Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l’Indo-Chine : relation extraite du journal et de la correspondance de l’auteur
Texte établi par Ferdinand de LanoyeL. Hachette (p. 289-301).
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XXVI

La ville de Tchaïapoune. — Retour à Bangkok. — L’éléphant blanc. — Encore la forêt du Roi-du-Feu. — Kôrat et sa province. — Penom-Wat.

Ayant atteint la ville de Tchaïapoune le 28 février 1861, je me présentai au gouverneur pour lui demander de l’aide et le prier de me louer des éléphants ou des bœufs pour continuer mon voyage. Je lui montrai mon passeport français, la lettre du Khrôme Luang, puis une autre du gouverneur de Kôrat ; mais tout fut inutile. Il me fut répondu que, si je voulais des bœufs ou des éléphants, il y en avait dans la forêt. J’aurais pu me passer de l’assistance de ce fonctionnaire en langouti, et louer d’autres animaux chez les habitants de la ville ; mais ceux-ci me les auraient fait payer deux ou trois fois plus cher que le prix ordinaire, et ma bourse est trop légère pour me permettre un pareil sacrifice, qui se renouvellerait probablement à chaque station. La seule chose qui me restait à faire, c’était de retourner sur mes pas, en laissant un de mes domestiques à Kôrat avec mes bagages, et de revenir avec l’autre à Bangkok, pour réclamer près de notre consul, des ministres ou du roi lui-même ; car il y a un traité conclu par M. de Montigny, entre la France et le roi de Siam, qui oblige à donner aide et protection aux Français, et surtout aux missionnaires et aux naturalistes. C’était là une perte de temps bien regrettable et qui pouvait m’occasionner de très-sérieux inconvénients, car, si par suite de ces délais je venais à être surpris par la saison des pluies au milieu des forêts, ou même avant mon arrivée dans un lieu sain, ma santé et ma vie pouvaient être compromises.

Heureusement, depuis Kôrat, j’eus le plaisir de voyager en compagnie de cet éléphant blanc capturé dans le Laos, dont j’ai parlé plus haut, et qu’un dignitaire de Bangkok, avec lequel je liai connaissance et qui me prit en amitié, était venu chercher en grande pompe. La caravane était magnifique : elle comptait plus de soixante éléphants de couleur normale, dont deux furent mis à mon service, un pour moi-même et un autre pour mon domestique.

Me trouvant donc dans les bonnes grâces du mandarin chargé d’escorter le pachyderme, fétiche, je lui contai mon aventure, et il me promit de me faire obtenir tout ce que je désirais. À notre arrivée à Saraburi, nous trouvâmes les administrateurs du Laos et les premiers mandarins de Bangkok réunis en cette ville pour prendre soin de l’éléphant. Les Siamois, gens superstitieux avant tout et pleins de foi dans la métempsycose, croient que l’âme de quelque prince ou de quelque roi passe dans le corps de ce pachyderme, comme aussi dans le corps des singes blancs et de tout autre animal albinos : c’est pourquoi ils ont pour ces créatures maladives la plus grande vénération, non pas qu’ils les adorent, car les Siamois, en vrais disciples des premiers apôtres du bouddhisme, ne reconnaissent aucun être suprême, pas même le premier Bouddha ; mais ils ont la croyance que ces êtres anormaux portent bonheur au pays.

Pendant le trajet, des centaines d’hommes coupaient les branches devant l’animal et lui préparaient un chemin facile. Deux mandarins lui servaient à ses repas des gâteaux de différentes espèces dans des plats d’or, et le roi lui-même, sorte de philosophe rationaliste, vint jusqu’à Ajuthia au-devant de lui.

Grâce à ce fétiche et à l’aide de quelques présents de valeur, je réussis à obtenir des lettres un peu plus favorables pour les gouverneurs des provinces du Laos et je quittai de nouveau Bangkok, où pendant une quinzaine de jours je reçus la gracieuse et généreuse hospitalité de mon ami le docteur Campbell, un des meilleurs hommes que j’aie rencontrés jusqu’à présent, et dont la bonté, l’affabilité et la loyauté ont gagné mon cœur et mon estime.

