« Charlotte Corday (Michel Corday) » : différence entre les versions

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Mais voici la preuve capitale à mon sens. Drouet, comme délégué du Comité de Sûreté générale, s’est transporté chez Marat, puis il a conduit Charlotte Corday à l’Abbaye. À la Convention, le 14 juillet, il rend compte de sa mission. Il succède à la tribune à Chabot, qui à raconté ce qu’il a vu chez Marat. Drouet débute ainsi : « Je ne parlerai pas de ce qui s’est passé chez Marat. J’ai conduit l’assassin à l'Abbaye… » Il rapporte la fureur du peuple, les mots qu’il a prononcés pour l’apaiser. À aucun moment il n’est question d’une halte, d’un nouvel interrogatoire. Évidemment, le fiacre a été droit de la rue des Cordeliers (actuellement rue de l’École-de-Médecine) à Saint-Germain-des-Prés. Il n’a pas fait le long détour des Tuileries, où siégeait le Comité de Sûreté générale. Tous
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Tous ses vêtements avaient été saisis. (Page 130.)
 
 
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«Et attendu que les dits effets sont les seuls étant dans la dite chambre, les avons pliés dans une serviette ouvrée, marquée de la lettre B, que nous avons aussi trouvée dans la dite chambre, et sur lequel paquet nous avons apposé notre cachet de commissaire, en deux endroits, pour être transmis au département de police. » Le
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Le 16 juillet, un garçon de la mairie apporta ce paquet au Greffe de la Conciergerie. Ce dépôt fut enregistré en ces termes :
 
