Anthologie des poètes français du XIXème siècle/Jean Reboul

Anthologie des poètes français du XIXème siècle, Texte établi par (Alphonse Lemerre), Alphonse Lemerre, éditeurtome 1, (1762 à 1817) (p. 126-128).



JEAN REBOUL


1796 – 1854




Jean Reboul, boulanger de Nîmes, a donné : Poésies (1840), Poésies nouvelles (1847), Les Traditionnelles (1857), Le Martyre de Vivia, tragédie.

Il dut la plus grande part de sa célébrité aux louanges de Chateaubriand et aux belles strophes que lui adressa Lamartine, Le Génie dans l’obscurité, strophes auxquelles il répondit :

Chantre ami, qu’à toi seul en retourne la gloire.
       Mes chants naquirent de tes chants !

De ses nombreuses compositions, souvent obscures, confuses de pensées, et surtout faibles de facture, l’avenir ne retiendra guère que L’Ange et l’Enfant, une des premières venues et des mieux inspirées.

Ses œuvres ont été publiées par MM. Garnier, frères.

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L’ANGE ET L’ENFANT




Un ange au radieux visage,
Penché sur le bord d’un berceau,
Semblait contempler son image
Comme dans l’onde d’un ruisseau.


« Charmant enfant qui me ressemble,
Disait-il, oh ! viens avec moi !
Viens ! nous serons heureux ensemble,
La terre est indigne de toi.

Là, jamais entière allégresse :
L’âme y souffre de ses plaisirs,
Les cris de joie ont leur tristesse,
Et les voluptés, leurs soupirs.

La crainte est de toutes les fêtes ;
Jamais un jour calme et serein,
Du choc ténébreux des tempêtes,
N’a garanti le lendemain.

Eh quoi ! les chagrins, les alarmes
Viendraient troubler ce front si pur !
Et par l’amertume des larmes
Se terniraient ces yeux d’azur !

Non, non ! dans les champs de l’espace
Avec moi tu vas t’envoler ;
La Providence te fait grâce
Des jours que tu devais couler.

Que personne dans ta demeure
N’obscurcisse ses vêtements !
Qu’on accueille ta dernière heure
Ainsi que tes premiers moments !

Que les fronts y soient sans nuage,
Que rien n’y révèle un tombeau !
Quand on est pur comme à ton âge,
Le dernier jour est le plus beau. »


Et, secouant ses blanches ailes,
L’ange à ces mots a pris l’essor
Vers les demeures éternelles…
Pauvre mère !… ton fils est mort.



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