« Fantasio (Charpentier, 1888) » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
Aucun résumé des modifications
Ligne 494 :
 
FANTASIO
 
Eh bien donc ! où veux-tu que j'aille ? Regarde cette vieille ville enfumée ; il n'y a pas de places, de rues, de ruelles où je n'aie rôdé trente fois ; il n'y a pas de pavés où je n'aie traîné ces talons usés, pas de maisons où je ne sache quelle est la fille ou la vieille femme dont la tête stupide se dessine éternellement à la fenêtre ; je ne saurais faire un pas sans marcher sur mes pas d'hier ; eh bien, mon cher ami, cette ville n'est rien auprès de ma cervelle. Tous les recoins m'en sont cent fois plus connus ; toutes les rues, tous les trous de mon imagination sont cent fois plus fatigués ; je m'y suis promené en cent fois plus de sens, dans cette cervelle délabrée, moi son seul habitant ! je m'y suis grisé dans tous les cabarets ; je m'y suis roulé comme un roi absolu dans un carrosse doré ; j'y ai trotté en bon bourgeois sur une mule pacifique, et je n'ose seulement pas maintenant y entrer comme un voleur, une lanterne sourde à la main.
Eh bien donc ! où veux-tu que j'aille ? Regarde cette vieille ville enfumée ; il n'y a pas de places, de rues, de ruelles où je n'aie rôdé trente fois ; il n'y a pas de pavés où je n'aie traîné ces talons usés, pas de maisons où je ne sache quelle est la fille ou la vieille femme dont la tête stupide se dessine éternellement à la fenêtre ; je ne saurais faire un pas sans marcher sur mes pas d'hier ; eh bien, mon cher ami, cette ville n'est rien auprès de ma cervelle. Tous les recoins m'en sont cent fois plus connus ; toutes les rues, tous les trous de mon imagination sont cent fois plus fatigués ; je m'y suis promené en cent fois plus de sens, dans cette cervelle délabrée, moi son seul habitant ! je m'y suis grisé dans tous les cabarets ; je m'y suis roulé comme un roi absolu dans un carrosse doré ; j'y ai trotté en bon bourgeois sur une mule pacifique, et je n'ose seulement pas maintenant y entrer comme un voleur, une lanterne sourde à la main.
 
 
SPARK
 
Je ne comprends rien à ce travail perpétuel sur toi-même ; moi, quand je fume, par exemple, ma pensée se fait fumée de tabac ; quand je bois, elle se fait vin d'Espagne ou bière de Flandre ; quand je baise la main de ma maîtresse, elle entre par le bout de ses doigts effilés pour se répandre dans tout son être sur des courants électriques ; il me faut le parfum d'une fleur pour me distraire, et de tout ce que renferme l'universelle nature, 12le plus chétif objet suffit pour me changer en abeille et me faire voltiger çà et là avec un plaisir toujours nouveau.
Je ne comprends rien à ce travail perpétuel sur toi-même ; moi, quand je fume, par exemple, ma pensée se fait fumée de tabac ; quand je bois, elle se fait vin d'Espagne ou bière de Flandre ; quand je baise la main de ma maîtresse, elle entre par le bout de ses doigts effilés pour se répandre dans tout son être sur des courants électriques ; il me faut le parfum d'une fleur pour me distraire, et de tout ce que renferme l'universelle nature, 12le plus chétif objet suffit pour me changer en abeille et me faire voltiger çà et là avec un plaisir toujours nouveau.
 
 
FANTASIO
 
Tranchons le mot, tu es capable de pêcher à la ligne.
Tranchons le mot, tu es capable de pêcher à la ligne.
 
 
SPARK
 
Si cela m'amuse, je suis capable de tout.
Si cela m'amuse, je suis capable de tout.
 
 
FANTASIO
 
Même de prendre la lune avec les dents ?
Même de prendre la lune avec les dents ?
 
 
SPARK
 
Cela ne m'amuserait pas.
Cela ne m'amuserait pas.
 
 
FANTASIO
 
Ah ! ah ! qu'en sais-tu ? Prendre la lune avec les dents n'est pas à dédaigner. Allons jouer au trente-et-quarante.
Ah ! ah ! qu'en sais-tu ? Prendre la lune avec les dents n'est pas à dédaigner. Allons jouer au trente-et-quarante.
 
 
SPARK
 
Non, en vérité.
Non, en vérité.
 
 
FANTASIO
 
Pourquoi ?
Pourquoi ?
 
 
SPARK
 
Parce que nous perdrions notre argent.
Parce que nous perdrions notre argent.
 
