Traité élémentaire de la peinture/190

Traduction par Roland Fréart de Chambray.
Texte établi par Jean-François DetervilleDeterville, Libraire (p. 162-163).


CHAPITRE CXC.

Moyen pour se souvenir de la forme d’un visage.

Si vous voulez retenir sans peine l’air d’un visage, apprenez premièrement à bien dessiner plusieurs têtes, et les parties qui distinguent le plus les hommes dans toutes les formes qu’elles peuvent avoir : ces parties sont la bouche, les yeux, le nez, le menton, le col et les épaules. Par exemple, les nez ont dix figures ou formes différentes ; il y en a de droits, de bossus, de creux ou d’enfoncés, de relevés plus haut ou plus bas que le milieu, d’aquilins, d’égaux, de plats ou d’écrasés, de ronds et d’aigus, qui sont tous propres à être vus de profil. Des nez qui sont propres à être vus de front, il s’en trouve d’onze formes différentes ; d’égaux, de gros au milieu, de gros par le bout, et déliés proche des sourcils, de déliés par en bas, et gros par le haut. Les narines et les ouvertures du nez font encore des différences qu’il faut remarquer : il y a des narines larges, d’autres étroites, de hautes, de basses, des ouvertures retroussées, d’autres rabattues et couvertes du bout du nez ; et ainsi vous trouverez quelques particularités dans les moindres parties, qu’il faudra que vous observiez sur le naturel pour en remplir votre imagination ; ou bien lorsque vous aurez à peindre un visage, ou quelqu’une de ses parties, portez des tablettes avec vous, où vous ayez dessiné les différentes parties dont je viens de parler, et après avoir jeté un coup-d’œil sur le visage de la personne que vous voulez peindre, vous examinerez dans votre recueil à quelle sorte de nez ou de bouche celle que vous voyez ressemble, et vous ferez quelque marque pour le reconnoître, et le mettre en œuvre quand vous serez au logis.