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Tout est possible à Léonard, hormis de faire croire qu’il croit. L’amour qui a la force de créer, lui seul en accepte la peine. Le goût, la pensée, la science du Vinci vont parfois au-delà de ce que l’art réclame ; mais l’amoureuse énergie qui donne l’être, à l’instar de la nature et des mères, dans la douleur et la simplicité, Léonard ne l’a pas. Toujours maître de ce qu’il médite, Léonard se regarde faire ; il calcule tout ; il a tout essayé. Il assiste au spectacle du monde ; je crains qu’il ne s’y joue. Serait-ce qu’il le domine ? On ne domine sur l’univers qu’en s’y confondant. C’est plutôt que ce grand curieux jouit royalement de ce que la vie lui donne ; mais il n’y ajoute pas ; il ne la soulève point ; il ne la sauve pas. Il contemple l’univers ; il y fait ses choix, il l’orne et le dispose suivant un ordre raffiné ; il s’y promène, comme un prince exquis au milieu de sa cour. Mais la vie languit sous son règne ; et dans le néant qu’il y découvre |
Tout est possible à Léonard, hormis de faire croire qu’il croit. L’amour qui a la force de créer, lui seul en accepte la peine. Le goût, la pensée, la science du Vinci vont parfois au-delà de ce que l’art réclame ; mais l’amoureuse énergie qui donne l’être, à l’instar de la nature et des mères, dans la douleur et la simplicité, Léonard ne l’a pas. Toujours maître de ce qu’il médite, Léonard se regarde faire ; il calcule tout ; il a tout essayé. Il assiste au spectacle du monde ; je crains qu’il ne s’y joue. Serait-ce qu’il le domine ? On ne domine sur l’univers qu’en s’y confondant. C’est plutôt que ce grand curieux jouit royalement de ce que la vie lui donne ; mais il n’y ajoute pas ; il ne la soulève point ; il ne la sauve pas. Il contemple l’univers ; il y fait ses choix, il l’orne et le dispose suivant un ordre raffiné ; il s’y promène, comme un prince exquis au milieu de sa cour. Mais la vie languit sous son règne ; et dans le néant qu’il y découvre |
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peut-être, son souffle ne ranime pas ces fleurs suaves du feu, les plus belles, que la nuit éteint et couche. La puissance des puissances fait défaut à ce puissant. C’est le Goethe de Florence, et d’un goût infini ; mais |
peut-être, son souffle ne ranime pas ces fleurs suaves du feu, les plus belles, que la nuit éteint et couche. La puissance des puissances fait défaut à ce puissant. C’est le Goethe de Florence, et d’un goût infini ; mais Gœthe savait lui-même sa distance à {{corr|Shakspere|Shakspeare}}. |