 
FANTASIO
Ah ! mon Dieu ! qu'est-ce que tu vas imaginer là ! Tu ne sais quoi inventer pour te torturer l'esprit. Tu vois donc tout en noir, misérable ! Perdre notre argent ! tu n'as donc dans le coeur ni foi en Dieu ni espérance ? tu es donc un athée épouvantable, capable de me dessécher le coeur et de me désabuser de tout, moi qui suis plein de sève et de jeunesse !
 
Ah ! mon Dieu ! qu'est-ce que tu vas imaginer là ! Tu ne sais quoi inventer pour te torturer l'esprit. Tu vois donc tout en noir, misérable ! Perdre notre argent ! tu n'as donc dans le coeur ni foi en Dieu ni espérance ? tu es donc un athée épouvantable, capable de me dessécher le coeur et de me désabuser de tout, moi qui suis plein de sève et de jeunesse !
Il se met à danser.
 
:''Il se met à danser.''
 
 
SPARK
En vérité, il y a de certains moments où je ne jurerais pas que tu n'es pas fou.
FANTASIO, dansant toujours
 
En vérité, il y a de certains moments où je ne jurerais pas que tu n'es pas fou.
Qu'on me donne une cloche ! une cloche de verre !
 
 
FANTASIO, ''dansant toujours''
 
Qu'on me donne une cloche ! une cloche de verre !
 
 
SPARK
 
A propos de quoi une cloche ?
 
 
13SPARK
A propos de quoi une cloche ?
FANTASIO
 
Jean-Paul n'a-t-il pas dit qu'un homme absorbé par une grande pensée est comme un plongeur sous sa cloche, au milieu du vaste Océan ? Je n'ai point de cloche, Spark, point de cloche, et je danse comme Jésus-Christ sur le vaste Océan.
Jean-Paul n'a-t-il pas dit qu'un homme absorbé par une grande pensée est comme un plongeur sous sa cloche, au milieu du vaste Océan ? Je n'ai point de cloche, Spark, point de cloche, et je danse comme Jésus-Christ sur le vaste Océan.
 
 
SPARK
 
Fais-toi journaliste ou homme de lettres, Henri, c'est encore le plus efficace moyen qui nous reste de désopiler la misanthropie et d'amortir l'imagination.
Fais-toi journaliste ou homme de lettres, Henri, c'est encore le plus efficace moyen qui nous reste de désopiler la misanthropie et d'amortir l'imagination.
 
 
FANTASIO
 
Oh ! je voudrais me passionner pour un homard à la moutarde, pour une grisette, pour une classe de minéraux. Spark ! essayons de bâtir une maison à nous deux.
Oh ! je voudrais me passionner pour un homard à la moutarde, pour une grisette, pour une classe de minéraux. Spark ! essayons de bâtir une maison à nous deux.
 
 
SPARK
 
Pourquoi n'écris-tu pas tout ce que tu rêves ? cela ferait un joli recueil.
Pourquoi n'écris-tu pas tout ce que tu rêves ? cela ferait un joli recueil.
 
 
FANTASIO
Un sonnet vaut mieux qu'un long poème, et un verre de vin vaut mieux qu'un sonnet.
 
Un sonnet vaut mieux qu'un long poème, et un verre de vin vaut mieux qu'un sonnet.
Il boit.
 
:''Il boit.''
 
 
SPARK,
 
Pourquoi ne voyages-tu pas ? va en Italie.
 
 
SPARK, Pourquoi ne voyages-tu pas ? va en Italie.
FANTASIO
 
J'y ai été.
J'y ai été.
 
 
SPARK
 
Eh bien ! est-ce que tu ne trouves pas ce pays-là beau ?
Eh bien ! est-ce que tu ne trouves pas ce pays-là beau ?
 
 
FANTASIO
 
Il y a une quantité de mouches grosses comme des hannetons qui vous piquent toute la nuit.
Il y a une quantité de mouches grosses comme des hannetons qui vous piquent toute la nuit.
 
 
SPARK
 
Va en France.
Va en France.
 
 
FANTASIO
 
Il n'y a pas de bon vin du Rhin à Paris.
Il n'y a pas de bon vin du Rhin à Paris.
 
 
SPARK
Va en Angleterre.
 
Va en Angleterre.
14FANTASIO
 
J'y suis. Est-ce que les Anglais ont une patrie ? J'aime autant les voir ici que chez eux.
 
FANTASIO
 
J'y suis. Est-ce que les Anglais ont une patrie ? J'aime autant les voir ici que chez eux.
 
 
SPARK
 
Va donc au diable, alors.
Va donc au diable, alors.
 