Enfin, après une double dépense, d’argent et de temps, celle-ci plus irréparable que celle-là, je pus reprendre la route du nord.

En me parlant de son voyage à Kôrat, le docteur House le plus hardi des missionnaires américains de Bangkok et le seul blanc qui ait pénétré jusque-là depuis un grand nombre d’années, me disait qu’il n’avait éprouvé sous tous les rapports qu’une déception ; J’en dirais autant, si j’étais comme lui parti avec beaucoup d’illusions ; mais j’avais une idée de la forêt du Roi-du-Feu, quej’avais déjà traversée sur une foule de points, comme à Phrâbat, à Khao-Khoc, et à Kenne-Khoé, et sous les ombrages délétères de laquelle j’avais déjà passé plus d’une nuit. Quant à des cités, je ne m’attendais point non plus à en trouver au milieu de ces bois, presque impénétrables, et où l’œil même ne peut plonger à plus de quelques pas devant soi. Dernièrement encore, je viens d’y passer dix nuits successives. Durant la traversée de cette immense et épaisse forêt, tout ce qu’il y avait de Chinois dans la caravane, heureux à chaque halte de se trouver encore au nombre des vivants, s’empressaient de tirer de leurs paniers une abondance de provisions capable de satisfaire l’appétit le plus exigeant ; ils choisissaient, à défaut d’autel, quelque gros arbre ; ils disposaient leurs plats, allumaient des bougies, et brûlaient force papier doré, en marmottant des prières à genoux. À l’entrée et à la sortie de la grande forêt, ils jetaient des feuilles et déposaient des bâtons parfumés dans des espèces de chapelles élevées sur quatre pieux de bambous ; ces étranges offrandes devant, selon eux, conjurer les démons et écarter la mort.

Quant aux Laotiens, quoique superstitieux, je les trouvai très aguerris, surtout ceux qui ont fait huit ou dix fois ce voyage par an. Ils n’ont même pas peur d’éveiller le roi du Feu en tirant sur les voleurs et le gibier qui se présentent. La mort cependant recrute journellement, et même dans la bonne saison, un ou deux individus sur dix nouveaux venus qui traversent cette forêt. Je suppose que le nombre de ceux, qui payent leur tribut dans ce terrible passage, soit à la maladie, soit à la mort, doit être considérable dans la saison des pluies. Lorsque tous les torrents débordent, que la terre est partout détrempée, que, d’une extrémité à l’autre, le chemin n’est qu’un chapelet de fondrières, que les rizières sont couvertes de plusieurs pieds d’eau, et qu’après cinq ou six jours de marche dans la vase, le voyageur ne cesse de transpirer au milieu d’une atmosphère d’une puanteur extrême, chaude comme une étuve chargée de miasmes putrides, que de victimes doivent succomber !

Deux Chinois de notre caravane arrivèrent à Kôrat avec une fièvre affreuse. Je pus en sauver un, parce que, prévenu à temps, je lui administrai de la quinine ; mais l’autre, celui qui paraissait cependant le plus robuste, était déjà agonisant quand j’appris qu’il était malade.

Notre premier bivac dans le Dong-Phya-Phaye avait été sur le revers occidental de la montagne. Nous campâmes sur un coteau où nos pauvres bœufs, faute d’herbe, durent apaiser leur faim avec quelques feuilles arrachées aux arbustes. La rivière qui descend de ces hauteurs est celle qui passe près de Kôrat. Sur la colline de la rive opposée, campait une autre caravane de plus de deux cents bœufs.

