PleureusesErnest Flammarion (p. 227-230).


PRIÈRE À SOI


Après la fête automnale,
Rempli d’une horreur d’espoir,
Je reviens, vision pâle,
Dans mon soir !

On dirait que les champs meurent,
Au soleil illimité.
Je m’arrête ; mes yeux pleurent
De beauté.


La terre est une prière,
L’ombre s’est mise à genoux,
Et je sens que la lumière
Vient à nous.

Je vais, je vais reconnaître
Le seuil docile, éternel,
Les murs gris, et la fenêtre
Dans le ciel.

Et près de la vitre éclose
On peut me voir un moment,
M’incliner vers toute chose
Tristement.

Et voilé du long silence,
Tremblant de faim et de froid,
Je comprends, angoisse immense,
Que c’est moi !


Le pauvre monde m’implore,
L’ombre est l’ombre d’autrefois…
Mes bras s’étendent, j’adore,
Et je crois.