 
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« Vous avez désiré, citoyen, le détail de mon voyage. Je ne vous ferai point grâce de la moindre anecdote. J’étais avec de bons Montagnards que je laissai parler tout leur content,et
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et leurs propos aussi sots que leurs personnes étant désagréables, ne servirent pas peu à m’endormir ; je ne me réveillai pour ainsi dire qu'à Paris. Un de nos voyageurs, qui aime sans doute les femmes dormantes, me prit pour la fille d’un de ses anciens amis, me supposa une fortune que je n’ai pas, me donna un nom que je n’avais jamais entendu, et enfin m'offrit sa fortune et sa main. Quand je fus ennuyée de ses propos : Nous jouons parfaitement la comédie, lui dis-je, il est malheureux avec autant de talent de n’avoir point de spectateurs ; je vais chercher nos compagnons de voyage, pour qu’ils prennent leur part du divertissement. Je le laissai de bien mauvaise humeur. La nuit, il chanta des chansons plaintives, propres à exciter le sommeil ; je le quittai enfin à Paris, refusant de lui donner mon adresse ni celle de mon père à qui il voulait me demander ; il me quitta de bien mauvaise humeur. j’ignorais que ces messieurs eussent interrogé les voyageurs, et je soutins ne les connaître aucuns pour ne point leur donner le désagrément de s’expliquer. Je suivais en cela mon oracle Raynal, qui dit qu’on ne doit pas la vérité à ses tyrans. C’est par la voyageuse qui était avec moi que l’on a su que je vous
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vous connaissais et que j'avais parlé à Duperret. Vous connaissez l’âme ferme de Duperret, il leur a répondu l’exacte vérité. J’ai confirmé sa déposition par la mienne ; il n’y a rien contre lui, mais sa fermeté est un crime. Je craignais, je l’avoue, qu’on ne découvrit que je lui avais parlé ; je m’en repentis trop tard ; je voulus le réparer en l’engageant à vous aller retrouver ; il est trop décidé pour se laisser engager. Sûre de son innocence et de celle de tout le monde, je me décidai à l’exécution de mon projet. Le croiriez-vous, Fauchet est en prison comme mon complice, lui qui ignorait mon existence ; mais on n'est guère content de n’avoir qu’une femme sans conséquence à offrir aux mânes de ce grand homme. Pardon, ô humains, ce mot déshonore votre espèce ; c'était une bête féroce qui allait dévorer le reste de la France par le feu de la guerre civile. Maintenant, vive la Paix ! Grâce au ciel, il n’était pas né Français. Quatre membres se trouvèrent à mon premier interrogatoire ; Chabot avait l’air d’un fou. Legendre voulait m’avoir vue le matin chez lui ; moi qui n’ai jamais songé à cet homme, je ne lui crois pas d’assez grands moyens pour être le tyran de son pays et je ne prétendais pas punir
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punir tant de monde. Tous ceux qui me voyaient pour la première fois prétendaient me connaître de longtemps. Je crois que l’on a imprimé les dernières paroles de Marat ; je doute qu'il en ait proféré ; mais voilà les dernières qu'il m'a dites. Après avoir écrit vos noms à tous, et ceux des administrateurs du Calvados qui sont à Évreux, il me dit, pour me consoler, que dans peu de jours il vous ferait tous guillotiner à Paris. Ces derniers mots décidèrent de son sort. Si le département met sa figure vis-à-vis celle de Saint-Fargeau, il pourra faire graver ses paroles en lettres d’or. Je ne vous ferai aucun détail sur ce grand événement, les journaux vous en parleront. J’avoue que ce qui m’a décidée tout à fait, c’est le courage avec lequel nos volontaires se sont enrôlés dimanche 7 juillet, vous vous souvenez comme j’en étais charmée, et je me promettais bien de faire repentir Pétion des soupçons qu’il manifesta sur mes sentiments. « Est-ce que vous seriez fâchée s’ils ne partaient pas ? » me dit-il. Enfin donc j’ai considéré que tant de braves gens venant pour avoir la tête d’un seul homme qu’ils auraient manqué ou qui aurait entraîné dans sa perte beaucoup de bons citoyens, il ne méritait pas tant
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tant d'honneur, suffisait de la main d’une femme. J’avoue que j’ai employé un artifice perfide pour l’attirer à me recevoir ; tous les moyens sont bons dans une telle circonstance. Je comptais en partant de Caen le sacrifier sur la cime de sa Montagne ; mais il n’allait plus à la Convention. Je voudrais avoir conservé votre lettre ; on aurait mieux connu que je n’avais pas de complice ; enfin, cela s’éclaircira. Nous sommes si bons républicains à Paris que l’on ne conçoit pas comment une femme inutile dont la plus longue vie serait bonne à rien, peut se sacrifier de sang-froid pour sauver tout son pays. Je m'attendais bien à mourir dans l'instant ; des hommes courageux et vraiment au-dessus de tout éloge m'ont préservée de la fureur bien excusable des malheureux que j'avais faits. Comme j'étais vraiment de sang-froid, je souffris des cris de quelques femmes ; mais qui sauve la Patrie ne s’aperçoit point de ce qu'il en coûte. Puisse la Paix s’établir aussitôt que je la désire ; voilà un grand préliminaire, sans cela, nous ne l’aurions jamais eue. Je jouis délicieusement de la Paix depuis deux jours ; le bonheur de mon pays fait le mien. Il n’est point de dévouement dont on ne retire plus de jouissance qu’il n’
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enn’en coûte de s’y décider. Je ne doute pas que l’on ne tourmente un peu mon père qui a déjà bien assez de ma perte pour l’affliger. Si l’on y trouve mes lettres, la plupart sont 95 portraits. S'il s’y trouvait quelques plaisanteries sur votre compte, je vous prie de me les passer ; je suivais la légèreté de mon caractère. Dans ma dernière lettre je lui faisais croire que, redoutant les horreurs de la guerre civile, je me retirais en Angleterre. Alors mon projet était de garder l’incognito, de tuer Marat publiquement et mourant aussitôt, laisser les Parisiens chercher inutilement mon nom. Je vous prie, citoyen, vous et vos collègues, de prendre la défense de mes parents et amis si on les inquiète ; je ne dis rien à mes chers amis Aristocrates, je conserve leur souvenir dans mon cœur. Je n’ai jamais haï qu’un seul être et j’ai fait voir avec quelle violence ; mais il en est mille que j'aime encore plus que je ne le haïssais. Une imagination vive, un cœur sensible, promettent une vie bien orageuse ; je prie ceux qui me regretteraient de le considérer et ils se réjouiront de me voir jouit du repos dans les Champs-Elysées avec Brutus et quelques anciens. Pour les modernes, il est peu de vrais patriotes qui sachent mourir pour leur
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leur pays; presque tout est égoïsme. Quel triste peuple pour fonder une République. Il faut du moins fonder la Paix et le gouvernement viendra comme il pourra ; du moins ce ne sera pas la Montagne qui régnera si l’on m'en croit. Je suis on ne peut mieux dans ma prison ; les concierges sont les meilleurs gens possible. On m’a donné des gens d’armes pour me préserver de l’ennui : j’ai trouvé cela fort bien pour le jour et fort mal pour la nuit. Je me suis plainte de cette indécence, le Comité n’a pas jugé à propos d’y faire attention. Je crois que c’est de l’invention de Chabot, il n’y a qu’un capucin qui puisse avoir de telles idées. Je passe mon temps à écrire des chansons, je donne le dernier couplet de celle de Valady à tous ceux qui le veulent. Je promets à tous les Parisiens que nous ne prenons les armes que contre l’anarchie, ce qui est exactement vrai.
 