 
FANTASIO
 
Oh ! s'il y avait un diable dans le ciel ! s'il y avait un enfer, comme je me brûlerais la cervelle pour aller voir tout ça ! Quelle misérable chose que l'homme ! ne pas pouvoir seulement sauter par sa fenêtre sans se casser les jambes ! être obligé de jouer du violon dix ans pour devenir un musicien passable ! Apprendre pour être peintre, pour être palefrenier ! Apprendre pour faire une omelette ! Tiens, Spark, il me prend des envies de m'asseoir sur un parapet, de regarder couler la rivière, et de me mettre à compter un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, et ainsi de suite jusqu'au jour de ma mort.
Oh ! s'il y avait un diable dans le ciel ! s'il y avait un enfer, comme je me brûlerais la cervelle pour aller voir tout ça ! Quelle misérable chose que l'homme ! ne pas pouvoir seulement sauter par sa fenêtre sans se casser les jambes ! être obligé de jouer du violon dix ans pour devenir un musicien passable ! Apprendre pour être peintre, pour être palefrenier ! Apprendre pour faire une omelette ! Tiens, Spark, il me prend des envies de m'asseoir sur un parapet, de regarder couler la rivière, et de me mettre à compter un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, et ainsi de suite jusqu'au jour de ma mort.
 
 
SPARK
Ce que tu dis là ferait rire bien des gens ; moi, cela me fait frémir : c'est l'histoire du siècle entier. L'éternité est une grande aire, d'où tous les siècles, comme de jeunes aiglons, se sont envolés tour à tour pour traverser le ciel et disparaître ; le nôtre est arrivé à son tour au bord du nid ; mais on lui a coupé les ailes, et il attend la mort en regardant l'espace dans lequel il ne peut s'élancer.
FANTASIO, chantant :
 
Ce que tu dis là ferait rire bien des gens ; moi, cela me fait frémir : c'est l'histoire du siècle entier. L'éternité est une grande aire, d'où tous les siècles, comme de jeunes aiglons, se sont envolés tour à tour pour traverser le ciel et disparaître ; le nôtre est arrivé à son tour au bord du nid ; mais on lui a coupé les ailes, et il attend la mort en regardant l'espace dans lequel il ne peut s'élancer.
Tu m'appelles ta vie, appelle-moi ton âme,
 
Car l'âme est immortelle, et la vie est un jour.
 
Connais-tu une plus divine romance que celle-là, Spark ? 15C'est une romance portugaise. Elle ne m'est jamais venue à l'esprit sans me donner envie d'aimer quelqu'un.
FANTASIO, ''chantant'' :
 
:''Tu m'appelles ta vie, appelle-moi ton âme,''
:''Car l'âme est immortelle, et la vie est un jour.''
 
Connais-tu une plus divine romance que celle-là, Spark ? C'est une romance portugaise. Elle ne m'est jamais venue à l'esprit sans me donner envie d'aimer quelqu'un.
 
 
SPARK
 
Qui, par exemple ?
Qui, par exemple ?
 
 
FANTASIO
 
Qui ? je n'en sais rien ; quelque belle fille toute ronde comme les femmes de Miéris ; quelque chose de doux comme le vent d'ouest, de pâle comme les rayons de la lune ; quelque chose de pensif comme ces petites servantes d'auberge des tableaux flamands qui donnent le coup de l'étrier à un voyageur à larges bottes, droit comme un piquet sur un grand cheval blanc. Quelle belle chose que le coup de l'étrier ! une jeune femme sur le pas de sa porte, le feu allumé qu'on aperçoit au fond de la chambre, le souper préparé ; les enfants endormis ; toute la tranquillité de la vie paisible et contemplative dans un coin du tableau ! et là l'homme encore haletant, mais ferme sur la selle, ayant fait vingt lieues, en ayant trente à faire ; une gorgée d'eau-de-vie, et adieu. La nuit est profonde là-bas, le temps menaçant, la forêt dangereuse ; la bonne femme le suit des yeux une minute, puis elle laisse tomber, en retournant à son feu, cette sublime aumône du pauvre : Que Dieu le protège !
Qui ? je n'en sais rien ; quelque belle fille toute ronde comme les femmes de Miéris ; quelque chose de doux comme le vent d'ouest, de pâle comme les rayons de la lune ; quelque chose de pensif comme ces petites servantes d'auberge des tableaux flamands qui donnent le coup de l'étrier à un voyageur à larges bottes, droit comme un piquet sur un grand cheval blanc. Quelle belle chose que le coup de l'étrier ! une jeune femme sur le pas de sa porte, le feu allumé qu'on aperçoit au fond de la chambre, le souper préparé ; les enfants endormis ; toute la tranquillité de la vie paisible et contemplative dans un coin du tableau ! et là l'homme encore haletant, mais ferme sur la selle, ayant fait vingt lieues, en ayant trente à faire ; une gorgée d'eau-de-vie, et adieu. La nuit est profonde là-bas, le temps menaçant, la forêt dangereuse ; la bonne femme le suit des yeux une minute, puis elle laisse tomber, en retournant à son feu, cette sublime aumône du pauvre : Que Dieu le protège !
 
