La Liberté de conscience (Cinquième édition 1872)/1.XVII

Hachette et Cie (Cinquième éditionp. 99-119).


CHAPITRE XVII.

La Révocation de l’Édit de Nantes.


À coup sûr, quand Louis XIV monte sur le trône, nous sommes loin de la barbarie du moyen âge, l’esprit humain est bien en possession de lui-même. C’est l’époque des plus parfaits écrivains, des artistes les plus accomplis, des mœurs les plus raffinées, de la société la plus élégante. La France, à ce moment-là, est partagée entre deux croyances ; l’une souveraine, et l’autre seulement tolérée, mais tolérée en vertu d’un pacte solennel. Les protestants, grâce à l’édit de Nantes, jouissent de tous les droits de citoyens, ils peuvent aspirer à tous les emplois ; ils ont des villes où leur culte se célèbre sans entraves, des chambres mixtes dans les parlements. Cette paix aurait pu être durable, même dans un pays où les fils des victimes de la Saint-Barthélemy coudoyaient à chaque pas les fils des ligueurs, si l’on avait eu dans le cœur des sentiments véritablement chrétiens. Mais le feu des haines religieuses n’était que comprimé sans être éteint. Les hommes d’État et les fanatiques aspiraient avec une égale ardeur au renversement de l’édit de Nantes. Henri IV, disaient les politiques, a organisé le parti protestant comme parti, non comme religion, il a constitué un État dans l’État : cette égalité armée de deux religions en présence l’une de l’autre ressemble plutôt à une trêve qu’à la paix. Richelieu avait tenu le même langage à Louis XIII dans son Testament politique : « Lorsque Votre Majesté me donna grande part en sa confiance, disait-il, je puis dire avec vérité que les huguenots partageaient l’État avec elle. » Ces raisons qui préoccupaient beaucoup de bons esprits, n’étaient pas sans force. L’intolérance de son côté ne songeait pas à la politique, ou elle n’y songeait qu’en sous-ordre, pour trouver des auxiliaires dans les hommes d’État ; elle avait ses arguments à elle ; elle combattait pour sa propre main. Qu’était-ce à ses yeux qu’un huguenot, sinon un homme obstiné dans l’erreur, et qu’il fallait contraindre à rentrer dans le bon chemin, s’il n’écoutait pas les raisons et refusait de se laisser convaincre ? Et qu’était-ce qu’un ministre huguenot, sinon l’apôtre d’une erreur mortelle ? Le roi devait à Dieu, à l’Église, à sa conscience, au bonheur des peuples dont la destinée lui était confiée, de combattre par tous les moyens le fléau de l’hérésie. L’Espagne pouvait lui servir d’exemple. Malgré l’inquisition, malgré toute la vigilance d’un gouvernement absolu, l’hérésie, qui se rit de toutes les barrières, et qui prend des forces et des accroissements dans le péril, avait menacé de l’envahir. Elle avait pénétré dans le clergé, dans les cloîtres[1]. Le vieux roi Charles-Quint, retiré dans son couvent de Saint-Just, en avait frémi. Mais Philippe II, se souvenant que sa maison avait été en Europe la ferme colonne de la foi, n’avait reculé devant aucun sacrifice pour extirper cette plaie[2]. Poussé par le saint-siége, aidé par l’inquisition, dont lui-même stimulait le zèle, il avait rempli les cachots, allumé les bûchers, jusqu’à ce que l’hérésie fût détruite et vaincue par l’extermination de tous les hérétiques[3]. Voilà ce qu’on répétait chaque jour à Louis XIV ; et comme il était préoccupé de son aïeul Henri IV et de la foi solennellement jurée, on lui remettait aussi sous les yeux le serment du sacre qui contenait les paroles suivantes : « Au nom de Jésus-Christ, je promets au peuple chrétien qui m’est soumis de m’appliquer, selon mon pouvoir et de bonne foi, à écarter de toute l’étendue de ma domination tous les hérétiques dénoncés par l’Église… Je confirme ces promesses par serment ; j’en prends Dieu à témoin et ses saints Évangiles. »

Déjà sous Louis XIII, pour accorder ces paroles avec l’édit de Nantes, on avait eu recours à un étrange subterfuge : on avait défendu par ordonnance royale d’appliquer aux réformés la qualification d’hérétiques. Il est juste de dire qu’au commencement de son règne, Louis XIV avait exécuté ponctuellement les prescriptions de l’édit. On avait même publié, pendant sa minorité, une déclaration destinée à rassurer les protestants [4] : « Voulons et nous plaît que nos dits sujets faisant profession de la religion prétendue réformée jouissent et aient l’exercice libre et entier de la dite religion, conformément aux édits, déclarations et règlements faits sur ce sujet, sans qu’à ce faire ils puissent être troublés ni inquiétés en quelque manière que ce soit. Lesquels édits, bien que perpétuels, nous avons de nouveau, en tant que besoin est ou serait, confirmés et confirmons par ces dites présentes. Voulons les contrevenans à iceux être punis et châtiés, comme perturbateurs du repos public. »

Le roi, devenu majeur, s’efforça de diminuer le nombre des protestants, en leur refusant toutes les grâces qui dépendaient de lui ; « et cela, dit-il dans une lettre à son fils, par bonté plus que par rigueur, pour les obliger par là à considérer de temps en temps, d’eux-mêmes et sans violence, si c’était avec quelque bonne raison qu’ils se privaient des avantages qui pouvaient leur être communs avec tous ses autres sujets. » Il avait encore une autre tactique, qui était de récompenser largement les conversions, et il avait fondé pour cela une caisse secrète, dont Pellisson, un nouveau converti, avait l’administration. C’était, il faut l’avouer, bien mai connaître et bien peu respecter la liberté de conscience ; mais au moins ces indignes manœuvres n’allaient pas jusqu’à la persécution violente. Bientôt on se lassa de cette douceur. Pendant une période de vingt-cinq ans, le gouvernement prit à tâche de fatiguer la patience des protestants, de leur rendre la vie impossible, de retirer une à une, sous de vains prétextes, ou à l’aide d’indignes subterfuges, toutes les concessions de l’édit de Nantes. Dans l’impossibilité de suivre la marche historique de cette persécution, j’essayerai d’en présenter le résumé et de montrer combien elle fut habile et complète. On verra aussi à quel point elle fut odieuse.

