Coups de clairon/France héroïque (La)

Coups de Clairon : Chants et Poèmes héroïques
Georges Ondet, Éditeur (p. 301-306).


La France héroïque














Dédié aux Découragés et aux Pessimistes.


LA FRANCE HÉROÏQUE


On dit qu’un Vent d’indifférence
Ayant soufflé sur notre France,
En nous on ne retrouve plus
Des Héros des premières Gaules,
Des Franks aux robustes épaules,
Aucune des mâles vertus !…

S’il est vrai que la France tombe,
Ô grands Morts ! sortez de la tombe
Vous, les braves, vous, les ardents :
Ah ! secouez notre égoïsme !
Qu’un rayon de votre Héroïsme
Vienne embraser vos descendants !

Debout ! dressez vos hautes tailles,
Compagnons des rudes batailles
De Charlemagne et de Clovis !
Roland, souffle en ton cor d’ivoire !
Debout, Croisés couverts de Gloire
Aux côtés du bon Saint Louis !

Debout ! grands Rois et grandes Reines !
Debout ! tous les fiers capitaines :
Les Bayard et les Duguesclin !
Debout surtout, Toi, la Chérie,
Jeanne, qui sauvas ta Patrie
Quand elle était à son déclin !


Debout, Jean-Bart ! Debout, Duquesne,
Condé, Luxembourg et Turenne,
Catinat, Tourville et Forbin !
Debout, Bretons au cœur de chêne :
Cartier, Bisson, Cornic-Duchesne,
Et Surcouf, et Duguay-Trouin !


Debout, les gâs de Sambre-et-Meuse !
Tous ceux de l’Époque fameuse :
Masséna, Kléber et Marceau !
Levez-vous, héros du Mexique,
De la Crimée et de l’Afrique :
Surgissez, d’Aumale et Bugeaud !

Vous aussi, soyez de la Fête
Mornes héros de la Défaite,
Vaincus plus grands que vos vainqueurs !
Debout, tous !!! renversez vos pierres :
Mettez vos yeux sous nos paupières
Et mettez vos cœurs dans nos cœurs !

Hélas ! quand, d’en bas, l’on contemple
Ceux qui sont, là-haut, dans le Temple,
Si loin de la Réalité,
Il paraît bien que, dans notre âge,
Nul ne peut avoir leur courage,
Ni leur force, ni leur fierté ;

Car, ces temps-ci, des pessimistes
Ont décrété, graves et tristes,
Que nous n’avions plus, à leurs yeux,

Des âmes assez bien trempées
Pour revivre les Épopées
De nos héroïques Aïeux…

… Cependant, quoiqu’on dise et fasse,
Nous sommes toujours de la Race
De l’énergie et de l’orgueil :
Nos pilotes, les soirs d’orage,
Quand « Noroît » mugit et fait rage,
S’en vont toujours braver l’Écueil ;

Quand retentit le ban de guerre
Les Français, si vaillants naguère,
Ne semblent nullement changés,
Et nos fiers marins de la côte
S’en vont toujours, la tête haute,
Affronter les mêmes dangers :

C’est Deloncle, brave et stoïque,
Sombrant sur son Transatlantique
Avec tout son état-major ;
Et c’est Mauduit sur la Framée ;
C’est Paul Henry, l’âme enflammée,
S’élançant, gaîment, à la mort !

Il nous reste nos Missionnaires,
Nos mystérieux Légionnaires
Et nos vaillants petits « Marsouins »
Qui, pour nous gagner d’autres France,
Bravent, avec insouciance,
Les mortels soleils africains !


Des Héros ? J’en vois par centaine :
C’est Courbet, Négrier, Duchesne,
Bobillot le petit sergent,
Mizon, Monteil, Flatters, Rivière,
Et ces martyrs de l’Angleterre :
Villebois-Mareuil et Marchand !

Allez, marchez ! l’Âme Française
Vibre encor, ne vous en déplaise,
Fait et fera des hommes forts
Si nombreux, de si bonne marque,
Qu’un jour il faudra dix Plutarque
Pour chanter nos illustres Morts !