 
SPARK
 
Si tu étais amoureux, Henri, tu serais le plus heureux des hommes.
Si tu étais amoureux, Henri, tu serais le plus heureux des hommes.
 
 
FANTASIO
L'amour n'existe plus, mon cher ami. La religion, sa nourrice, a les mamelles pendantes comme une vieille bourse au fond de laquelle il y a un gros sou. L'amour est 16une hostie qu'il faut briser en deux au pied d'un autel et avaler ensemble dans un baiser ; il n'y a plus d'autel, il n'y a plus d'amour. Vive la nature ! il y a encore du vin.
 
L'amour n'existe plus, mon cher ami. La religion, sa nourrice, a les mamelles pendantes comme une vieille bourse au fond de laquelle il y a un gros sou. L'amour est 16une hostie qu'il faut briser en deux au pied d'un autel et avaler ensemble dans un baiser ; il n'y a plus d'autel, il n'y a plus d'amour. Vive la nature ! il y a encore du vin.
Il boit.
 
:''Il boit.''
 
 
SPARK
 
Tu vas te griser.
Tu vas te griser.
 
 
FANTASIO
 
Je vais me griser, tu l'as dit.
Je vais me griser, tu l'as dit.
 
 
SPARK
 
Il est un peu tard pour cela.
Il est un peu tard pour cela.
 
 
FANTASIO
 
Qu'appelles-tu tard ? Midi, est-ce tard ? minuit, est-ce de bonne heure ? Où prends-tu la journée ? Restons là, Spark, je t'en prie. Buvons, causons, analysons, déraisonnons, faisons de la politique ; imaginons des combinaisons de gouvernement ; attrapons tous les hannetons qui passent autour de cette chandelle, et mettons-les dans nos poches. Sais-tu que les canons à vapeur sont une belle chose en matière de philanthropie ?
Qu'appelles-tu tard ? Midi, est-ce tard ? minuit, est-ce de bonne heure ? Où prends-tu la journée ? Restons là, Spark, je t'en prie. Buvons, causons, analysons, déraisonnons, faisons de la politique ; imaginons des combinaisons de gouvernement ; attrapons tous les hannetons qui passent autour de cette chandelle, et mettons-les dans nos poches. Sais-tu que les canons à vapeur sont une belle chose en matière de philanthropie ?
 
 
SPARK
 
Comment l'entends-tu ?
Comment l'entends-tu ?
 
 
FANTASIO
Il y avait une fois un roi qui était très-sage, très-sage, très-heureux, très-heureux...
 
 
SPARK
 
Après ?
Après ?
 
 
FANTASIO
 
La seule chose qui manquait à son bonheur, c'était d'avoir des enfants. Il fit faire des prières publiques dans toutes les mosquées.
La seule chose qui manquait à son bonheur, c'était d'avoir des enfants. Il fit faire des prières publiques dans toutes les mosquées.
 
 
SPARK
 
A quoi en veux-tu venir ?
A quoi en veux-tu venir ?
 
 
FANTASIO
 
Je pense à mes chères Mille et Une Nuits. C'est comme cela qu'elles commencent toutes. - Tiens, Spark, je suis gris. Il faut que je fasse quelque chose. Tra la, tra 17la ! Allons, levons-nous ! (Un enterrement passe.) Ohé ! braves gens, qui enterrez-vous là ? Ce n'est pas maintenant l'heure d'enterrer proprement.
Je pense à mes chères Mille et Une Nuits. C'est comme cela qu'elles commencent toutes. - Tiens, Spark, je suis gris. Il faut que je fasse quelque chose. Tra la, tra 17la ! Allons, levons-nous ! (''Un enterrement passe''.) Ohé ! braves gens, qui enterrez-vous là ? Ce n'est pas maintenant l'heure d'enterrer proprement.
 
 
LES PORTEURS
 
Nous enterrons Saint-Jean.
Nous enterrons Saint-Jean.
 
