Annales religieuses de la ville de Comines/Introduction

César-Henri Derveaux 
Annales religieuses de la ville de Comines (Annales religieuses de la ville de Comines, 1856)
Traduction par C-H. Derveaux.
(p. vii-x).


INTRODUCTION.


Le titre d’Annales religieuses donné à ce travail, indique assez que nous n’avons pas l’intention de traiter de l’histoire politique de ce pays, ni de parler avec détail des révolutions si fréquentes qui placèrent la Flandre sous des dominations différentes. Nous laissons ces considérations longues et difficiles aux historiens qui en ont fait le sujet de leurs recherches et de leurs études[1].

Notre but est de montrer le caractère religieux qu’a eu dans les siècles passés, notre petite ville de Comines. Toutefois, il ne serait pas possible dans l’intérêt du lecteur cominois, pour qui ce livre a été fait, de passer sous silence les noms des personnages illustres qui honorèrent leur ville, les luttes sanglantes dont elle fut témoin, et le développement de son commerce à diverses époques.

Ce pays dominé, mais non asservi par les efforts des armées romaines, fit partie des États Francs de Clovis. Successivement sous les comtes et marquis de Flandre, le duc de Bourgogne, la maison d’Autriche, la domination espagnole, il finit, après d’incessantes révolutions, par appartenir à la France. Le traité d’Utrecht 1713 et celui de 1815 fixèrent les limites de la France à la Lys, de sorte que notre ville, assise actuellement sur les frontières de la France et de la Belgique, renferme deux communes bien distinctes, ayant deux administrations complètement étrangères l’une à l’autre. La partie française comprend 5600 habitants à peu près, la partie belge, 3500 : néanmoins on peut dire que tout est français, le langage[2], les mœurs, les habitudes ainsi que l’esprit d’union et de sympathie qui règne entre tous, tellement qu’au premier coup-d’œil on croirait qu’il n’y a qu’une seule et même ville. Cette séparation n’est donc que nominale et pour la satisfaction de la diplomatie. Il est impossible de désunir ce qui a été uni pendant tant de siècles par les liens si étroits de la même foi et des mêmes vicissitudes. Un même toit religieux abrita les deux Comines depuis la prédication de saint Chrysole jusqu’à la grande révolution.

Nous croyons devoir faire une remarque importante avant d’entrer en matière.

Les ouvrages de la nature de celui que nous offrons au public sont examinés scrupuleusement par la critique, et c’est évidemment son droit et son devoir. Elle examinera donc le fond de ce travail, c’est-à-dire les faits consignés dans l’histoire et qu’une génération transmet à la génération qui lui succède. Sous ce rapport nous avons mis tous nos soins et toute notre application à présenter les événements dans leur jour le plus vrai, nous appuyant, autant que possible, sur des documents impartiaux et authentiques, et s’il nous est échappé quelque erreur, nous déclarons hautement qu’elle est involontaire et nous remercions à l’avance ceux qui nous la feront découvrir. Quant à la forme de ces Annales et au style de notre récit, nous déclarons ingénument que nous n’avons aucune prétention au titre d’écrivain et d’homme de lettres, et que notre unique but est d’être utile. Nous avons raconté simplement et avec exactitude, ce que nous avons jugé digne d’intérêt et nous nous recommandons pour le reste à l’indulgence des savants et à la sympathie de nos bien aimés cominois.

  1. Voyez l’Histoire de Tournay, par Cousin, l’Histoire de Lille, par M. Victor Derode, et surtout les Chroniques de Flandre, par M. Kervyn de Lettenhove.
  2. La langue flamande était seule parlée à Comines, il y a deux siècles ; à partir de la conquête de la Flandre par Louis XIV, elle se retire par une marche assez rapide devant la langue française.