Bans une gorge de cette montagne, et sur des hauteurs presque inaccessibles et excessivement fiévreuses, j’ai trouvé une petite tribu de Karens qui naguère habitait les environs de Patawi. Pour conserver leur indépendance, ils vivent il peu prés séquestrés, car la crainte des fièvres empêche les Siamois de pénétrer chez eux. Ils n’ont ni temples ni prêtres ; ils cultivent un riz magnifique et plusieurs espèces de bananes qui ne se retrouvent que chez les tribus de même origine. Beaucoup d’individus, quoique assez rapprochés d’eux, ignorent même leur existence ; il est vrai qu’ils sont un peu nomades. D’autres prétendent qu’ils payent annuellement un tribut consistant en rake, qui n’est autre chose que la gomme laque ou lake du Japon. Cependant, chose assez contradictoire, le gouverneur de la province de Kôrat et plusieurs chefs de la province de Saraburi m’ont paru dans une complète ignorance à ce sujet.

Le jour suivant, une heure avant le lever du soleil, après avoir compté les bœufs morts d’épuisement et devant servir de pâture aux animaux sauvages ; après avoir chargé les marchandises sur d’autres bâts, nous nous remîmes en marche ; et vers onze heures nous entrâmes dans de longs bois couverts de taillis et de hautes herbes, où fourmillent les daims et où l’on ne tarda pas à faire halte auprès d’une source.

Le lendemain, après un détour de quelques milles au nord pour trouver un passage, on gravit une nouvelle chaîne qui court parallèlement à la première, mais couverte de blocs de grès ; la végétation y reparaît avec toute sa force. L’air est pur et frais ; et, grâce à des bains réitérés dans des sources d’eau vive, les pieds, qui n’étaient que plaies et ampoules au début du voyage, commencent à se raffermir. Les gibbons et les calaos font de nouveau entendre leurs cris. Je tuai plusieurs faisans, des paons et un aigle qui, après avoir été écorché, fit les délices de nos conducteurs. Au-delà de ce mont, le terrain redevient sablonneux et la végétation plus maigre. Nous campons de nouveau sur les bords de la petite rivière de Kôrat, à trois cents mètres d’un village décoré du nom de chef-lieu de district.

La dernière chaîne que nous venons de traverser se déroule alors à une lieue de nous comme un sombre rempart, surmonté des dômes et des crêtes de la première. Nos conducteurs sont tous des Laotiens des environs de Kôrat ; leur vieux chef est plein d’égards et d’attentions pour moi ; tous les soirs, il prépare ma place pour la nuit, aplanit la terre, coupe des branches et les recouvre d’un petit toit de feuilles pour me préserver de la rosée. La vie de ces braves gens est dure ; tous les jours et par toutes les saisons ils piétinent le sol de ces affreux sentiers, ayant à peine le temps, matin et soir, d’avaler quelques boulettes de riz gluant, et passant la plupart de leurs nuits, avec très-peu de sommeil, tourmentés par les fourmis blanches et tenus en alerte par les voleurs.

Tous les jours, nous croisions une ou deux caravanes de quatre-vingts à cent bœufs, transportant des peaux de daim, de cerf, de panthère, beaucoup de soie écrue, venant du Laos oriental, des langoutis de coton et de soie, des queues de paon, de l’ivoire, des dents d’éléphant, du sucre, mais ce dernier produit en petite quantité.

Les quatre jours suivants, le terrain conservait le même aspect. Nous traversâmes plusieurs villages considérables, dont un, Sikiéou, nourrit un troupeau de plus de six cents bœufs appartenant au roi. Nous avons mis dix jours pour aller de Keng-Khoé à Kôrat, où je fus parfaitement reçu par le gouverneur, qui, outre mes autres lettres, m’en donna une pour les fonctionnaires des provinces sous ses ordres, les obligeant à me louer, à ma première réquisition, autant de bœufs et d’éléphants que j’en mentionnerais. La plus grande partie de la population de cette ville vint au-devant de moi, avec Phraï en tête, et plusieurs habitants me comblèrent de présents : des sacs de riz, du poisson, des fruits, du tabac, le tout en abondance.

Le quartier chinois de cette ville compte soixante à soixante-dix maisons bâties avec de larges briques séchées au soleil, et entourées de palissades de neuf pieds de hauteur et fortes comme celles d’un rempart.

