veilles, après avoir versé un torrent de larmes, que le souvenir de mes péchés passés faisait couler du fond de mon cœur, je me mettais à lire Platon : et lorsque, rentrant en moi-même, je m’appliquais à la lecture des prophètes, leur style dur et grossier me révoltait aussitôt. Aveugle que j’étais et incapable de voir la lumière, je m’en prenais au soleil au lieu de reconnaître mon aveuglement.

« Séduit donc et trompé de la sorte par les artifices de l’ancien serpent, j’eus vers la mi-carême une fièvre qui, pénétrant jusqu’à la moelle de mon corps, déjà épuisé par de continuelles austérités, me dessécha tellement que je n’avais plus que les os. Comme mon corps était déjà tout froid, et que je n’avais plus qu’un reste de vie que la chaleur naturelle entretenait encore, l’on s’apprêtait déjà à faire mes funérailles, lorsque tout à coup et dans un ravissement d’esprit je me sentis traîner devant un tribunal. Là, ébloui de l’éclat dont brillaient tous ceux qui étaient présents, je demeurai prosterné contre terre, sans oser seulement lever les yeux.

« Le juge m’ayant demandé quelle était ma profession, je lui dis que j’étais chrétien. « Tu mens, me dit-il, tu n’es pas chrétien, mais cicéronien : car où est ton trésor, là est aussi ton cœur. » Je me tus aussitôt, et me sentant plus déchiré par les remords de ma conscience que par les coups de verges qu’on me donnait, car il avait ordonné qu’on me fouettât, je pensais à ce verset du Psalmiste : Qui publiera vos louanges dans l’enfer, Seigneur ? (Psal. vi.) Je me mis aussi à crier et à dire en gémissant : Ayez pitié de moi, Seigneur, ayez pitié de moi. (Psal. lvi.) On m’entendait continuellement faire cette prière, et pousser ces cris parmi les coups de fouet que l’on déchargeait sur moi. Enfin ceux qui étaient présents à cette exécution s’étant jetés aux pieds du juge, le prièrent de pardonner à ma jeunesse et de me donner le temps de faire pénitence de ma faute, dont il pourrait ensuite me punir rigoureusement si jamais je lisais les auteurs profanes.

« Pour moi, qui, dans une telle conjoncture, aurais voulu promettre encore cent fois davantage, je commençai à lui dire avec les plus grands serments du monde, et en le prenant lui-même à témoin : « Seigneur, s’il m’arrive jamais de voir ou de lire les livres profanes, je consens que vous me regardiez comme un homme qui vous a renié. » Après un tel serment on me remit en liberté ; je revins au monde, et, au grand étonnement de tous ceux qui étaient autour de mon lit, j’ouvris les yeux en versant une si grande abondance de larmes, que les plus incrédules étaient convaincus de la douleur que je souffrais ; car ce n’était pas là un songe ni une de ces visions qui nous trompent durant le sommeil. J’en atteste ce tribunal redoutable devant lequel je me suis vu prosterné, et ce jugement rigoureux qui m’a donné tant de frayeur. Je sentais encore à mon réveil la douleur des coups que l’on m’avait donnés, et j’en avais les épaules toutes meurtries. Aussi fus-je dans la suite plus passionné pour l’étude des livres sacrés que je ne l’avais été auparavant pour les auteurs profanes. »

Il y aurait là-dessus bien des remarques à faire ; car quand on goûte plus Cicéron que l’Évangile, il paraît qu’on aime moins la vérité de Dieu que le frivole son des paroles des hommes. Ce n’est pas par ce seul endroit de ce saint docteur que nous apprenons combien la lecture passionnée des auteurs profanes est condamnable dans les personnes d’une profession sainte : plusieurs autres saints Pères l’ont également condamnée ; et si quelques saints en ont fait usage, ce n’a pas été par un goût de préférence sur la lecture des livres inspirés, mais pour la faire servir à la religion, comme David se servit de l’épée de Goliath pour lui couper la tête.