L’exercice de la religion réformée fut d’abord proscrit dans tous les chefs-lieux de diocèses et dans les seigneuries appartenant à des ecclésiastiques. Les consistoires ne purent voter de subsides que pour le lieu de leur circonscription [5]; ils ne purent augmenter le nombre des ministres en exercice[6]. On les réduisit sur la fin à ne s’assembler que tous les quinze jours, et en présence d’un commissaire[7]. Les bancs d’honneur élevés dans les temples furent abattus ; les consuls ou échevins durent, en se rendant au service divin, quitter les marques de leur dignité [8] : il fallut, dans ces temples proscrits, garder une attitude de proscrits. Les seigneurs haut-justiciers avaient, en vertu de l’édit, le droit d’ouvrir chez eux un prêche public ; on enjoignit à ceux qui se convertissaient de fermer leur temple, en attendant qu’on réduisît les autres à faire leurs dévotions à huis clos[9]. Les simples gentils-hommes, sans droit de haute justice, et qui par conséquent n’avaient pas de prêche public, durent effacer dans leurs maisons toutes les traces du Culte réformé[10]. On enjoignit aux ministres de quitter l’habit religieux[11]. Ils ne purent résider dans un lieu où le culte était interdit, sans encourir la destitution[12], ni exercer leur ministère ailleurs que dans le lieu de leur résidence[13], ni être attachés plus de trois ans à la même congrégation[14]. On les soumit à la taille[15]. Ce fut un délit d’espèce nouvelle de chanter les psaumes dans la rue, ou même dans les boutiques et dans les chambres, à voix si haute qu’elle fût entendue au dehors[16]. Ce règlement ne suffit pas : le chant des psaumes fut prohibé partout ailleurs que dans les temples[17], et notamment sur les places publiques lors de l’exécution des criminels[18]. Même dans l’enceinte des temples, le chant des psaumes était suspendu quand une procession catholique venait à passer[19], et les ministres ne pouvaient prêcher dans leurs propres temples les jours où les archevêques et évêques traversaient la ville pour leurs visites pastorales[20]. Si le saint Sacrement passait, ou le viatique, les protestants devaient s’arrêter et se découvrir[21] ; s’il y avait une procession catholique, ils devaient souffrir qu’on tendît des tapisseries sur le devant de leurs maisons[22]. Le droit accordé aux seigneurs protestants d’avoir un prêche dans leur château, fut successivement réduit à n’être qu’un culte privé[23]. Non-seulement on diminuait le nombre des temples ; mais quand le culte eut été interdit presque partout, et qu’on vit les protestants parcourir de grandes distances pour aller au prêche, on condamna les fidèles à l’amende et les ministres à la destitution. Les temples furent rasés[24], les cimetières fermés[25]. Les protestants auraient pu, quand la terre manquait, se réfugier sur les mers : l’intolérance les poursuivait jusque-là. Il n’y avait pas de liberté, même sur les navires[26]. Il fut enjoint aux ministres de parler de la religion catholique « en termes convenables, dans leurs prêches et ailleurs[27], » à tous les auteurs protestants d’obtenir pour leurs livres la signature d’un ministre, qui devenait responsable, et l’autorisation du procureur du roi[28]. La tenue des synodes et consistoires fut rigoureusement réglementée, soumise à l’autorisation royale[29], et en fait presque constamment interdite. Surtout on eut soin d’empêcher tout ce qui pouvait étendre la juridiction consistoriale[30], ou établir une relation et des correspondances entre les divers consistoires[31]. La compétence des chambres de l’édit fut restreinte[32], et dans ces chambres mêmes, les magistrats protestants furent déclarés incapables de présider en l’absence du président, quoique doyens d’âge[33], et plus tard, incapables de monter à la grand’chambre[34]. On en vint, quelque temps avant la révocation, jusqu’à exclure les conseillers religionnaires de la connaissance des procès instruits contre les ministres[35]. Des restrictions analogues eurent lieu pour le régime des municipalités dans les villes où elles étaient mi-parties, et la prédominance fut assurée aux catholiques[36]. Tandis qu’il était interdit aux protestants de se cotiser pour faire des dépenses en commun[37], ils demeuraient assujettis aux impositions ordonnées « tant pour la réédification ou réparation des églises paroissiales et maisons curiales, que pour l’entretènement des maîtres d’écoles et régents catholiques[38]. » Une déclaration du 21 juillet 1664 exigea la preuve de catholicité pour l’obtention des lettres de maîtrise, et prononça la nullité des lettres antérieures où cette preuve n’était pas mentionnée. Cette tentative d’exclusion ne réussit qu’imparfaitement, car il ne suffit pas d’être absolu pour être fort, et nous trouvons, cinq ans après[39], un arrêt du parlement qui défend aux maîtres brodeurs de la religion réformée de faire des apprentis. On alla jusqu’à décider que les catholiques seraient préférés aux protestants pour la fourniture des chevaux de louage dans les villes et bourgs du royaume[40]. On leur interdit successivement l’exercice de la profession d’apothicaire, de celle d’épicier[41] et de celle de médecin[42]. On obligea les imprimeurs et les libraires à vendre leur matériel et leur privilège[43]. Autre entrave pour le travail : on assujettit les protestants à chômer toutes les fêtes catholiques[44]. Ils n’étaient pas plus favorisés pour les charges publiques. On les exclut, tantôt de toute judicature[45], tantôt de tout emploi dans la maison du roi et des princes[46]. Les seigneurs haut-justiciers nommaient des magistrats ; on leur défendit de choisir des protestants[47]. Il n’y eut pas d’exception sur ce point pour les seigneurs non catholiques[48]. Les receveurs généraux reçurent l’ordre de n’employer les protestants, ni comme percepteurs pour le recouvrement des tailles, ni comme huissiers ou commis dans leurs bureaux[49]. On ne pouvait les nommer assesseurs, ni experts, ni arbitres, pour ne pas leur conférer une sorte de magistrature[50]. Le parlement de Paris prononça la destitution de tous les suppôts de justice faisant profession de la religion réformée[51]. Six mois furent accordés aux procureurs protestants pour se démettre de leurs charges en faveur de catholiques[52]. Longtemps auparavant, le parlement de Rouen avait décidé qu’il ne tolérerait plus au barreau de la cour plus de dix avocats religionnaires, ni plus de deux dans les tribunaux subalternes[53]. Cette prohibition, qui alors paraissait très-dure, fut bien dépassée depuis, quand la profession d’avocat fut interdite aux protestants dans tout le royaume[54]. On leur ôta jusqu’au métier de clerc[55]. Le cercle se resserrait de plus en plus autour d’eux ; on n’allait à rien moins qu’à leur interdire tout moyen de subsistance.