 
FANTASIO
 
Saint-Jean est mort ? le bouffon du roi est mort ? Qui a pris sa place ? le ministre de la justice ?
Saint-Jean est mort ? le bouffon du roi est mort ? Qui a pris sa place ? le ministre de la justice ?
 
 
LES PORTEURS
Sa place est vacante, vous pouvez la prendre si vous voulez.
 
Sa place est vacante, vous pouvez la prendre si vous voulez.
Ils sortent.
 
:''Ils sortent.''
 
 
SPARK
 
Voilà une insolence que tu t'es bien attirée. A quoi penses-tu, d'arrêter ces gens ?
Voilà une insolence que tu t'es bien attirée. A quoi penses-tu, d'arrêter ces gens ?
 
 
FANTASIO
 
Il n'y a rien là d'insolent. C'est un conseil d'ami que m'a donné cet homme, et que je vais suivre à l'instant.
Il n'y a rien là d'insolent. C'est un conseil d'ami que m'a donné cet homme, et que je vais suivre à l'instant.
 
 
SPARK
 
Tu vas te faire bouffon de cour ?
Tu vas te faire bouffon de cour ?
 
 
FANTASIO
 
Cette nuit même, si l'on veut de moi. Puisque je ne puis coucher chez moi, je veux me donner la représentation de cette royale comédie qui se jouera demain, et de la loge du roi lui-même.
Cette nuit même, si l'on veut de moi. Puisque je ne puis coucher chez moi, je veux me donner la représentation de cette royale comédie qui se jouera demain, et de la loge du roi lui-même.
 
 
SPARK
 
Comme tu es fin ! On te reconnaîtra, et les laquais te mettront à la porte ; n'es-tu pas filleul de la feue reine ?
Comme tu es fin ! On te reconnaîtra, et les laquais te mettront à la porte ; n'es-tu pas filleul de la feue reine ?
 
 
FANTASIO
Comme tu es bête ! je me mettrai une bosse et une perruque rousse comme la portait Saint-Jean, et personne ne me reconnaîtra, quand j'aurais trois douzaines de parrains à mes trousses. (Il frappe à une boutique.) Hé ! brave 18homme, ouvrez-moi, si vous n'êtes pas sorti, vous, votre femme et vos petits chiens !
UN TAILLEUR, ouvrant la boutique
 
Comme tu es bête ! je me mettrai une bosse et une perruque rousse comme la portait Saint-Jean, et personne ne me reconnaîtra, quand j'aurais trois douzaines de parrains à mes trousses. (''Il frappe à une boutique''.) Hé ! brave 18homme, ouvrez-moi, si vous n'êtes pas sorti, vous, votre femme et vos petits chiens !
Que demande Votre Seigneurie ?
 
 
UN TAILLEUR, ''ouvrant la boutique''
 
Que demande Votre Seigneurie ?
 
 
FANTASIO
 
N'êtes-vous pas tailleur de la cour ?
N'êtes-vous pas tailleur de la cour ?
 
 
LE TAILLEUR
 
Pour vous servir.
Pour vous servir.
 
 
FANTASIO
 
Est-ce vous qui habilliez Saint-Jean ?
Est-ce vous qui habilliez Saint-Jean ?
 
 
LE TAILLEUR
 
Oui, monsieur.
Oui, monsieur.
 
 
FANTASIO
 
Vous le connaissiez ? Vous savez de quel côté était sa bosse, comment il frisait sa moustache, et quelle perruque il portait ?
Vous le connaissiez ? Vous savez de quel côté était sa bosse, comment il frisait sa moustache, et quelle perruque il portait ?
 
 
LE TAILLEUR
 
Hé, hé ! monsieur veut rire.
Hé, hé ! monsieur veut rire.
 
 
FANTASIO
Homme, je ne veux point rire ; entre dans ton arrière-boutique : et si tu ne veux être empoisonné demain dans ton café au lait, songe à être muet comme la tombe sur tout ce qui va se passer ici.
 
Homme, je ne veux point rire ; entre dans ton arrière-boutique : et si tu ne veux être empoisonné demain dans ton café au lait, songe à être muet comme la tombe sur tout ce qui va se passer ici.
Il sort avec le tailleur ; Spark le suit.
 
:''Il sort avec le tailleur ; Spark le suit.''
 
 
19
Scène 3
 
Une auberge sur la route de Munich.
 
 
===I, 3===
Entrent le Prince de Mantoue et Marinoni.
 
''Une auberge sur la route de Munich.''
 
''Entrent le Prince de Mantoue et Marinoni.''
 
LE PRINCE
 
Eh bien, colonel ?
MARINONI