Toutes ces précautions sont de la plus grande nécessité, car Kôrat est un nid de voleurs et d’assassins ; le repaire de l’écume des deux races siamoise et laotienne : bandits et gens sans aveu, échappés d’esclavage ou de prison, et attirés là sur une scène plus digne d’eux, comme les corbeaux et les loups qui suivent les armées et les caravanes. Ce n’est pas qu’ils jouissent d’une impunité complète ; le gouverneur de Kôrat, fils du bodine, ou général, qui soumit Battambâng et les provinces révoltées du Cambodge, est vice-roi de ce tout petit État. Il a droit de vie et de mort, et il en use, dit-on, avec un sang-froid implacable ; il coupe une tête et un poignet sans y mette beaucoup de façons. C’est toujours la justice siamoise, justice sommaire, mais peu logique. Il n’y a ni gendarmes ni police : c’est au volé à arrêter le voleur, s’il peut, et à l’amener devant le juge ; son voisin même ne lui prêterait pas main-forte.

Il s’agissait de me caser. Je m’adressai aux Chinois pour avoir un abri un peu plus grand que celui où Phraï s’était d’abord logé avec mes bagages. En peu de temps nous trouvâmes mon affaire.

À l’extrémité du quartier chinois, qui est le bazar, commence la ville proprement dite, renfermée dans une enceinte carrée d’un demi-mille de côté, formée de blocs de concrétions ferrugineuses et de grès tirés des montagnes éloignées, et que je reconnus au premier aspect pour être l’ouvrage des Khmerdôm.

Dans l’intérieur se trouvent la résidence du gouverneur, celle de toutes les autres autorités, quelques pagodes, un caravansérail ; en outre, un assez grand nombre d’autres habitations ne sont pas comprises dans l’enceinte. Un mince torrent de huit mètres de large, qui traverse la ville, est bordé de petites plantations d’aréquiers et de cocotiers.

La ville de Kôrat proprement dite ne doit pas contenir plus de cinq à six mille habitants, et dans ce nombre on compte six cents Chinois, en partie venus directement du Céleste Empire, en partie descendants de parents fixés antérieurement dans le pays. Tous rayonnent pour leur commerce de Kôrat à travers la province ou sur la route de Bangkok.

Autant je trouvai les Siamois venus du dehors impudents, autant je rencontrai d’affabilité et de cœur même dans les Chinois. C’était le contraste qui existe entre la civilisation et la barbarie, entre la masse de vices qu’enfante la paresse et les qualités que donne l’habitude du travail. Malheureusement, l’aisance que le commerce donne à tous ces infatigables négociants et industriels, leur procure aussi le moyen de satisfaire leurs terribles passions : le jeu et l’opium. On n’en voit que trop couchés sous un hangar, leur longue et maigre échine courbée, leurs doigts crispés sur leurs affreuses cartes, ou bien plongés dans une espèce de léthargie, au fond de sombres et sales réduits infects, qu’éclaire seulement la faible lumière de leur lampe de fumeur d’opium. L’argent sort à pleines mains de leurs bourses, mais finit toujours, comme à Bangkok, par retourner aux mandarins. Joueurs ou non, le commerce enrichit le plus grand nombre ; et quoiqu’ils commencent pauvres et avec des marchandises d’emprunts confiées, sur la simple recommandation d’un ami, par quelque compatriote dont les magasins regorgent, un petit nombre de voyages suffit, il paraît, pour leur donner un capital.

C’est de tout le Laos oriental, d’Oubone, de Bassac, de Jasoutone, ainsi que des villages laotiens de la province de Kôrat, que les marchandises, dont la soie, quoique d’une qualité tout à fait inférieure, fait le principal article, descendent à ce marché. Là, comme ailleurs et comme le dit le Siamois avec une fierté vraiment castillane, le Siamois ne sait produire que son riz.

Si la ville de Kôrat est peu populeuse, la province entière, qui compte une foule de villages et plus de onze petites villes ou chefs-lieux de districts, espacés à quatre, six et huit journées de distance, doit compter de cinquante à soixante mille habitants. Ce petit État est simplement tributaire de Siam, mais à la condition de fournir la première et la plus considérable levée d’hommes, en cas de guerre.