On les poursuivait aussi dans leurs sentiments les plus intimes. Des empêchements nombreux furent apportés à la conclusion des mariages mixtes. L’article 11 du règlement du 10 avril 1666 porte que les ministres ne pourront faire aucun mariage entre catholique et protestant, lorsqu’il, y a opposition, et tant que ladite opposition n’a pas été levée par les juges à qui la connaissance en appartient. Ils seront d’ailleurs tenus, dans tous mariages, d’observer les lois de l’Église catholique pour les degrés de consanguinité et d’affinité[56]. Les enfants d’un père catholique et d’une mère protestante devront être baptisés à l’église[57] et élevés dans la religion catholique[58]. Il en sera de même des enfants exposés et abandonnés[59] et des bâtards[60]. Bientôt l’obligation d’élever dans la religion catiiolique tous les enfants issus d’un mariage mixte ne parut plus une barrière suffisante : ces enfants furent déclarés illégitimes et incapables de succéder[61]. On pensa que les parents pourraient cacher un enfant, dissimuler son origine pour échapper à ces prescriptions ; pour éviter la complicité ou la fraude, l’exercice de la profession de sage-femme fut interdit aux protestantes[62]. C’est toujours sur les enfants qu’on a les yeux ; c’est par eux et en eux qu’on punit les pères ; c’est en les arrachant au protestantisme qu’on veut en finir. Les édits, les déclarations, les arrêts du conseil se multiplient, chaque jour plus oppressifs. Il n’y aura d’école protestante qu’aux lieux où l’exercice public de la religion est autorisé[63]. Il n’y aura, dans les lieux où la religion est autorisée, qu’une seule école et un seul maître[64]. On n’y enseignera que la lecture, l’écriture et l’arithmétique[65]. Toute faculté fut donnée aux enfants pour se convertir malgré leurs père et mère. Ils purent exiger une pension dès l’âge de quatorze ans pour les garçons et de douze ans pour les filles[66]. À douze ans, les filles des religionnaires purent entrer, contre le gré de leurs parents, dans la maison de la propagation. Un père, une mère, qui se voyait arracher sa fille, allait la voir au parloir, tâchait de l’ébranler : on y pourvut ; les visites du père et de la mère furent prohibées jusqu’après l’abjuration[67]. Les filles ne pourront être forcées à voir leurs parents avant l’abjuration, dit l’arrêt : le tour est admirable. Quatorze ans pour les garçons, douze ans pour les filles, c’était bien tard. L’autorité d’un père et d’une mère avait une grande latitude pour s’exercer pendant ces douze ans. L’édit du 17 juin 1681 fixa la limite à sept ans. « Venions et nous plaît que nos sujets de la religion prétendue réformée tant mâles que femelles, ayant atteint l’âge de sept ans, puissent et qu’il leur soit loisible d’embrasser la religion catholique, apostolique et romaine, et qu’à cet effet, ils soient reçus à faire abjuration de la religion prétendue réformée, sans que leurs père et mère et autres parents y puissent donner le moindre empêchement, sous quelque prétexte que ce soit, » Ces enfants de sept ans, une fois convertis, rentreront-ils dans leur famille, et les exposera-t-on aux mauvais conseils que leurs pères pourraient leur donner ? « Il sera à leur choix, après leur conversion, dit la déclaration, de retourner en la maison de leurs père et mère, pour y être nourris et entretenus, ou de se retirer ailleurs, et leur demander pour cet effet une pension conforme à leurs conditions et facultés, laquelle pension lesdits pères et mères seront tenus de payer à leurs enfants de quartier en quartier ; et en cas de refus, voulons qu’ils y soient contraints par toutes voies dues et raisonnables. » Que si les familles, plutôt que de souffrir l’apostasie de leurs enfants âgés de sept ans, les font élever et nourrir à l’étranger, la déclaration leur impose de telles amendes qu’elles équivalent à la confiscation de leurs biens, si elles en ont, ou à l’impossibilité de subsister, si elles sont pauvres. Le parlement de Rouen poussa plus loin ; il prit le mal dans sa racine, et autorisa par arrêt les sages-femmes catholiques à ondoyer les enfants des religionnaires[68].

