Sur une nouvelle méthode de mesure des mobilités d'ions dans les gaz

ÉLECTRONIQUE. – Sur une nouvelle méthode de mesure des mobilités d'ions dans les gaz. Note[1]. de Mme Éliane Montel, présentée par M. Maurice de Broglie.

La mesure des mobilités d'ions ou d'électrons dans les gaz, à des pressions et dans des champs électriques aussi variés que possible, présente actuellement un renouveau d'intérêt, en liaison, par exemple, avec le développement de la technique des compteurs Geiger-Müller. Divers travaux d'ordre expérimental ou d'ordre théorique ont été récemment consacrés à cette question[2]. Je désire indiquer ici le principe d'une méthode nouvelle, dont j'ai entrepris la réalisation expérimentale, et qui me semble présenter des avantages réels sur celles employées jusqu'ici. Elle se fonde sur un résultat que j'ai établi dans une note antérieure[3]. Soit un condensateur plan entre les armatures A et B duquel est maintenu un champ électrique uniforme et constant au moyen d'une source continue E. Par un procédé quelconque (effet photoélectrique sur le plateau A, faisceau plan de rayons X au voisinage immédiat de celui-ci, ou passage à travers de fines ouvertures pratiquées dans A), des électrons ou des ions, que je supposerai tous identiques, sont introduits dans le gaz au voisinage immédiat du plateau A, et, le sens du champ étant convenable, se déplacent vers B avec une vitesse constante k*h, k étant la mobilité des électrons ou des ions considérés, dont le libre parcours dans le gaz est supposé petit par rapport à la distance d des plateaux.

Soit I*dt la quantité d'électricité portée par les particules ainsi introduites pendant l'intervalle de temps dt. Je suppose que, par un procédé également quelconque (variation périodique de l'intensité du rayonnement qui produit les centres électrisés, intervention d'un champ électrique alternatif agissant sur ces centres avant leur arrivée au plateau A, etc.), l'intensité correspondante du courant d'introduction I soit soumise à des variations périodiques de pulsation omega ou de période T connue.

Soit


  • I = Somme (m=0...infini) [(I_m)*cos (m*omega*t + (phi_m))]


le développement de cette intensité en série de Fourier.

Cherchons à déterminer, en régime alternatif permanent, l'intensité i du courant total de Maxwell à travers un plan quelconque parallèle aux plateaux du condensateur ou à travers une section quelconque des conducteurs filiformes qui relient ces plateaux à la source E.

Sous la condition, facile à réaliser, que les charges électriques présentes dans le gaz soient trop faibles pour troubler appréciablement la constance et l'uniformité du champ h, le développement en série de Fourier du courant observé i se déduit de manière très simple des formules que j'ai données antérieurement[4].

L'amplitude (i_m) de l'harmonique d'ordre m du courant observé s'obtient à partir de l'amplitude (I_m) de l'harmonique correspondante du courant d'introduction par la relation simple


  • (i_m) = (I_m)*[(sin(alpha_m))/(alpha_m))]



  • (alpha_m) = (m*Pi*a)/(k*h*T)


Cette amplitude (i_m) s'annule lorsque (alpha_m) est un multiple entier de Pi, c'est-à-dire lorsqu'on a, n étant un nombre entier,


  • d = n*k*h*(T/m)


ce qui est réalisé lorsque la distance d entre les plateaux contient un nombre entier n de fois le chemin parcouru par les ions pendant la période T/m de l'harmonique considéré.

En particulier, si l'on mesure, par les méthodes bien connues, l'amplitude i du terme fondamental de période T dans le courant observé, et si l'on fait varier d, h ou T, on devra constater que cette amplitude s'annule chaque fois que la relation


  • d = n*k*h*T


est satisfaite.

Il en résulte un moyen précis pour mesurer la mobilité h. Le résultat précédent prend un aspect plus intuitif et concret si l'on remarque que l'action du champ électrique a pour effet d'étaler dans l'espace entre les plateaux du condensateur, avec une vitesse constante (k*h), les variations périodiques dans le temps du courant d'introduction I, avec la longueur d'onde k*h*(T/m) pour l'harmonique d'ordre m. L'harmonique correspondant du courant observé disparaît lorsque la distance entre les plateaux contient un nombre entier de ces longueurs d'onde. La possibilité de faire varier dans de larges limites la période T et l'intensité du champ électrique h doit donner à cette méthode une grande souplesse d'application.

  1. séance du 14 février 1944
  2. A.V. Hershey, Phys. Rev., 56, 1939, pages 908 et 916 ; A.F. Pearce, Proc. Roy. Soc., 155, 1936, page 490 ; Pierre Herreng, thèse de doctorat, Paris, 1943.
  3. Éliane Montel, Comptes-rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, 208, 1939, page 1141.
  4. Comptes-rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, 208, 1939, page 1141.