Texte établi par Henri MartineauLe Livre du divan (Napoléon. Tome Ip. 165-166).


CHAPITRE XLIII


Arrêtons-nous un instant pour pénétrer dans l’intérieur de ce palais des Tuileries d’où partaient les destinées de l’Europe.

La guerre d’Espagne marque à la fois l’époque de la décadence de la puissance de Napoléon et l’époque de la décadence de son génie. La prospérité avait graduellement changé et vicié son caractère. Il avait le tort de trop s’étonner de ses succès, et de ne pas assez mépriser les rois, ses confrères. Il buvait à longs traits le poison de la flatterie. Il crut que rien ne lui était personnellement impossible ; il ne put plus supporter la contradiction et bientôt la moindre observation lui parut une insolence et, de plus, une bêtise. Par suite de ses mauvais choix, il était accoutumé à ne voir réussir que les choses qu’il faisait lui-même. Bientôt ses ministres ne durent plus paraître faire autre chose que rédiger servilement ses idées. Les hommes d’un vrai talent s’éloignèrent ou feignirent de ne plus penser, et, en secret, se moquaient de lui[1]. Il est impossible que, dans ce siècle, les vrais talents ne se trouvent pas réunis à des idées un peu libérales : Napoléon lui-même en est un exemple, et ce crime passe pour le plus grand de tous.



  1. Le comte Réal, par exemple.