Le roi se montra surtout inexorable envers la mort. Il n’allait pas jusqu’à autoriser le curé à pénétrer de force auprès du malade. Le curé prenait avec lui un magistrat ; le magistrat entrait seul dans la chambre, et demandait au malade s’il refusait les secours du prêtre. Il fallait que le moribond répondit de sa propre bouche[69]. Plus tard, l’intervention du magistrat devint obligatoire, avec ou sans réquisition du curé[70]. N’y a-t-il pas de juge ordinaire dans la localité ? Le syndic ou marguillier de paroisse le remplacera[71]. C’était bien pis si le malade était indigent ou se faisait porter à l’hôpital. L’aumônier s’en emparait aussitôt. Les protestants riches, pour épargner cette douleur à leurs pauvres, les recevaient chez eux dans leur dernière maladie. Un arrêt du conseil défendit, sous des peines sévères, d’exercer ainsi la charité. Si le pauvre n’a pas d’asile, il devra mourir à l’hôpital[72]. Le cadavre d’un protestant mort ne pourra être exposé devant la porte[73] ; trente personnes seulement accompagneront le convoi[74] ; l’enterrement aura lieu au point du jour, ou après le coucher du soleil[75]. S’il s’agit d’un condamné, le ministre l’exhortera à voix basse[76]. Quant aux relaps, le roi déclare qu’il ne leur doit rien, puisqu’ils ont renoncé volontairement au bénéfice de l’édit de Nantes. Il enjoint, par une déclaration d’avril 1663, de les punir selon la rigueur des ordonnances ; puis, le 20 juin 1665, il prononce contre eux la peine du bannissement. Le 2 avril 1666, il les soustrait à la juridiction de la Chambre de l’édit, et les met sous la main des juges ordinaires. Le 13 mars 1679, il ajoute au bannissement perpétuel la peine de l’amende honorable. Un édit de juin 1680, prononce cette double peine, aggravée par la confiscation des biens, contre tout catholique qui se convertira au protestantisme. Le ministre qui recevait l’abjuration était condamné à l’amende honorable et au bannissement[77]. En 1686, on fit traîner sur la claie les cadavres des protestants qui, après avoir abjuré, refusaient en mourant les sacrements de l’Église[78].

Il y avait pourtant des relaps et des conversions au protestantisme, malgré l’atrocité des supplices. Il fut décidé qu’on remettrait aux ministres la liste des nouveaux convertis, et qu’ils seraient chargés eux-mêmes de les expulser des temples, s’ils tentaient d’y revenir[79]. Un ministre permettait-il à un apostat repentant d’entrer furtivement dans un prêche ? Le ministre était interdit, le temple rasé. Au contraire, les catholiques avaient le droit d’entrer dans les temples pendant les offices, pour voir quelles personnes y venaient, quel langage on y tenait[80]. On fuyait, on quittait la patrie pour la foi. Mais la fuite même devint un crime. Les ouvriers furent menacés des galères[81] ; les chefs de famille encoururent la confiscation de corps et de biens. Les ventes d’immeubles faites moins d’un an avant le départ, furent déclarées nulles et frappées de confiscation[82]. Les dénonciateurs en eurent la moitié [83]. La délation devint un métier. Les legs faits aux pauvres protestants furent attribués aux hôpitaux les plus voisins. Les possesseurs des anciens legs furent tenus de les rapporter. On promit en échange que les hôpitaux ainsi enrichis, ne fermeraient pas leurs portes aux malades protestants[84].

En même temps, par un odieux contraste, on comblait les nouveaux convertis. On les exemptait pendant deux ans à partir de l’abjuration du logement des gens de guerre[85]. On leur accordait un répit de trois ans pour payer leurs dettes envers les catholiques[86]. Quant à leurs dettes envers les protestants, ils n’y étaient plus obligés depuis 1663 ; leur abjuration leur tenait lieu de quittance générale[87]. Le tiers du produit des économats[88] était consacré à faire de nouveaux catholiques à raison de six livres par tête et de quarante livres pour une famille nombreuse[89]. Ce trafic explique la rigueur et la fréquence des lois contre les relaps. Enfin Louvois qui, quoique ministre de la guerre, voulait attirer à lui les affaires de la religion, imagina de loger les dragons chez les protestants, jusqu’à ce qu’ils fussent ruinés ou convertis. C’est ce qu’on appela les missions bottées. Les protestants n’envisagèrent plus que la misère ou le martyre. Les dragons se croyaient tout permis, hors le meurtre. Ils s’étudiaient à trouver des tourments qui fussent douloureux sans être mortels, a Comme il y avait souvent dans une maison plusieurs personnes qu’il fallait faire veiller, on y logeait des compagnies entières, afin qu’il y eût assez de bourreaux pour suffire à tant de supplices… Les soldats faisaient aux femmes des indignités que la pudeur ne permet pas d’écrire… Les officiers n’étaient pas plus sages que leurs soldats. Ils crachaient au visage des femmes ; ils les faisaient coucher en leur présence sur des charbons allumés… C’était le plus fort de leur étude de trouver des supplices qui fussent douloureux sans être mortels[90]. » Il y avait à Bordeaux, au Château-Trompette, des prisons disposées en losange, où les victimes ne pouvaient ni s’asseoir, ni se coucher, ni se tenir debout. On y descendait les protestants avec des cordes, et on les remontait chaque jour pour leur donner le fouet, le bâton ou l’estrapade. Ils sortaient de là après quelques semaines, sans cheveux et sans dents. Les églises étaient pleines de malheureux qui, pour échapper à ces atrocités, feignaient de se convertir[91]. D’autres erraient par les chemins, sans asile, traqués comme des bêtes, ou parvenaient à s’expatrier sous des déguisements. Le roi enfin, pour porter le dernier coup, signa à Fontainebleau, le 22 octobre 1685, la révocation de l’édit de Nantes[92].