Saint Jérôme ne demeura que quatre ans dans le désert de Chalcis. Le schisme qui se forma dans Antioche au sujet de saint Paulin et de saint Mélèce, et la persécution de quelques envieux qui osèrent même l’accuser d’erreur dans la créance de la Trinité, l’obligèrent de se retirer aux environs de Jérusalem, et de passer d’une solitude à l’autre. Il s’arrêta ensuite à Bethléem, dont il goûta plus la situation ; ce qui le porta à s’y retirer tout à fait dans la suite. Il fut obligé de retourner de nouveau à Antioche, où saint Paulin l’ordonna prêtre ; mais il n’accepta cet honneur qu’à condition qu’il ne serait attaché à aucune église, ni obligé de quitter sa profession de moine. Il alla ensuite à Constantinople voir saint Grégoire de Nazianze, sous lequel, comme il le témoignait lui-même, il étudia l’Écriture sainte, et apprit la manière de la bien expliquer. Saint Grégoire ayant quitté la ville impériale, notre saint retourna à Jérusalem ; ensuite il fit avec saint Paulin et saint Épiphane le voyage de Rome, où le pape saint Damase avait convoqué un concile. Ce saint pontife le retint auprès de lui lorsque saint Paulin et saint Épiphane retournèrent chez eux, dans l’intention de s’en servir pour écrire des lettres et répondre aux différentes consultations des Églises.

Parmi ces grandes occupations saint Jérôme menait la vie d’un parfait religieux, et attirait sur lui tous les regards des personnes distinguées par leur rang et par leur piété. Sa réputation l’avait annoncé depuis longtemps dans cette capitale du monde, sa présence confirma tout ce qu’elle en avait publié d’avantageux. La sainteté de ses mœurs, son humilité, son genre de vie austère, tout cela, joint à son éloquence et aux grandes lumières qu’il avait acquises dans les saintes Écritures, lui concilia l’estime et l’affection de tous ceux qui pouvaient juger du vrai mérite. Il en profita pour porter plusieurs personnes de qualité à embrasser la perfection de la vie religieuse. Il eut aussi pour écolières dans les saintes lettres sainte Paule et beaucoup d’autres dames romaines, qui devinrent, sous sa direction, des modèles de sainteté.

Mais tandis qu’il était en si grande réputation, qu’on ne parlait de lui, soit à Rome, soit dans les provinces de l’empire, que dans des transports d’admiration, il se forma peu à peu contre lui une persécution de la part de quelques membres du clergé de Rome, qu’une basse jalousie anima, parce que sa vertu trop éclatante était la censure de leur conduite trop peu réglée. Cela, joint à son inclination pour le repos de la solitude, le détermina, après la mort de saint Damase, à retourner en Palestine avec son frère Paulinien, plus jeune que lui de trente ans, et il arriva à Jérusalem dans le fort de l’hiver. Il en repartit au printemps pour aller en Égypte visiter les saints solitaires. Il vit entre autres à Alexandrie le fameux Didyme. Enfin, de retour en Palestine, il se fixa à Bethléem pour n’en plus sortir. Sainte Paule, accompagnée de sa fille Eustoquie, s’y était déjà rendue. Elle y bâtit deux grands monastères, l’un pour des hommes, où saint Jérôme se retira, l’autre pour les personnes de son sexe. Le saint eut la direction de l’un de l’autre. Nous n’entrerons pas ici dans le détail de ses occupations ; il suffit de dire en général que tout son temps fut partagé entre les pratiques de charité et les ouvrages qu’il composa pour le service de l’Église, et qu’on peut appeler des travaux immenses, soit pour l’intelligence de l’Écriture sainte, soit pour combattre diverses hérésies qui s’élevèrent dans son temps, soit pour différentes apologies qu’il fut obligé de faire à l’occasion des persécutions qu’il eut à souffrir de la part de quelques hérétiques. Il ne crut pas, dans ces travaux si pénibles, devoir modérer ses austérités. Il vivait toujours dans la pénitence monastique, et la vigueur de son esprit, qu’il conserva tout entière, suppléait à la faiblesse de son corps, épuisé par les jeûnes et usé par les années.

