Paul Delair, La Découverte 1868


ODE SUR LA NAVIGATION


par


PAUL DELAIR


Couronnée au concours pour l’Exposition du Havre,
et récitée par M. Taillade, de l’Odéon, à la Fête d’inauguration,
le 1er Juin 1868.




LA DÉCOUVERTE


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I


Quand aux jours primitifs l’homme, errant sur la terre.
Appelé dans la nuit par une voix austère,
Survint au bord plaintif des flots,
Quant il vit l’Océan, noir sous le ciel sublime,
Et qu’il prêta l’oreille aux trompes de l’abîme
Alternant avec des sanglots,

Mesurant sa faiblesse à cette horreur immense,
Devant l’onde où le flot sur le flot recommence,
Pris d’un effroi religieux,
Il crut avoir touché la borne infranchissable,
Et la mer se roulant baveuse sur le sable,
Lui parut le fossé des cieux !

Sur les houles sans fin ses prunelles troublées
Voyaient des spectres verts, têtes échevelées,
Monter et plonger tour à tour,
Et dans les profondeurs sans bornes et sans portes,
La nuit il entendait gémir les âmes mortes
Cinglant vers l’éternel séjour.

Cernant le monde avec son cercle d’amertume,
Sur le soleil, le soir, tirant ses plis d’écume,
La mer, c’était le grand cercueil ;
De l’ordre de Dieu même elle gourmandait l’homme :
« Arrête ! quel que soit le nom dont on te nomme,
« Beau roi, brise ici ton orgueil !

« Tu n’iras pas