Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome XIII, 2.djvu/268

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
166
CLITOPHON

il contribua grandement à établir les Quatre-Cents, puis, quatre mois plus tard, il fut un des principaux auteurs de leur chute[1]. Après avoir essayé de tenir la balance entre démocrates et oligarques à la fin de la guerre du Péloponnèse, il se rallie à l’oligarchie et compte parmi les Trente tyrans[2]. Puis, partisan des mesures modérées, il s’oppose et résiste à ces derniers et meurt victime de Critias[3]. Toutes ces tergiversations n’empêchent pas Aristote de porter sur lui un jugement favorable ; « Pour Théramène, écrit-il, comme la vie publique a été très agitée de son temps, les jugements portés sur lui sont divers. Cependant il semble à ceux qui n’expriment pas une opinion à la légère qu’il ne tentait pas de détruire toutes les formes de gouvernement, comme on l’en accuse faussement, mais qu’il les soutenait toutes tant qu’elles ne faisaient rien contre la loi, en homme convaincu qu’avec toutes on pouvait remplir ses devoirs civiques, ce qui est la conduite d’un bon citoyen, mais sans leur faire de concessions et les combattant au point de se faire détester quand elles agissaient contre la loi[4] ». La mort très courageuse de Théramène[5] justifie suffisamment cette appréciation. De par ailleurs, ces perpétuels changements d’attitude ne dénotent-ils pas un caractère mobile à l’excès, et les contemporains de cet homme politique faisaient-ils preuve de tant d’injustice en lui donnant le surnom de κόθορνος, chaussure, explique Xénophon, qui s’adapte pareillement à l’un ou l’autre pied[6] ? N’oublions pas également, fait passé sous silence par Aristote, que Théramène se fit l’accusateur des généraux athéniens dans l’affaire des Arginuses, et cela dans des conditions assez peu honorables[7]. On sait comment Socrate s’opposa seul au jugement illégal du peuple.

Anytos fut stratège à Pylos en 409 et semble s’être acquitté fort mal de sa charge. Accusé d’avoir perdu la ville, il acheta le tribunal qui devait le juger et fut acquitté[8]. En

  1. Constit. d’Ath., XXVIII, 3 ; XXXII, 2.
  2. Xénophon, Helléniques, II, 3, 2.
  3. Constit. d’Ath., XXXVI, XXXVII.
  4. Constit. d’Ath., XXVIII, 5.
  5. Constit. d’Ath., XXXVI, XXXVII.
  6. Xénophon, Helléniques, II, 3, 31.
  7. Xénophon, Helléniques, I, 7, 4.
  8. Constit. d’Ath., XXVII, 5.