La piété attirait de tous les pays du monde un grand nombre de pèlerins aux saints lieux, particulièrement des religieux. Cela augmenta encore depuis la prise et le pillage de Rome par les Goths, plusieurs venant chercher des asiles jusqu’en Palestine. Cette affluence considérable d’étrangers l’obligea à agrandir son monastère pour y recevoir plus de monde. Il envoya son frère Paulinien avec un ami vendre ce qui lui restait des héritages que ses parents lui avaient laissés, et il en employa le produit à l’augmentation de l’édifice. Ainsi il ajouta l’hospitalité à ses autres travaux, et ses offices de charité absorbant une grande partie de son temps, il ne lui restait que la nuit pour ses études ; ce qui était un surcroît de pénitence. Nous pouvons joindre à ceci les fonctions dont il était chargé pour le service de l’église de Bethléem ; car Posthumien, qui était venu des Gaules visiter les saints lieux, et qui demeura six mois auprès de lui, dit qu’il gouvernait l’église de Bethléem, ce qui montre qu’il y exerçait les fonctions ecclésiastiques.

Enfin saint Jérôme, très-grand docteur de l’Église, comme il est justement qualifié dans l’oraison de son office, et la gloire et l’ornement de l’état monastique, mourut à Bethléem, autant usé par ses travaux et la rigueur de sa pénitence que par le nombre de ses années. Il répandit par sa mort le deuil dans toute l’Église, qui ne put s’en consoler que par le trésor qu’il lui laissa dans les ouvrages qu’il avait faits pour elle. On est partagé sur la durée de sa vie. Saint Prosper lui donne quatre-vingt-onze ans, d’autres davantage, et d’autres moins. Il est difficile de décider dans cette diversité d’opinions.

Outre que ce saint docteur a écrit pour l’Église en général, il a travaillé aussi en particulier avec beaucoup de zèle pour les personnes engagées dans l’état monastique et pour les vierges chrétiennes. Il leur a donné, en écrivant les Vies de saint Paul ermite, de saint Hilarion et de plusieurs saintes, des modèles de perfection religieuse. L’histoire de saint Malch, que nous plaçons en son lieu, contient aussi de belles instructions. Il traduisit en latin les règles de saint Pacôme, de saint Théodore et d’Orsise, en faveur des moines latins qui demeuraient dans la Thébaïde, dans l’Égypte, et particulièrement au monastère de Métanée, et qui n’entendaient ni le grec ni l’égyptien, et cette traduction, que le prêtre Léonce, avec plusieurs autres frères, lui était venu demander au nom des autres, servit aussi aux moines de Syrie et aux religieuses du monastère de sainte Paule, qui était déjà morte lorsqu’il l’entreprit ; mais sainte Eustoquie s’y trouvait alors. Nous avons vu dans la discipline des monastères de Tabenne de quelle utilité pouvait être le recueil édifiant de ces règles.

Héliodore, qui, comme nous l’avons dit, était venu de Rome en Palestine avec lui, et qui retourna ensuite en sa patrie, lui donna sujet d’écrire une lettre où il représente avec beaucoup de force et d’éloquence les avantages de la vie solitaire, et combien on doit être fidèle à suivre cette vocation quand on l’a embrassée. Il commence par des reproches que son amitié lui faisait plutôt que son zèle ; ensuite il l’exhorte en ces termes à quitter son pays pour revenir à son désert : « Soldat délicat, que faites-vous dans la maison de votre père ? Quels retranchements y faites-vous pour vous fortifier contre vos ennemis ? Quels hivers y passez-vous sous les tentes et pavillons ?… Souvenez-vous du jour que vous vous êtes enrôlé par le baptême en la milice de Jésus-Christ ; vous avez alors prêté serment de lui être fidèle et de n’épargner ni votre père ni votre mère quand il s’agit de son service.

« Déjà le démon fait ses efforts pour étouffer Jésus-Christ dans votre cœur, et les ennemis de votre salut ne voient qu’à regret entre vos mains la solde que vous reçûtes lorsque vous vous engageâtes à son service. Quelques efforts que votre père, votre mère, votre sœur, votre petit-neveu fassent pour vous retenir, suivez d’un œil sec l’étendard de la croix… Je ne suis pas insensible ; je n’ai pas un cœur incapable de se laisser toucher, j’ai pourtant passé comme vous dans toutes ces épreuves… Mais, quand on aime véritablement Dieu et que l’on craint les peines de l’enfer, l’on n’hésite point à rompre ces chaînes… Vous me direz peut-être : « Est-il donc impossible de demeurer dans les villes sans cesser d’être chrétien ? » Vous n’êtes pas, mon frère, sur le même pied que les autres. Écoutez ce que dit le Fils de Dieu : Si vous voulez être parfait, allez, vendez tout ce que vous possédez, et donnez-en le prix aux pauvres, puis venez et me suivez. (Matth., xix.) Vous avez fait vœu de tendre à la perfection, car lorsque vous avez abandonné le siècle, vous vous êtes engagé en même temps à une vie parfaite. Or un parfait serviteur de Jésus-Christ ne doit point avoir d’autre possession que Jésus-Christ même ; ou s’il possède quelque chose avec lui, il cesse d’être parfait.