 
« Ici l’on m'a transférée à la Conciergerie, et ces messieurs du grand jury m'ont promis de vous envoyer ma lettre ; je continue donc. J'ai prêté un long interrogatoire ; je vous prie de vous le procurer s’il est rendu public. J’avais une Adresse sur moi, lors de mon arrestation, aux
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aux Amis de la Paix; je ne puis vous l’envoyer ; j'en demanderai la publication, je crois bien en vain. J'avais eu une idée hier au soir, de faire hommage de mon portrait au département du Calvados ; mais le Comité de Salut Public, à qui je l’avais demandé, ne m’a point répondu ; et maintenant il est trop tard. Je vous prie, Citoyen, de faire part de ma lettre au citoyen Bougon, procureur-général-syndic du département ; je ne la lui adresse pas pour plusieurs raisons. D’abord je ne suis pas sûre que dans ce moment il soit à Évreux ; je crains de plus qu’étant naturellement sensible, il ne soit affligé de ma mort. Je le crois cependant assez bon citoyen pour se consoler par l’espoir de la Paix. Je sais combien il la désire et j'espère qu’en la facilitant, j’ai rempli ses vœux. Si quelques amis demandaient communication de cette lettre, je vous prie de ne la refuser à personne. Il faut un défenseur, c’est la règle. J’ai pris le mien sur la Montagne : c’est Gustave Doulcet. J'imagine qu'il refusera cet honneur. J’ai pensé demander Robespierre ou Chabot. Je demanderai à disposer du reste de mon argent, et alors je l’offre aux femmes et enfants des braves habitants de Caen partis pour délivrer Paris. Il est bien étonnant
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étonnant que le peuple m’ait laissé conduire de l’Abbaye à la Conciergerie. C’est une preuve nouvelle de sa modération. Dites-le à nos bons habitants de Caen ; ils se permettent quelquefois de petites insurrections que l’on ne contient pas si facilement. C’est demain, à huit heures, que l’on me juge ; probablement à midi, j'aurai vécu, pour parler le langage romain. On doit croire à la valeur des habitants du Calvados, puisque les femmes même de ce pays sont capables de fermeté ; au reste, j'ignore comment se passeront les derniers moments et c’est la fin qui couronne l’œuvre. Je n’ai point besoin d’affecter d’insensibilité sur mon sort, car jusqu'à cet instant je n'ai pas la moindre crainte de la mort. Je n’estimai jamais la vie que par l'utilité dont elle devait être. J'espère que demain Duperret et Fauchet seront mis en liberté ; on prétend que ce dernier m’a conduite à la Convention, dans une tribune. De quoi se mêle-t-il d’y conduire des femmes ? Comme député, il ne devait point être aux tribunes, et comme évêque il ne devait point être avec des femmes. Ainsi, c’est une petite correction ; mais Duperret n’a aucun reproche à se faire. Marat n'ira point au Panthéon ; il le méritait pourtant bien. Je vous
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vous charge de recueillir les pièces propres à faire son oraison funèbre. J'espère que vous n’abandonnerez point l’affaire de Mlle Forbin ; voici son adresse s’il est besoin de lui écrire : Alexandrine Forbin à Mandresie, par Zurich en Suisse. Je vous prie de lui dire que je l’aime de tout mon cœur, Je vais écrire un mot à Papa ; je ne dis rien à nos autres amis ; je ne leur demande qu’un prompt oubli, leur affliction déshonorerait ma mémoire. Dites au général Wimpffen que je crois lui avoir aidé à gagner plus d’une bataille, en facilitant la Paix. Adieu citoyen : je me recommande au souvenir des vrais Amis de la Paix.
 
