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On peut aussi tirer le vitriol des pyrites par le moyen du feu qui dégage, sous la forme de soufre, une partie de l’acide et du feu fixe qu’elles contiennent[1] ; on lessive ensuite la matière qui reste après cette extraction du soufre, et pour charger d’acide l’eau de ce résidu, on la fait passer successivement sur d’autres résidus également désoufrés, après quoi on l’évapore dans des chaudières de plomb : la matière pyriteuse n’est pas épuisée de vitriol par cette première opération ; on la reprend pour l’étendre à l’air, et au bout de dix-huit mois ou deux ans, elle fournit, par une semblable lessive, de nouveau vitriol.

Il y a dans quelques endroits des terres qui sont assez mêlées de pyrites décomposées pour donner du vitriol par une seule lessive : au reste, on ne se sert que de chaudières de plomb pour la fabrication du vitriol, parce que l’acide rongerait le fer et le cuivre. Pour reconnaître si la lessive vitriolique est assez chargée, il faut se servir d’un pèse-liqueur ; dès que cet instrument indiquera que la lessive contient vingt-huit onces de vitriol, on pourra la faire évaporer pour obtenir ce sel en cristaux ; il faut encore quinze

    est remarquable par la grande pureté du vitriol qui s’y produit : nous empruntons de M. Jars la description de cette fabrique de Newcastle. « Les pyrites martiales, dit-il, que l’on trouve très fréquemment dans les mines de charbon que l’on exploite aux environs de la ville de Newcastle, joint à la propriété qu’elles ont de tomber aisément en efflorescence, ont donné lieu à l’établissement de plusieurs fabriques de vitriol ou couperose.

    » Telles qu’elles sont extraites des mines, elles sont vendues à des compagnies qui les paient à raison de huit livres sterling les vingt tonnes (vingt quintaux la tonne), rendues aux fabriques qui, pour la commodité du transport, sont placées au bord d’une rivière sur le penchant de la montagne ; au-dessus, on a formé plusieurs emplacements pour y recevoir la pyrite, lesquels ont, à la vérité, la même inclinaison que la montagne, mais dont on a regagné le niveau avec des murs construits sur le devant et sur les côtés, de même que, si l’on eût voulu y pratiquer des réservoirs ; le sol, dont la forme est un plan incliné, est battu avec de la bonne argile, capable de retenir l’eau ; et dans les endroits où ces plans se réunissent, il y a des canaux qui communiquent à un autre principal placé le long du mur de devant.

    » C’est sur ce sol que l’on met et que l’on étend la pyrite pour y être décomposée, soit par l’humidité répandue dans l’atmosphère, soit par l’eau des pluies, qui, en filtrant à travers, se charge de vitriol avant que d’arriver dans les canaux, et de ceux-ci se rend dans deux grands réservoirs, d’où on l’enlève ensuite pour la mettre dans les chaudières…

    » Ayant mis dans le fond de la chaudière de la vieille ferraille, que l’on arrange le long des côtés latéraux, et jamais dans le milieu, où le feu a trop d’action, on la remplit avec de l’eau des réservoirs, et partie avec des eaux mères, ayant soin de la tenir toujours pleine pendant l’ébullition jusqu’à ce qu’il se forme une pellicule. La durée d’une évaporation varie suivant le degré de force que l’eau a acquise ; trois à quatre jours suffisent quelquefois pour concentrer celle d’une pleine chaudière ; d’autres fois, elle exige une semaine entière ; après ce temps, on transvase cette eau dans une des caisses de cristallisation, où elle reste plus ou moins de temps, suivant le degré de chaleur de l’atmosphère…

    » Chaque chaudière produit communément quatre tonnes ou quatre-vingts quintaux de vitriol, indépendamment de celui qui est contenu dans les eaux mères ; il se vend aux Hollandais à raison de quatre livres sterling la tonne ; si on l’établit à un si bas prix, il faut observer qu’on n’a eu, pour ainsi dire, que les premières dépenses de l’établissement à faire, puisque cette pyrite n’a pas besoin d’être calcinée, et que les seuls frais sont ceux de l’évaporation, qui sont d’un mince objet dans un pays où le charbon est à très bas prix ; d’ailleurs, ce vitriol est de la meilleure qualité, puisqu’il n’est composé que du fer et de l’acide vitriolique : il n’en est pas de même de celui que l’on fabrique communément en Allemagne et en France avec des pyrites extraites d’un filon, qui contiennent presque toujours du cuivre ou du zinc, dont il est comme impossible de les priver entièrement, surtout avec bénéfice. » Voyages métallurgiques, t. III, p. 316 et suiv.

  1. Voyez les procédés de cette extraction, sous l’article du Soufre.