Louis XIV, en révoquant l’édit de Nantes, n’ordonna pas aux protestants de se faire catholiques ; il reconnaît lui-même dans l’édit révocatoire que l’abjuration ne peut être prescrite par une loi[93]. Il ne s’attribue que le droit de défendre l’exercice du culte[94], de chasser les ministres sous peine des galères[95], de faire baptiser les enfants[96], et de contraindre les nouveaux convertis à persévérer[97]. Il ne permet pas d’acheter la liberté de conscience au prix de l’exil. Les ministres seuls ont le choix entre l’exil, la conversion ou les galères ; les simples fidèles sont contraints de rester en France, et de renoncer au moins extérieurement à l’exercice de leur religion. Il fallut aussitôt prendre des mesures contre la dépopulation de la France. Dès le 5 novembre 1685, on prononça des peines terribles contre les officiers de navires et bateliers qui favorisaient l’émigration. Les femmes des nouveaux convertis et les veuves qui refusaient de se convertir furent privées de la disposition de leurs biens[98]. Le roi agit très-positivement comme représentant de Dieu, chargé de gouverner l’Église et de lui épargner au dehors les dangers et les scandales. Ses ministres, armés de nouvelles lois, ne connurent plus de bornes à leurs violences. Ils poursuivirent les protestants comme des bêtes fauves. On les ruina, on les emprisonna, on les jeta dans les galères, on leur arracha leurs enfants, on mit à mort leurs ministres, et enfin, quand le silence se fit après tant d’exécutions, on vint solennellement annoncer au roi que l’œuvre était faite, et qu’il n’y avait plus en France d’autre religion que la sienne[99].

Il le crut : il n’en était rien. Il avait à lutter contre deux passions plus fortes que toutes les tyrannies : l’amour de la patrie et la foi religieuse. Bientôt il fut évident que les prétendus convertis ne l’étaient qu’en apparence ; mais la fiction légale subsista, et, dès lors, la loi contre les relaps fut applicable à tout acte de protestantisme.

Je ne ferai pas le récit des scènes qui suivirent. Je ne montrerai pas les catholiques et les protestants égorgés tour à tour pendant la guerre des Cévennes. Ces ruisseaux de sang, quelle que soit la main qui les fait couler, crient au ciel contre le fanatisme. Je ne veux pas non plus montrer ces longues files de protestants enchaînés ensemble par le cou, et portant en outre des fers aux pieds et aux mains, exténués par les privations et la fatigue, accouplés à des voleurs et des assassins, à moitié expirant sous le bâton, et que l’on traînait à travers la France pour les attacher sur le banc des galériens à Toulon ou à Marseille. Ce fut, au dire de Saint-Simon, « une abomination générale enfantée par la flatterie et par la cruauté, qui mit nobles, riches, vieillards, gens souvent très-estimés pour leur piété, leur savoir, leur vertu, des gens aisés, faibles, délicats, à la rame, et sous le nerf très-effectif du comité, pour cause unique de religion. » Combien de ces innocents, de ces courageux, qui aimaient mieux souffrir que d’abjurer, moururent sur leur banc, après de longues années de martyre ! On voyait, selon l’expression d’un contemporain[100], « un prodigieux peuple proscrit, nu, fugitif, errant sans crime, cherchant asile loin de sa patrie. Tout retentissait des hurlements de ces malheureux. » Il suffisait, pour décréter de telles horreurs, de la volonté d’un intendant ou d’un commandant de province, car il n’y avait pas même de juge, pas de formalité, pas un semblant de procès. Quant aux enfants des réformés, objet constant de la sollicitude royale, émancipés d’abord à quatorze ans, puis à sept ans pour le fait de religion, l’édit de révocation supprimait définitivement tous les détails, et obligeait les parents à élever désormais les enfants qu’ils pourraient avoir, dans la religion catholique, apostolique et romaine[101]. Cela même ne parut pas suffisant. Ces enfants, catholiques par ordre du roi, ne pouvaient rester confiés à des parents hérétiques. Au mois de janvier 1686, un nouvel édit ordonna d’arracher à la puissance paternelle tous les enfants depuis l’âge de cinq ans jusqu’à l’âge de seize ans accomplis, de les faire élever par leurs parents catholiques, « s’ils en ont, dit le roi, qui veuillent bien s’en charger, » ou, à défaut de parents, de les mettre « sous le délai de huit jours, » dans les hôpitaux généraux les plus proches[102]. C’est ainsi qu’au nom de la religion, on outrageait la nature.