« Vous ne manquerez pas de me répondre que vous ne possédez plus rien ; mais si cela est, que ne combattez-vous donc, puisque ce détachement universel vous rend si propre au combat ? Peut-être croyez-vous pouvoir vous acquitter de tous ces devoirs dans votre patrie ? mais ne savez-vous pas que le Sauveur du monde n’a point fait de miracle dans la sienne ? D’où vous devez conclure qu’un solitaire qui demeure toujours dans son pays ne peut jamais s’élever à la perfection de son état.

« Après vous avoir chassé de ce retranchement, vous ne manquerez pas de vous prévaloir de l’exemple des ecclésiastiques ; et, comme ils demeurent dans leur ville, vous voudrez voir si j’oserai condamner leur conduite : à Dieu ne plaise que je parle mal de ceux qui tiennent dans l’Église la place des apôtres !… Si vos frères vous engagent par leurs pieuses sollicitations à prendre l’ordre de la prêtrise, je me réjouirai de votre élévation, mais je craindrai votre chute… Mettez-vous donc, mon cher frère, à la dernière place, afin que l’on vous fasse monter plus haut lorsqu’il arrivera quelqu’un moins distingué que vous… (Luc., xiv.) Si un solitaire tombe, le prêtre priera pour lui ; mais qui priera pour le prêtre s’il vient lui-même à tomber ?

« Ô désert toujours émaillé des fleurs de Jésus-Christ ! ô solitude d’où l’on tire les pierres qui servent à bâtir cette ville du grand roi dont parle saint Jean dans son Apocalypse ! ô désert où l’on a l’avantage de converser plus familièrement avec Dieu ! Que faites-vous dans le monde, mon frère, vous qui êtes plus grand que le monde ? Jusques à quand demeurerez-vous à l’ombre des maisons ? Jusques à quand serez-vous enfermé dans les villes d’où s’élève sans cesse une noire fumée ? Croyez-moi, il me semble être ici comme dans un nouveau séjour. Déchargé que je suis du poids accablant de mon corps, je prends plaisir à m’envoler dans un air plus serein et plus épuré.

« Que craignez-vous dans la solitude ? la pauvreté ? Jésus-Christ appelle les pauvres bienheureux ; le travail ? on ne couronne les athlètes qu’après avoir combattu jusqu’à se mettre tout en eau. Est-ce le soin de votre nourriture qui vous inquiète ? la foi n’appréhende point la faim. Craignez-vous de coucher sur la dure et de meurtrir votre corps déjà affaibli et desséché par une longue abstinence ? le Seigneur y reposera avec vous. Ne sauriez-vous souffrir une tête malpropre et des cheveux négligés ? l’apôtre saint Paul nous apprend que Jésus-Christ est la tête de l’homme. (I Cor., xxi.) La vaste étendue d’une affreuse solitude vous fait-elle peur ? vous n’avez qu’à vous promener en esprit dans le paradis ; dès que vous y aurez élevé vos pensées, vous ne serez plus dans le désert. Appréhendez-vous que, faute de prendre le bain, votre peau ne se ride et ne devienne trop rude ? quand une fois on a été lavé en Jésus-Christ, l’on n’a plus besoin de se laver davantage. En un mot, écoutez ce que saint Paul répond à toutes vos difficultés : Toutes les souffrances de la vie présente n’ont aucune proportion avec cette gloire qui sera un jour découverte en nous. » (Rom., viii.)