Le tribut consiste en or ou en sa valeur en argent, et monte annuellement, dans plusieurs districts, entre autres dans ceux de Tchaïapoune et de Poukiéau, à huit ticaux par individu. D’autres le payent en soie qui est pesée avec la balance des mandarins ; et ceux-ci, comme je le leur ai vu faire pour le cardamome à Poursat et pour les langoutis à Battambâng, surfont le poids et achètent pour leur propre compte, et aux prix qu’ils daignent fixer, la meilleure marchandise.

Les éléphants y sont nombreux ; on en tire un grand nombre de l’est, du Cambodge et de tout le Laos septentrional jusqu’à Muang-Lang. Il se tient à Kôrat un marché de ces animaux, dont la province entière doit compter plus d’un millier. Les bœufs et les buffles y étaient autrefois d’un bon marché excessif ; mais les épizooties qui depuis quelques années ont ravagé les troupeaux en ont fait doubler et tripler le prix. C’est des extrémités du Laos oriental et même des frontières du Tonkin qu’on les amène dans le sud.

J’ai visité à neuf milles de Kôrat, à l’est, un temple nommé Penom-Wat, très-remarquable, quoique bien moins grand et moins beau que ceux d’Ongkor. Le deuxième gouverneur me prêta un poney et un guide, et, après avoir traversé d’immenses rizières sous un soleil vertical et de feu, reflété par une terre jaunâtre, j’arrivai au lieu où ma curiosité m’attirait, et qui, tel qu’une oasis, se reconnaissait dans le lointain aux panaches aériens de ses cocotiers et à la fraîcheur de sa verdure. Ce ne fut pas cependant sans avoir pris un bain forcé. En traversant le Tekon, profond de quatre pieds d’eau à peu près, je voulus, pour éviter d’être mouillé, renouveler les tours de force de l’enfance imprudente, et, imitant Franconi, je me mis debout sur ma selle ; mais, selon l’usage siamois, deux petites ficelles retenaient seules la sangle, non bouclée, si bien qu’au milieu du courant, celle-ci tourna et me fit piquer une tête qu’aurait envié le plus célèbre nageur des bains de l’École. J’en fus quitte pour rester une demi-heure vêtu à la Siamoise, et, ce temps écoulé, il ne restait aucune trace de l’accident. Penom-Wat est un charmant temple de trente-six mètres de long sur quatorze de large, et dont le plan figure assez bien une croix. Il est composé de deux pavillons ou chapelles avec toit de pierre en voûte et portiques de la plus grande élégance. La hauteur des voûtes est de sept à huit mètres ; la galerie en a trois de largeur intérieurement et deux de plus avec les murs. À chaque façade de la galerie se trouvent deux fenêtres garnies de barreaux tournés. Du grès rouge et gris d’un grain assez grossier est seul entré dans sa construction, et, dans plusieurs endroits, il commence à se décomposer. Sur une des portes se trouve une longue inscription. Les frontons de toutes sont couverts de sculptures représentant les mêmes sujets à peu près que les temples d’Ongkor et du Bassette. Dans un des pavillons sont plusieurs idoles de Bouddha en pierre, dont la plus grande a deux mètres cinquante centimètres de haut et est actuellement couverte de haillons. Les murs du pavillon ont près de deux mètres d’épaisseur. Quand on parvient au sommet, on croirait se trouver au milieu des ruines d’Ongkor : c’est la même architecture ; le même art, le même goût, ont présidé à la construction de l’un et de l’autre. Ici comme là, ce sont des blocs immenses, polis comme du marbre, se joignant comme s’ils étaient cimentés, ou plutôt comme deux planches soigneusement rabotées et collées. Barreaux, toiture, tout l’édifice en un mot est l’œuvre des Khmerdôm et non une imitation postérieure, et doit remonter aux règnes illustres qui ont laissé sur divers points de l’empire des traces de leur grandeur. L’intérieur, cependant, est loin de répondre à l’extérieur. Penom était le temple de la reine, disent les Siamois ; celui du roi son époux est à Pimaïe, district situé à une trentaine de milles à l’est de Kôrat.