Cham - Albums du Charivari/La chronique du jour

Journal le charivari (3p. 229--).

LA
CHRONIQUE DU JOUR



ALBUM
DE

SOIXANTE CARICATURES

PAR

CHAM
CHAM





PARIS
ARNAULD DE VRESSE, ÉDITEUR
55, RUE DE RIVOLI, 55


Clichy. — Imp. Maurice Loignon et Cie, rue du Bac-d’Asnières, 12.
CONSÉQUENCE DE LA BOUCHERIE CHEVALINE.

— Le bœuf de monsieur est à sa voiture et son cheval est sur la table.

— J’ai pas été contente de votre dernier gigot de cheval !

— Bah ! il était peut-être dur comme du bœuf.

— Comment, mon brave, vous vous présentez pour être cuisinier chez moi ?

— Dame ! on mange du cheval et j’ai fait la campagne de Russie. J’en sais plus long que les autres sur c’te cuisine-là.

— Françoise, comment m’avez-vous arrangé cette viande ?

— Mais, madame, à la Daumont.

Les jockeys trouvant leur utilité dans la cuisine de cheval pour les pièces montées.

— Bonjour, boucher.

— Écuyer, je vous prie, écuyer !

— Pas possible, Françoise. Toute cette viande de cheval que j’avais achetée hier est déjà mangée ?

— C’était un cheval de course. Rien ne va plus vite !

— Mademoiselle Françoise, je vois avec peine que vos maîtres y mangent du cheval. Vous concevez, moi qui suis fantassin, j’ai z’horreur de la cavalerie.

— Gagnez-vous ?

— Mais oui, nous distançons les autres boucheries de plusieurs longueurs de biftecks. Nous avons eu aujourd’hui un assez bon départ.

— Pas besoin d’abattoir pour la nouvelle boucherie, le pavé en bois peut suffire.

Les armes d’Angleterre n’ayant plus qu’un support, la licorne se trouvant atteinte de la maladie des bêtes à corne.

— Docteur, mon bœuf a-t-il la maladie ? voyez sa langue !

— Mon ami, je ne pourrai vous dire que demain si sa langue est bonne, vous me l’enverrez à l’heure de mon déjeuner.

— Françoise, il est bien cher, ce morceau de bœuf ?

— Monsieur, c’était un bœuf excellent. Le boucher y tenait à cause de ça. Il a appelé les plus fameux médecins qui n’ont pas pu le sauver !

— Comment, c’est là le morceau de bœuf que vous avez acheté pour diner ?

— Madame, la maladie attaquant les cornes, j’ai pensé qu’elle n’aurait pas encore eu le temps d’arriver à ce morceau-là !

— Réjouissons-nous, chère amie. Si nos bestiaux avaient la maladie, leur gaité aurait disparu ! Faut-il que nous ayons de la chance !

— Qué qu’ça vous fait, la bourgeoise, donnez-m’en un puisque vous en avez deux ! j’ai si froid aux doigts !

— Les domestiques n’ayant plus à craindre le froid aux doigts en suivant leurs maîtresses à la promenade.

— Ma chère amie, je t’ai menée voir la Famille Benoîton pour que cela te serve de leçon.

— Oui, mon ami, je veux qu’elle me profite, tu vas m’acheter une robe comme celle de Mme Manvoy.

— Sept mille francs au moins ! Quelle leçon lui ai-je donnée là !

— Comment ! c’est vous, chère madame, sous ce costume ?

— Hélas oui ! On crie tellement contre le luxe des femmes que je m’habille en homme quand je veux faire un peu de dépense.

— C’est la pièce que vous venez me proposer pour mon théâtre ?

— Mais oui, elle a parfaitement réussi au Vaudeville.

— Cette pauvre Amanda qui s’est ruinée !

— Bah ! elle se sera trompée ! elle s’est prise pour un autre.

— Tiens ! les femmes qui portent des tricornes ! parait que deux ça ne suffit plus dans le ménage.

L’administration s’arrangeant de façon à ce que les membres du Cercle des pêcheurs à la ligne aient toujours les pieds dans l’eau, afin que rien ne soit changé à leurs habitudes.

— M. Beaubrochet ? Il m’a donné rendez-vous à son cercle.

— Monsieur m’a chargé de vous dire que vous le trouveriez au bord de la rivière, à partir du Pont-Royal jusqu’au pont de Saint-Cloud.

— Quelle horreur ! une décoration qui remue à ta boutonnière !

— Ma chère, c’est un asticot, le signe distinctif des membres du club des pêcheurs à la ligne.

— Depuis que je suis ici, je sens un fourmillement partout, comme des choses qui me courent dans le dos ?

— Monsieur, c’est un membre du cercle qui a laissé échapper tous ses asticots dans les salons.