Saint Paulin ayant distribué ses grands biens aux pauvres et embrassé la pauvreté volontaire, demanda à saint Jérôme des règles pour vivre saintement dans son nouvel état. Le saint, qui, dans une autre lettre, l’avait exhorté à rompre entièrement avec le monde pour se consacrer à Dieu sans réserve, lui dit d’abord, dans sa réponse, qu’on ne mérite pas des louanges pour avoir été à Jérusalem, où il désirait aller et où il le louait de demeurer, mais pour y avoir bien vécu ; qu’on doit juger de chaque fidèle en particulier, non par le lieu de sa résidence, mais par le mérite de sa foi ; que le ciel est également ouvert et aux citoyens de Jérusalem et aux habitants de la Grande-Bretagne, parce que le royaume de Dieu, dit Jésus-Christ, est au dedans de nous (Luc., xvii) ; que saint Antoine et une infinité de solitaires de l’Égypte, de la Mésopotamie, du Pont, de la Cappadoce, de l’Arménie, n’avaient pas laissé d’aller au ciel sans avoir vu Jérusalem, et que saint Hilarion, né dans la Palestine, n’y alla qu’une seule fois et n’y demeura qu’un seul jour. « Vous pouvez donc, continue-t-il, sans préjudice de votre foi, vous passer de voir la ville de Jérusalem… Mais, après vous être éloigné, par l’état que vous avez choisi, de la foule et du tumulte des villes, votre emploi doit être de vivre à la campagne, de chercher Jésus-Christ dans la retraite, de prier avec lui sur la montagne, et de ne point chercher d’autre voisinage que celui des saints lieux, afin de renoncer entièrement aux villes et de demeurer constamment attaché à votre état… Imitons les maîtres de la vie solitaire que nous professons, c’est-à-dire les Paul, les Antoine, les Macaire et les Hilarion ; et, pour venir à l’autorité des saintes Écritures, reconnaissons pour nos maîtres Élie, Élisée et les enfants des prophètes, qui, toujours retirés à la campagne et vivant dans la solitude, se bâtissaient des cabanes sur le bord du Jourdain.

« Fuyez les compagnies, les festins, les vains compliments et les complaisances affectées des hommes du monde comme autant de chaînes qui ne sont propres qu’à nous rendre esclaves de la volupté ; mangez sur le soir un peu d’herbes et de légumes ; que ce soit pour vous des délices exquises que de manger quelquefois quelques petits poissons. Quand on se nourrit de Jésus-Christ et qu’on tourne vers lui tous les désirs de son cœur, on se met fort peu en peine de la qualité des viandes dont on repaît son corps… Soyez toujours appliqué à la lecture de l’Écriture sainte ; vaquez souvent à la prière, prosterné devant Dieu ; élevez vers lui toutes vos pensées ; veillez souvent, et mettez-vous quelquefois au lit sans avoir mangé… Ne faites point vanité d’être vêtu pauvrement ; n’ayez aucun commerce avec les gens du siècle, et particulièrement avec les grands. Qu’est-il nécessaire que vous voyiez souvent ce que vous avez méprisé pour embrasser la vie monastique ? »

Saint Jérôme, après avoir exhorté Héliodore à revenir dans la solitude, et tracé à saint Paulin, depuis évêque de Nole, les règles d’un véritable solitaire, écrit au moine Rustique, qui était Gaulois et originaire de Marseille ; il lui parle de la vie cénobitique et de la conduite qu’il doit garder. Il lui marque d’abord en ces termes les devoirs généraux de la vie monastique : « Si vous voulez donc, lui dit-il, être un véritable solitaire et ne pas vous contenter d’en avoir seulement les apparences, vous devez vous occuper uniquement de l’affaire de votre salut et ne vous plus embarrasser des intérêts de votre famille, puisque c’est en y renonçant que vous avez commencé d’être ce que vous êtes aujourd’hui. Faites paraître dans un extérieur négligé la beauté d’un cœur pur et innocent, et donnez à connaître par la pauvreté de vos vêtements combien vous méprisez tout ce que le monde estime, pourvu néanmoins que la vanité n’y ait point de part, et que vos paroles s’accordent toujours avec votre habit.

« Observez le jeûne, et ne cherchez point à flatter le corps par l’usage des bains. Modérez-vous pourtant dans vos jeûnes et usez-en avec discrétion, de peur qu’une trop grande abstinence ne vous affaiblisse trop l’estomac et ne vous oblige ensuite à manger plus qu’à l’ordinaire. Un peu de nourriture pris avec modération est profitable à l’âme et au corps… Tandis que vous demeurerez dans votre pays, regardez votre cellule comme un paradis terrestre. Allez cueillir dans l’Écriture sainte les différents fruits qu’elle produit ; faites-en vos délices et soyez toujours attaché à la lecture de ces livres divins. Occupez-vous uniquement du soin de votre âme, et sacrifiez-lui tout le reste.

