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Rome par Romulus en l’honneur de Jupiter Feretrius ; mais comme on les nommoit plus communément jeux Capitolins, voyez Capitolins. (D. J.)

TARPEIUS, (Mythologie.) Jupiter a quelquefois ce surnom à cause du temple qui lui étoit consacré sur le mont Tarpcïen, depuis appellé Capitole ; il y avoit aussi les jeux tarpeïens ou capitolins, que l’on célébroit en l’honneur de ce dieu. (D. J.)

TARQUINIE, Tarquinii, (Géog. anc.) ville de la Toscane, selon Tite-Live, l. I. c. xxxiv. ses habitans sont nommés Tarquinienses. Voyez ce mot.

Tanaquille, femme de Tarquinius Priscus, roi de Rome, étoit née à Tarquinie, où elle fut mariée à Lucumon, homme très-riche, & qui par cette alliance espéra de s’avancer aux dignités ; cependant, comme il y trouva de grands obstacles en Toscane, Tanaquille son épouse l’engagea de venir s’établir à Rome avec elle. Il s’y rendit, se fit nommer Tarquinius, & s’insinua de telle sorte dans les bonnes graces du roi, que les charges qu’il en obtint lui donnerent lieu d’aspirer à la couronne, & de réussir dans cette ambition. Il fut tué dans son palais l’an 38 de son regne.

Tanaquille, sans se déconcerter de ce rude coup, fit tomber la couronne sur la tête de Servius Tullius son gendre. La mémoire de cette habile femme fut vénérée dans Rome pendant plusieurs siecles ; on y conservoit les ouvrages de ses mains, & l’on attribuoit de grandes vertus à sa ceinture.

Varron, contemporain de Cicéron, assûre qu’il avoit vu au temple de Sangus la quenouille & le fuseau de Tanaquille, chargés de la laine qu’elle avoit filée ; il ajoute que l’on gardoit au temple de la Fortune une robe royale qu’elle avoit faite, & que Servius Tullius avoit portée. Pline nous apprend que c’étoit à cause de cela que les filles qui se marioient étoient suivies d’une personne qui portoit une quenouille accommodée, & un fuseau garni de fil. Il dit aussi que cette reine fut la premiere qui fit de ces tuniques tissues, que l’on donnoit aux jeunes garçons quand ils prenoient la robe virile, & aux filles qui se marioient.

Les Romains attribuoient de grandes vertus à la ceinture de cette princesse, non comme à une cause morale, mais comme à une cause physique. Ils supposoient que Tanaquille avoit trouvé d’excellens remedes contre les maladies, & qu’elle les avoit enfermés dans sa ceinture. C’est pourquoi ceux qui en ôtoient quelques raclures se persuadoient qu’elles leur apporteroient la guérison, non pas à cause que l’ame de cette reine récompenseroit leur foi, mais à cause qu’ils enleveroient quelques particules des remedes qu’elle y avoit mis. Ainsi l’on ne peut pas faire des comparaisons exactes entre ceux qui recouroient à la statue de Tanaquille pour en frotter la ceinture, & ceux qui tâchent d’avoir une piece d’étole de saint Hubert, ou qui font toucher leurs chapelets à quelques reliques. De part & d’autre, il y a beaucoup de crédulité ; mais laissons, dit Bayle, aux gens de loisir à examiner si l’ancienne Rome égale en cela la nouvelle. (D. J.)

TARQUINIENSES, (Géog. anc.) peuples d’Italie dans la Toscane ; c’est ainsi que Pline, l. III. c. v. appelle les habitans de la ville, qui est nommée par Tite-Live, l. I. c. xxxiv. & xlvij. Tarquinii, & Tarquinia par Ptolomée, l. III. c. j. Justin, l. XX. c. j. dit qu’elle tiroit son origine des Grecs. Elle devint ensuite colonie romaine, & enfin un siege épiscopal. Le nom moderne de cette ville est la Tarquinia, & par corruption la Tarquina.