Louis XIV, en donnant ces ordres impitoyables, ne choquait pas les sentiments de la population catholique. On a dit que, devenu vieux, soumis à l’influence de madame de Maintenon, de Le Tellier et de la coterie qui fut désignée, pendant la régence, sous le nom de la vieille cour, il s’était laissé aller, par faiblesse autant que par fanatisme, à commettre des actes dont il ne connaissait pas toutes les conséquences. Il est certain que, ne voyant que par les yeux de ses ministres et de ses courtisans intimes, il ne fut informé ni du nombre des protestants, ni de l’énergie de leur résistance. Le sort d’un souverain absolu est de ne connaître ni son temps, ni son pays, et de vivre au milieu d’illusions soigneusement entretenues par ceux qui l’entourent. Mais si Louis XIV se trompa sur la situation des protestants, et s’il ignora les excès de cruauté ordonnés par ses ministres, le sentiment qui le poussait à imposer l’unité de croyance, et à traiter comme un crime d’État les révoltes de la raison et de la conscience, était partagé par un très-grand nombre de ses sujets, non-seulement à la cour et dans le clergé, mais dans le peuple. Il restait encore au tond des âmes une partie de ces haines de religion qui, cent ans auparavant, avaient produit la Saint-Barthélemy. En septembre 1682, un protestant, garçon de cabaret dans le faubourg Saint-Marcel, est blessé à mort dans une rixe. Le vicaire de Saint-Médard, accouru sur-le-champ, ne peut le décider à se confesser. Le bruit en court, un rassemblement se forme. « Ils firent toutes les violences qu’on se peut imaginer, dit un rapport de police cité par M. P. Clément dans son livre de la Police sous Louis XIV[103] ; ils frappèrent à coups de pierres, bâtons et règles contre les portes, qu’ils rompirent à quelques endroits, cassèrent toutes les vitres et s’efforcèrent d’entrer dans la maison, s’écriant : « Ce sont des huguenots et parpaillots qu’il faut assommer, même mettre le feu aux portes, s’ils ne nous « rendent le blessé. » En 1695, un protestant qui s’était découvert en voyant passer une procession, mais avait refusé de se mettre à genoux, occasionna une émeute. « Les fourbisseurs ont marché par les rues avec des enseignes et l’épée nue. Le menu peuple du quartier Montmartre est sans raison, et ce sera un très-grand bonheur si le reste du jour se passe sans désordre[104]. » Ce sont des exemples pris dans un grand nombre ; et malheureusement, ce n’était pas seulement le menu peuple qui avait la tête troublée par le fanatisme : tous les poètes, tous les historiens, tous les prédicateurs chantaient les louanges de Louis XIV[105]. La ville de Paris lui érigea une statue avec cette inscription : Ludovico Magno, victori perpetuo, ecclesiæ ac regum dignitatis assertori. On frappa des médailles avec cette légende : Religio victrix, et cet exergue : Templis calvinianorum eversis 1685. Madame de Sévigné écrivit à sa fille : « Vous aurez vu sans doute l’édit par lequel le roi révoque celui de Nantes. Rien n’est si beau que ce qu’il contient, et jamais aucun roi n’a fait et ne fera rien de si mémorable. » Arnaud, le janséniste, le chef d’une secte persécutée, déclara « qu’on avait employé des moyens un peu violents, mais nullement injustes. » L’enthousiasme des évêques n’eut pas de bornes. Massillon, Fléchier se répandaient en louanges, et Bossuet s’écriait, du haut de la chaire sacrée : « Touchés de tant de merveilles, épanchons nos cœurs sur la piété de Louis. Poussons jusqu’au ciel nos acclamations, et disons à ce nouveau Constantin, à ce nouveau Théodose, à ce nouveau Marcien, à ce nouveau Charlemagne, ce que les six cent trente Pères dirent autrefois dans le concile de Chalcédoine : Vous avez affermi la foi, vous avez exterminé les hérétiques ; c’est le digne ouvrage de votre règne, c’en est le propre caractère. Par vous, l’hérésie n’est plus. Dieu seul a pu faire cette merveille. Roi du ciel, conservez le roi de la terre : c’est le vœu des Églises, c’est le vœu des évêques[106]. »