« Comme il s’agit de former et d’instruire en vous un jeune solitaire qui, après avoir été élevé dès sa jeunesse dans l’étude des belles-lettres, s’est chargé du joug de Jésus-Christ, il faut examiner s’il vous est plus avantageux de vivre en particulier dans la solitude qu’en commun dans un monastère. Pour moi, je vous conseille de vous mettre en la compagnie des saints, de ne point vous conduire par vos lumières et de ne point vous engager sans guide dans des routes qui vous sont inconnues… Je ne prétends point condamner la vie solitaire, moi qui l’ai si souvent louée ; mais je veux qu’on n’entre dans le désert qu’après s’être bien exercé dans les combats spirituels du monastère ; je veux qu’on ait donné auparavant des preuves de bonnes mœurs et de conduite vertueuse ; je veux qu’on ne s’élève au-dessus des autres, par l’excellence de l’état d’anachorète, qu’après s’être rendu le dernier de tous dans la société des frères ; je veux enfin qu’on ne se soit pas laissé abattre par la faim ni vaincre par l’intempérance, qu’on se plaise dans la pauvreté, qu’on fasse voir dans son air, dans ses paroles, dans sa démarche une image de toutes les vertus…

« Ayez toujours quelque livre entre les mains ; apprenez le Psautier par cœur ; priez sans cesse, veillez exactement sur vos sens ; ne vous occupez point de vaines pensées ; que tout en vous se porte à Dieu ; étouffez par la patience les mouvements de la colère ; aimez l’étude de la sainte Écriture ; bannissez de votre esprit tout ce qui peut vous jeter dans le trouble ; soyez toujours occupé, et faites en sorte que le démon ne vous trouve jamais oisif. Si les apôtres travaillaient des mains pour ne pas être à charge aux autres, pourquoi n’en feriez-vous pas de même ? Travaillez donc à faire des corbeilles de jonc ou des paniers d’osier, ou à sarcler la terre, ou à cultiver un jardin… ou à faire des filets pour pêcher, ou à transcrire des livres, afin que vous puissiez tout à la fois et nourrir le corps par le travail des mains et rassasier l’âme par de bonnes lectures. Tout homme qui vit dans l’oisiveté est ordinairement en proie à une infinité de désirs. C’est une coutume établie dans les monastères d’Égypte de ne recevoir que des gens capables de travailler des mains, et ce n’est pas tant pour subvenir aux nécessités du corps qu’afin de pourvoir aux besoins de l’âme, et d’empêcher qu’un solitaire ne s’abandonne à des pensées vaines et dangereuses.

« Je vous dirai sur cela ce que j’ai vu moi-même en Égypte. Il y avait dans un monastère un jeune solitaire, Grec de nation, qui souffrait des tentations fâcheuses, et dont les jeûnes les plus rigoureux et les travaux les plus pénibles n’étaient pas capables de modérer la violence. Son supérieur, craignant qu’il ne succombât, s’avisa de ce moyen pour l’en délivrer. Il ordonna à un des anciens de le maltraiter sans cesse, et, après lui avoir dit bien des injures, d’être le premier encore à se plaindre de lui. Alors on faisait venir des témoins qui déposaient toujours en faveur de l’ancien, de sorte que ce pauvre frère pleurait beaucoup de ces calomnies, et de ce qu’il n’y avait personne qui rendit témoignage à la vérité. Il n’y avait que le supérieur qui prît adroitement ses intérêts, de peur qu’il ne se laissât accabler par un excès de tristesse. Cette persécution apparente dura bien un an. Ensuite on lui demanda s’il était toujours tourmenté de ces mauvaises pensées qui lui causaient auparavant tant de peines. « Hélas ! répondit-il, comment pourrais-je penser au mal, puisque je n’ai pas même le temps de respirer ? » Si ce jeune homme avait été seul, qui est-ce qui lui aurait aidé à vaincre ses tentations ?