 
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Sur son passage dans cette prison, j’ai trouvé dans les dossiers Vatel, en trois endroits, la trace
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trace d’une anecdote pourtant peu répandue. Dans un couloir obscur, Charlotte aurait marché sur la patte d’un petit chat. La bête ayant miaulé de douleur, Charlotte se serait écriée : « Ah ! cela me fait plus de peine que d’avoir tué Marat! » Il y a là un effet de contraste facile, qui rend le trait suspect.
 
 
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« J’ai l'honneur de vous faire part que Marie Anne-Charlotte Corday, prévenue d’assassinat en la personne de Marat, vous a choisi pour son conseil, nonobstant l’observation qui lui a été faite, tant par le président que par moi, qu’un député ne pouvait pas être son conseil, attendu qu'il était obligé à son poste ; mais nommé je dois vous en faire part et que la cause
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cause est indiquée à demain huit heures précises ; je vous observe de plus que, prévoyant qu’il serait possible que vos affaires ne vous permissent pas de vous rendre à cette invitation, j’ai fait nommer un conseil-adjoint.
 
 
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Parmi ces jurés figurait le magistrat Fualdès, qui fut assassiné en 1817. Cette retentissante affaire est toujours restée mystérieuse. Une légende est née : Fualdès se serait engagé à sauver ou à faire évader Charlotte Corday ; n’ayant point tenu sa promesse, il aurait payé de sa mort, vingt-quatre ans plus tard, cette sorte de trahison. C’est bien invraisemblable. Montané fit
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Montané fit d'ailleurs confusion. (Page 143.)
 
 
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Un conservateur de musée à qui je soumettais cette remarque, me dit spirituellement : « C’est un faux en peinture publique. » Le
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'''Le peintre se nommait Jean-Jacques Hauer.''' (Page 150.)
 
 
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Marie-Anne-Charlotte Corday, peinte d’après nature, allant au supplice, par Brard. Et
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Et ces deux vers, sur une bande de papier :
 
 
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J'ai retrouvé dans les papiers d’Anatole France des coupures de journaux de 1890, annotées par lui et toutes relatives à ce crâne, depuis le massif article du Temps jusqu’à la légère fantaisie de la Vie parisienne. Retenons simplement
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simplement ce symbole de la curiosité qu’inspirait encore, après un siècle, la mémoire de Charlotte Corday.
 
 
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J’ai longuement réfléchi sur cette question. Je crois avoir été des premiers, dans le roman, à étudier le retentissement de la vie sexuelle sur la vie tout court. Six ouvrages… Je le rappelle sans fausse modestie et peut-être opportunément, car beaucoup de ceux qui devraient s’en souvenir semblent l’avoir oublié. En tout cas, cela me donne le droit de vote. Mon opinion s’est lentement formée : je ne crois pas que la chasteté retentisse profondément sur la santé morale. Ceux qui s’y tiennent s’en accommodent impunément. Un cloître n’est pas plus fou qu’un harem. Il y a des modes pour la science comme pour le vêtement ;
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vêtement ; aujourd'hui, la vie sexuelle est tout ; demain, elle ne sera rien. La vérité est médiane.