  1. Rodrigo de Valer avait, le premier, prêché la réformation à Séville. Après lui le docteur Égidius, Constantin Ponce et Vargas, et, plus tard, Lozada, un médecin, Cassiodoro, un moine, répandirent son enseignement dans l’Andalousie. Francisco Enzinas, connu dans les lettres sous le nom de Dryander, et dont le frère avait péri à Rome sur le bûcher, traduisit la Bible en espagnol. San-Roman, l’ami des frères Enzinas, mourut dans les flammes à Valladolid, laissant après lui une Église évangélique fondée, dont le premier pasteur fut un moine dominicain, Domingo de Roxas, second fils du marquis de Posa. Cazalla, don Carlos de Seso, furent ses auxiliaires. La foi évangélique eut des adhérents dans la Nouvelle-Castille et dans les royaumes de Murcie, de Grenade et de Valence. Les Aragonais, plus indépendants que le reste de l’Espagne, et plus voisins du Béarn, gouverné par des princes prolestants, embrassèrent en grand nombre la religion nouvelle. « Si l’inquisition n’y avait pris garde, dit son historien Paramo, la religion protestante aurait couru à travers toute la Péninsule comme un feu follet. » — « Tels étaient, dit Illescas, le nombre, le rang et l’importance des coupables que, si le remède avait été différé de deux ou trois mois seulement, toute l’Espagne aurait été en feu. » Voyez les articles de M. Rossew-Saint-Hilaire, dans la Revue chrétienne du 15 janvier, du 15 février et du 15 mars 1857.
  2. « Il faut couper court au mal, écrivait Charles-Quint. Il faut que les coupables, quel que soit leur rang, soient punis avec l’éclat et la vigueur qu’exige la nature de la faute.… Sans la certitude que j’ai que vous et les membres du conseil extirperez le mal jusqu’à sa racine, je ne sais si je ne me résignerais pas à sortir d’ici pour y remédier moi-même.… »
  3. L’inquisition se prépara en silence. Le même jour, à Séville, à Valladolid, partout où l’hérésie s’était glissée, tous les suspects furent saisis en même temps. Dans Séville seule, il y eut huit cents arrestations dans la même journée… Le premier auto-da-fé eut lieu le 21 mai 1553. Il n’y avait que trente victimes, et quatorze seulement furent jetées aux flammes. On apporta dans un coffre les os de la mère des Cazalla, que l’inquisition avait fait exhumer, et qui furent réduits en cendres. Le second auto-da-fé eut lieu le 8 octobre 1559, à Valladolid, en présence de Philippe II. Le sombre roi, qui devait, dix ans après, signer l’arrêt de mort de son propre fils, ne laissa reposer les bourreaux que quand il ne leur resta plus dans l’étendue des Espagnes une proie à saisir. (Voy. M. Rossew-Saint-Hilaire, loc. laud.)
  4. 8 juillet 1643. Cf. l’arrêt du conseil du 30 janvier 1615. — Autre, du 21 mai 1652. Déclaration du 18 juillet 1656.
  5. 6 novembre 1656. 5 janvier 1683.
  6. 24 novembre 1681.
  7. Déclaration du 21 août 1684.
  8. Arrêt du conseil, 9 février 1672.
  9. Arrêt du 11 janvier 1657.
  10. Arrêt du conseil, 24 mars 1661.
  11. 30 juin 1664.
  12. 17 mai 1683. 30 avril 1685.
  13. Déclaration de décembre 1656, Arrêt du conseil du 11 janvier 1657. Autre, 6 novembre 1674.
  14. Édit d’août 1684.
  15. Arrêt du 8 janvier 4685.
  16. Arrêt du 6 mai 1669.
  17. Arrêt du 17 mars 1664.
  18. Règlement du 2 avril 1666, art. 24.
  19. Ib. art. 33.
  20. 31 juillet 1679.
  21. Règlement de 1666, art. 35.
  22. Ib. art. 34.
  23. Divers arrêts et déclarations, notamment la décl. du 4 septembre 1684, l’arrêt du 5 février 1685.
  24. Déclaration du 5 juillet 1685.
  25. Arrêt du 9 juillet 1635.
  26. 25 octobre 1685.
  27. Règlement de 1666, art. 5.
  28. Ib., art. 7. Cf. Arrêt du Conseil, 9 novembre 1670.
  29. Ib., art. 12, 14, 15, 18, 20. Cf. la Déclaration du 10 octobre 1679.
  30. Ib., art. 13, 14, 16, 17, 18.
  31. Ib., art. 16.
  32. Règlement de 1666, art. 26, 58. Cf. un édit de Juillet 1679, une déclaration du 10 avril 1681.
  33. Ib., art. 27.
  34. Juillet 1679.
  35. Déclaration du 20 janvier 1685.
  36. Règlement de 1666, art. 29 et 30.
  37. Ib., art. 36.
  38. Ib., art. 59. Cf. l’arrêt du Conseil du 9 juillet 1686.
  39. Arrêt du parlement, 16 juillet 1669.
  40. Arrêt du Conseil, 9 mars 1682.
  41. Arrêt du 22 janvier 1685. Autre, du 15 septembre 1685.
  42. Déclaration du 6 août 1685.
  43. 9 juillet 1685.
  44. Règlement de 1666, art. 53.
  45. Déclaration du 15 juin 1682, préambule.
  46. 4 mars 1683. Arrêt du Conseil, 19 janvier 1684. Même les marchands suivant la cour furent contraints de vendre leur privilège. 9 janvier 1685.
  47. Arrêt du Conseil. 6 novembre 1679.
  48. Déclaration du 15 juin 1632.
  49. Arrêt du Conseil, 17 août 1680.
  50. Déclaration du 21 août 1684.
  51. 23 août 1680. 23 septembre 1682.
  52. Arrêt du Conseil, 18 avril 1683. — 28 juin 1681. — Déclaration du 15 juin 1682.
  53. Arrêt du 3 décembre 1674.
  54. éclaration du 11 juillet 1685.
  55. Défense à tous juges, avocats, notaires, procureurs, huissiers et praticiens, de se servir de clercs religionnaires, 10 juillet 1685.
  56. Règlement du 2 avril 1666. Art. 41. Dans la suite, tous les mariages mixtes furent prohibés. Une déclaration du 18 juin 1685 porte que les temples où de pareils mariages auront été célébrés, seront rasés.
  57. Mars 1663.
  58. Règlement de 1666, art. 45.
  59. Ib., art. 60.
  60. Déclaration du 31 janvier 1682. Il fut défendu de nommer des tuteurs protestants. Déclaration du 4 août 1685. Autre du 14 août.
  61. Édit de novembre 1680.
  62. Déclaration du 20 février 1680.
  63. Règlement de 1666, art. 46. Arrêt du Conseil, 11 janvier 1683.
  64. Arrêt du Conseil, 4 décembre 1671.
  65. Déclaration du 9 novembre 1670.
  66. 24 octobre 1665.
  67. 28 août 1676.
  68. 22 avril 1681.
  69. Arrêt du Conseil, 12 mai 1663.
  70. Déclaration du 19 novembre 1680.
  71. 7 avril 1681. Cf. 20 juin 1681.
  72. Arrêt du 4 septembre 1684.
  73. Règlement de 1666, art. 23.
  74. Règlement de 1666, art. 24. On était plus rigoureux pour les noces et baptêmes ; les assistants ne pouvaient être qu’au nombre de douze, y compris les parents. Arrêt du Conseil du 9 novembre 1670.
  75. Arrêt du Conseil, 7 août 1662. Cf. l’art. 22 de la déclaration du 1er février 1669. Cette déclaration, arrachée par les prières des protestants, atténue sur quelques points les dispositions du règlement de 1666, et sur quelques points les aggrave.
  76. Règlement de 1666, art. 4.
  77. Édit de mars 1683.
  78. Déclaration du 29 avril 1086.
  79. Arrêt du Conseil, 17 juin 1682.
  80. Déclaration, 22 mai 1683.
  81. Déclaration du 18 mai 1682.
  82. Déclaration du 14 juillet 1682.
  83. 20 août 1685.
  84. Déclaration du 15 janvier 1683.
  85. Ordonnance du 11 avril 1681.
  86. 18 novembre 1680.
  87. Arrêt du Conseil, 11 janvier 1663.