« Je ne veux pas vous ennuyer par un plus long détail, continue saint Jérôme ; je prétends seulement vous faire voir par là que vous ne devez point être maître de vos actions, mais vivre dans un monastère sous la conduite d’un supérieur et en la compagnie de plusieurs, afin que vous puissiez apprendre de l’un à vivre dans l’humilité, de l’autre à pratiquer la patience, de celui-ci à garder le silence, de celui-là à être deux et pacifique. Vous n’aurez pas alors la liberté de faire tout ce qu’il vous plaira, mais vous serez obligé de manger ce que l’on voudra, de n’avoir que ce que vous aurez reçu, de porter les habits que l’on vous aura donnés, de faire tous les jours le travail qui vous aura été prescrit, d’obéir malgré vous à des personnes qui ne vous plairont pas, d’aller toujours vous coucher accablé de lassitude, de dormir en marchant et de sortir du lit avant d’avoir assez reposé. Vous chanterez aussi des psaumes à votre rang, et alors vous ne chercherez point à flatter l’oreille, mais à vous enflammer le cœur… Ces différentes occupations vous mettront à couvert des tentations, et, faisant succéder le travail à un autre travail, vous ne vous occuperez que de ce que vous avez à faire. »

Saint Jérôme a écrit des lettres à des personnes de différentes conditions, et leur a donné des règles de conduite admirable pour se sanctifier dans leur état. Les évêques, les ecclésiastiques de tous grades, les personnes mariées, les veuves, tous ont trouvé dans ses écrits des instructions et des conseils qu’ils n’avaient qu’à suivre fidèlement pour se rendre parfaits. Par exemple, écrivant à Héliodore, évêque d’Altino, pour le consoler de la mort de son neveu Népotien, il dit ces belles paroles : « Tous les fidèles ont les yeux sur leur évêque. Sa maison, sa conduite sont observées par tout le monde. Il doit servir d’exemple à toute son Église, et il n’y a personne qui ne croie pouvoir faire ce qu’il fait. » Il avait aussi écrit à Népotien, lorsqu’il vivait, cet avis, en parlant des ecclésiastiques : « Le mot grec cleros signifie sort et partage. On donne donc le nom de clercs aux ecclésiastiques, ou parce qu’ils sont dévoués au Seigneur, ou parce que le Seigneur est leur partage. Or celui qui appartient au Seigneur, ou qui a le Seigneur pour son partage, doit vivre comme un homme qui possède le Seigneur et en qui le Seigneur habite. » On peut voir aussi ce qu’il écrit à la veuve Furia, de l’illustre et ancienne famille des Camilles, touchant les devoirs d’une veuve chrétienne ; et à Léta, comment elle devait conserver sa fille, la jeune Paule, dans l’innocence, pour la consacrer au Seigneur. Rien n’est plus sage et plus pieux que les avis qu’il donne là-dessus.

Enfin, saint Jérôme semble s’être surpassé lui-même lorsqu’il écrit en faveur de la virginité et qu’il donne des préceptes aux vierges chrétiennes. Nous passerions les bornes que nous nous sommes prescrites si nous voulions rapporter tout ce qu’il a dit sur cet état angélique et sur les devoirs qu’il renferme. On peut lire surtout sa lettre à Eustoquie et à Démétriade pour s’en instruire plus particulièrement. Il suffira de remarquer en général qu’il relève l’état des vierges jusqu’à les comparer aux apôtres et aux martyrs ; qu’elles sont d’autant plus conformes à Jésus-Christ, que ce divin Sauveur est leur chef et l’auteur de leur virginité. Il leur recommande surtout de renoncer aux vanités du siècle, de fuir la compagnie des jeunes femmes mondaines et la bonne chère, de vivre dans la retraite, de ne sortir que rarement et par nécessité, de s’appliquer à des lectures saintes, de mortifier leurs sens, d’aimer le travail et de fuir l’oisiveté et les entretiens inutiles ; de vivre dans une si grande retenue, qu’elles inspirent aux autres, par leur vertu, l’estime et l’amour de la chasteté. Enfin, il dit ces belles paroles, qui renferment en deux mots toute la sainteté d’une vierge chrétienne : « Il faut qu’une épouse de Jésus-Christ, semblable à l’arche d’alliance, soit toute dorée et par dedans et par dehors ; elle doit être la dépositaire de la loi du Seigneur ; et, comme l’arche ne contenait que les tables du Testament, ainsi doit-elle bannir de son esprit l’idée de toutes les choses extérieures et sensibles. C’est sur ce propitiatoire, comme sur les ailes des chérubins, que le Seigneur veut s’asseoir. »