Correspondance de Voltaire/1732/Lettre 246

Correspondance de Voltaire/1732
Correspondance : année 1732GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 249-250).
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246. — À M. DE MONCRIF.
Mars.

Mon cher Valérius, que votre consulat[1] ne vous fasse pas oublier Argos. J’ai besoin plus que jamais d’être approuvé et protégé par votre charmant maître. Je ne veux pas qu’un ouvrage, qui sera honoré de son nom, soit médiocre ; j’y travaille jour et nuit, et peut-être l’envie de lui plaire sera devenue talent chez moi.

S’il daignait envoyer chercher la troupe comique encore une fois, et lui recommander Ériphyle, ce serait une bonne action digne de lui. J’ai abandonné cette pièce aux comédiens, quant au profit ; mais pour la gloire, nous autres poètes ne sommes pas si généreux. Mon intérêt véritable, qui est celui de ma réputation, le droit que j’ai de faire continuer la pièce après Pâques, et surtout la protection dont m’honore monseigneur le comte de Clermont, me font espérer que les comédiens ne refuseront pas de jouer la pièce. Je sais bien qu’après les manières honnêtes et généreuses que j’ai eues avec eux ils auront envie de me nuire, attendu l’esprit de corps ; mais j’attends tout des bontés de Son Altesse sérénissime et de votre amitié.

  1. Le rôle de Valérius Publicola, dans Brutus, que M. de Moncrif jouait en société.