  88. Le temporel des évêchés appartenait au roi pendant la vacance du siège, et était régi par un économe. Les économats formaient une branche importante du revenu de la couronne.
  89. Cf. Rulhières, Éclaircissements historiques sur l’Édit de Nantes.
  90. Benoît, Histoire de l’Édit de Nantes, l. XII, t. V, p. 833 sq.
  91. On mettait des inspecteurs à la porte des églises pour connaître ceux des nouveaux convertis qui les fréquentaient ou non. L’instruction du 8 décembre 1686 porte que cette mesure n’a pas produit de bons résultats et qu’on y renonce.
  92. Voyez, sur toute cette persécution, l’Histoire des réfugiés protestants de France, depuis la révocation de l’Édit de Nantes, par M. Charles Weiss, t. I, chap. II et III.
  93. Art. 12.
  94. Art. 2 et 3. On fut jusqu’à prévoir le cas où les protestants s’embarqueraient pour chercher sur les flots la liberté d’adorer Dieu suivant leur conscience. Un règlement du 25 octobre 1685 défend de laisser faire à bord l’exercice de la religion prétendue réformée, à peine de cassation contre les capitaines des vaisseaux de guerre, et des galères contre les capitaines des vaisseaux marchands.
  95. Art. 4. Il assure plusieurs avantages aux ministres convertis, entre autres la dispense des trois années d’étude pour ceux qui voudraient se faire avocats.
  96. Art. 8.
  97. Art. 11.
  98. 5 janvier 1686.
  99. Une déclaration du 8 mars 1715 apprit à la France, au nom du roi, que l’hérésie était extirpée. Cf. la Déclaration du 14 mai 1724, où l’on affirme de nouveau qu’il n’y a plus de protestants. Voici les principales mesures édictées par cette Déclaration : les prédicants punis de mort, les enfants baptisés et élevés dans la religion catholique, les médecins tenus d’appeler les prêtres au chevet des mourants.
  100. Saint-Simon, Mémoires, chap. CDXIII.
  101. Art. 8.
  102. « Ayant ordonné par notre édit donné à Fontainebleau le mois d’ octobre dernier, que les enfants qui naîtront de nos sujets qui font profession de la religion prétendue réformée seraient élevés dans la religion catholique, apostolique et romaine, nous estimons à présent nécessaire de procurer avec la même application le salut de ceux qui étaient nés avant cette loi, et de suppléer de cette sorte au défaut de leurs parents, qui, se trouvant encore malheureusement engagés dans l’hérésie, ne pourraient faire qu’un mauvais usage de l’autorité que la nature leur donne pour l’éducation de leurs enfants ; à ces causes, voulons et ordonnons que, sous huit jours après la publication de notre présent édit, tous les enfants de nos sujets qui font encore profession de ladite religion réformée, depuis l’âge de cinq ans jusqu’à l’âge de seize ans accomplis, soient mis, à la diligence de nos procureurs et de ceux de nos sujets ayant haute justice, entre les mains de leurs aïeuls, oncles ou autres parents catholiques, s’ils en ont qui veulent bien s’en charger, pour être élevés dans leur maison ou ailleurs, par leurs soins, dans la religion catholique, apostolique et romaine… Voulons qu’en cas que ces enfants n’aient point d’aïeuls ou autres parents catholiques, ou que leurs pères et mères aient des raisons légitimes pour empêcher que l’éducation de leurs enfants ne leur soit confiée, ils soient mis entre les mains de telles personnes catholiques qui seront nommées par ces juges, pour être élevés ainsi qu’il est ci-dessus expliqué. Ordonnons que les pères et mères de ladite religion prétendue réformée payeront à leurs enfants une pension telle qu’elle sera réglée par les juges des lieux, eu égard à leurs biens et au nombre de leurs enfants. Voulons que les enfants de l’âge ci-dessus marqué auxquels les pères et mères ne seraient pas en état de payer les pensions nécessaires pour les faire élever et instruire hors de leur maison, seront mis, dans le même temps de huit jours, à la diligence de nos procureurs et de ceux des seigneurs ayant haute justice, dans les hôpitaux généraux les plus proches de leurs pères ou de leurs mères, pour être élevés ou instruits par les soins des administrateurs desdits hôpitaux en des métiers convenables à leur état. »
  103. La Police sous Louis XIV, par M. P.  Clément, in-8. Paris, 1866, p. 270 sq.
  104. Depping, Corresp. administr., II, 670. M. P.  Clément, II.
  105. Le 25 août 1687, le corps des marchands de la ville de Poitiers inaugura une statue de Louis XIV, dont l’inscription portait cette date : Anno reparatæ in Gallia catholicæ religionis secundo. Le même jour, le P. Chesnon, jésuite, prêcha dans la cathédrale, devant l’intendant et les autres autorités. « Il y prononça un fort beau panégyrique du roy. Il commença d’abord par expliquer la différence qui existe entre le culte qu’on rend à Dieu et celui qu’on rend aux souverains de la terre ; et il fit connoître à tout le monde que si Louis le Grand ne possède pas ces perfections infinies qui ne conviennent qu’à Dieu seul, il a pourtant reçu toutes celles qui en approchent davantage, et qui le rendent sur la terre l’image la plus sensible de la Divinité. Ensuite il fist voir qu’il seroit à souhaiter que toutes les villes du Poitou pussent lui élever des statues, en reconnoissance des grâces que la province reçoit de Sa Majesté, et surtout du rétablissement de la religion. » (Extrait des mémoires manuscrits de Foucault, l’intendant de Poitiers, publié par M. [{{{1}}}]. Clément, le Gouvernement de Louis XIV, p. 249 sq.
  106. Bossuet, Oraison funèbre de Le Tellier. — Cf. ces paroles de Bossuet, dans l’Histoire des variations, liv. X, § 55 : « Les protestants et les catholiques sont d’accord sur la question de savoir si les princes chrétiens sont en droit de se servir du glaive contre leurs sujets ennemis de l’Église et de la saine doctrine. » — Voyez encore sa lettre à M. de Basville, du 12 novembre 1700, sur cette question : Si l’on peut contraindre les protestants d’assister à la messe. « Je déclare que je suis et que j’ai toujours été du sentiment, premièrement, que les princes peuvent contraindre par des lois pénales tous les hérétiques à se conformer à la profession et aux pratiques de l’Église catholique ; deuxièmement, que cette doctrine doit passer pour constante dans l’Église, qui non-seulement a suivi, mais encore demandé de semblables ordonnances des princes… Voici donc ce que je crois être la règle certaine de l’Église, Premièrement, que l’on peut user de lois pénales plus ou moins rigoureuses, selon la prudence, contre les hérétiques ; deuxièmement, que ces peines étant décernées par l’autorité des princes, l’Église reçoit à sa communion tous ceux qui y viennent du dehors, quand elle peut présumer qu’ils y viennent de bonne foi, et que la vexation qui les a rendus plus attentifs les a aussi éclairés ; troisièmement, qu’on ne peut présumer de la bonne foi que quand ils se soumettent également à tout l’exercice de la religion catholique. »