On a trouvé, selon Labat, voyage d’Italie, t. V. en travaillant dans les environs de Cornette, à micôte d’une colline, les anciennes sépultures de la ville Tarquinia. Ces sépultures ou ces grottes sont à

mi-côte de la colline, sur laquelle étoit cette ville infortunée ruinée depuis tant de siecles, qu’on n’en avoit presque plus aucune mémoire. Ces grottes, qui ont servi de sépulchre aux héros de ce tems, sont creusées dans le tuf dont cette montagne est composée. Ce sont, pour la plûpart, des chambres de dix à douze piés en quarré, sur neuf à dix piés de hauteur. On voyoit dans quelques-unes des restes de peintures, c’est à-dire du rouge, du bleu, du noir, qui sembloient marquer des compartimens plutôt que des figures, car l’humidité a tout effacé. On y a trouvé des armes que la rouille avoit presque consommées, comme des épées & des lames de couteaux. Ce qu’on a rencontré de plus entier & en plus grande quantité, ce sont des vases de terre & des pots assez gros. A la vérité ces pieces & particulierement celles qui étoient vernissées étoient ollaires, d’une espece de talc blanchâtre, qui en couvroit toute la superficie sans endommager le vernis. La montagne Tarquinia est à présent un bois, où il n’est pas aisé de rien découvrir qui puisse faire connoître quelle étoit la grandeur de la ville. (D. J.)

TARRABENI, (Géog. anc.) peuples de l’île de Corse. Ptolomée, l. III. c. ij. les place au midi des Cervini, & au couchant de l’île. Le territoire qu’ils occupent est appellé par Léander Bastilica-Paese.

TARRAGENSES, (Géog. anc.) peuples de l’Espagne citérieure ; ils étoient alliés à des Romains, selon Pline, l. III. c. iij. Leur ville étoit nommée Tarraga par Ptolomée, l. II. c. vj. qui la place dans les terres, & la marque dans le pays des Vascones. On la nomme aujourd’hui Tarrega ; elle est dans la Catalogne, à six lieues de Lérida. (D. J.)

TARRAGONE, (Géog. mod.) petite ville d’Espagne, dans la Catalogne, sur une colline, dont la pente s’étend jusqu’au rivage de la mer Méditerranée, entre deux rivieres, le Gaya & le Francoli. Elle est située à 20 lieues au couchant de Barcelone, & à 90 de Madrid. L’air y est pur, & il s’y fait du commerce en huile, en lin & en vin. Son territoire est très-fertile, & offre un des plus beaux paysages du monde ; mais son port n’est pas bon, à cause des rochers qui en empêchent l’entrée aux gros vaisseaux.

Tarragone est honorée d’une université & d’un siege archiépiscopal, qui a disputé la primatie à celui de Tolede. Son diocese s’étend sur 197 paroisses. L’archevêque jouit de vingt mille ducats de revenu, & a pour suffragans les évêques de Barcelone, de Tortose, de Lérida, de Girone, &c.

Tarragone est fortifiée de bastions & d’autres ouvrages réguliers à la moderne. Plusieurs de ses maisons sont presque toutes bâties de grosses pierres de taille quarrées. Long. 18. 55. latit. 41. 10.

Les Romains la nommerent Taraco, d’où les Espagnols ont fait Tarragona. Les Scipions s’en étant rendu maîtres dans les guerres puniques, en firent le lieu de leur résidence, ainsi qu’une belle place d’armes contre les Carthaginois. Auguste s’y trouvant dans la vingt-troisieme année de son regne, lui donna le titre d’Augusta, & y reçut plusieurs ambassadeurs. Ses habitans, par reconnoissance, bâtirent un temple en son honneur. L’empereur Antonin le Pieux aggrandit son port, & le garnit d’un grand mole. Enfin cette ville devint si puissante & si considérable, que, dans la répartition qui fut faite de l’Espagne, les Romains donnerent son nom à la plus grande partie de ce vaste continent, en l’appellant Espagne tarragonoise.

Après cela faut-il s’étonner qu’on ait trouvé dans cette ville & aux environs beaucoup de monumens anciens, comme des médailles, des inscriptions, & les ruines d’un cirque où se faisoient les courses des chevaux dans une place nommée aujourd’hui la plaça de la Fuente ?