Le cercle des pêcheurs à la ligne donnant lieu à des plaintes dans le quartier.
Le club des patineurs faisant les affaires du club des pêcheurs à la ligne empêchés jusque-là par l’épaisseur de la glace.
Manière de s’appeler les uns les autres entre membres du club des pêcheurs à la ligne.

— Allons ouvrir, voilà un membre du cercle qui sonne.

— Pas besoin de nous presser : rien n’est patient comme un pêcheur à la ligne. Nous lui ouvrirons dans une demi-heure.

— Qu’est-ce que tu attends pour commander le diner ?

— J’attends que les huîtres diminuent. J’ai envie d’en manger.

Les pauvres pèlerins n’ayant plus de coquilles d’huîtres pour leur costume, ce mollusque étant aujourd’hui trop-cher pour qu’on puisse en manger.

— Très-riche, ma chère !

— Bah ?

— À souper, il a demandé des huîtres.

— Encore vous, madame ? Quel souper faut-il servir ?

— Toujours la même chose, il n’y a de changé que le monsieur.

— Où en es-tu ?

— Elle veut que je la mène chez Brébant.

— Ah ! diable ! elle en fait une question de cabinet.

— Cher monsieur, prêtez-moi dix sous pour mon châle qui est au vestiaire ?

— Je n’ai qu’un billet de cent francs.

— Ça ne fait rien, je vous rendrai les dix sous et je garderai le reste.

— Ah ! ben, merci ! si on élève des statues à ces femmes-là, les sculpteurs ne sont pas près de manquer d’ouvrage !

— Madame Putiphar, je l’eusse préférée en peinture !

— Allons donc ! la statuaire valait mieux, une fille de marbre.

Les actionnaires du télégraphe transatlantique opérant un nouveau versement de capitaux… à fonds perdus.

— Madame, une place pour Henriette Maréchal.

— On ne la joue plus.

— Sapristi !… Alors où pourrais-je bien aller siffler ?

Après l’abolition du monopole y aura-t-il assez d’ouvrage pour tous les cochers ? Ne craignez rien, ils sauront bien dégoûter les gens de la manie d’aller à pied.
Abolition du monopole. Voiture à 4 sous et au-dessous.
ABOLITION DU MONOPOLE DES VOITURES DE PLACE.

— Vend des légumes et prend des voyageurs.

— Quel dommage que les femmes ne prennent point part aux conférences littéraires ! Elles bavarderaient à la salle Valentino au lieu de bavarder chez elles. Les pauvres maris seraient un peu soulagés !

— Je voudrais du tabac en poudre.

— De chasse ou à priser ? Nous tenons aujourd’hui les deux.

— Ah diable ! je ne prise plus, alors ! Je n’aurais qu’à me faire sauter le nez !

— Allons, bon, l’administration des tabacs a fusionné avec celle des poudres. Ils ont mis du tabac dans mes cartouches et de la poudre dans ma tabatière. Je fais éternuer les lapins.

Le vaccinateur à la vache engageant les personnes craintives à le faire venir chez elles comme un sûr moyen d’être tranquilles.

— Monsieur, les médecins ont accaparé toutes les vaches pour le vaccin ; chaque fois que monsieur voudra du lait, faudra que je me fasse vacciner. Ça ne coûte que vingt francs !

— C’est une horreur, je vous commande mon buste et vous me faites en théière.

— Madame, on applique maintenant l’art à l’industrie.

— Il est diablement vert, votre paysage.

— C’est pour faire de l’art appliqué à l’industrie. C’est un tableau et en même temps un plat à épinards.

M. Sainte-Beuve n’ayant pas voulu, en homme d’esprit, changer les habitudes de M. Courbet qui s’est chargé de peindre son portrait.
Ne voulant pas rester l’obligé de M. Courbet, M. Sainte-Beuve lui fait cadeau d’un cheval comme il les aime.
Ce pauvre soleil ne pouvant plus se coucher depuis qu’on le force à paraître le soir.

— Changez-moi ce numéro, il n’est pas propre !

— Mais, monsieur, c’est ce qui le distingue des autres journaux, le soleil a des taches.

L’éléphant du Jardin des Plantes se rendant sur les bords de la Tamise.
Arrivé sur les bords de la Tamise, l’éléphant du Jardin des Plantes refuse ses lettres de naturalisation comme Anglais.

— Je monte trop souvent sur votre vaisseau de l’Africaine. J’étais un chanteur à roulades et vous faites de moi un chanteur à roulis.

— Donnez-moi un autre numéro de l’Événement, celui-ci est déchiré.

— Mais monsieur, ce n’est pas de notre faute, ils mettent trop de nouvelles dans ce journal. Ça fait crever le papier.

Le congrès des médecins réclamant une vitrine à l’exposition de 1867 afin que les plus beaux cas de maladies du globe y soient dignement représentés.
1868. — Les malades se réunissent en congrès afin de résister au congrès des médecins projeté pour 1867.