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l’énergie individuelle. Le jeune Richard Fenwick ne trouve ni en lui, ni autour de lui les moyens de lutter contre les difficultés, les surprises, les périls de la vie, aggravés par les risques et les hasards d’une carrière d’artiste. Dans ''Fenwick’s Career <ref> ''Carrière d’artiste'', traduction française de Th. Bentzon et A. Fliche (Hachette). </ref>, Phœbe et Richard sont de jeunes âmes trop frustes et trop dépourvues pour tenir contre les exigences compliquées de la société et de l’art. Mme Ward leur a opposé Eugénie de Pastourelles et Welby, avec leurs délicatesses, leurs raffinemens et leurs nuances, leur tenue aussi et cette souplesse résistante que donnent une longue culture et des siècles d’adaptation. John et Phœbe ont fait souffrir ; ils ont souffert et payé d’épreuves sans nombre leur ignorance de toutes choses, la naïveté de leurs élans, la force de leurs instincts naturels, que rien ne contrôle, ni ne retient. C’est le seul roman de Mme Humphry Ward dont le principal personnage n’appartienne pas au « monde, » et nous voyons mieux ainsi la part respective qu’elle attribue, dans l’harmonie finale où l’amour tend comme tout le reste, à l’individu et à la société. Le jeune couple a contre lui d’ailleurs sa jeunesse même, et ici encore nous retrouvons Mme Ward d’accord avec la tradition des romanciers anglais. Ils sont généralement sévères pour la témérité dans le mariage ; ils nous montrent volontiers les faillites des unions prématurées. La sagesse pratique et le sens positif de ce peuple ont créé chez lui une disposition des mœurs à regarder le mariage, — précisément parce qu’il devient un choix individuel, un acte d’initiative, — comme engageant à fond la responsabilité de l’homme. Le premier devoir de celui-ci, avant de fonder une famille, est de s’assurer les moyens de la faire vivre, de même qu’il doit, avant de lier à sa destinée celle d’une femme, être capable de les diriger. Il paie cher, dans les romans anglais, le manquement à l’une ou à l’autre de ces obligations, combien plus encore à toutes les deux !
l’énergie individuelle. Le jeune Richard Fenwick ne trouve ni en lui, ni autour de lui les moyens de lutter contre les difficultés, les surprises, les périls de la vie, aggravés par les risques et les hasards d’une carrière d’artiste. Dans ''Fenwick’s Career<ref> ''Carrière d’artiste'', traduction française de Th. Bentzon et A. Fliche (Hachette).</ref>, Phœbe et Richard sont de jeunes âmes trop frustes et trop dépourvues pour tenir contre les exigences compliquées de la société et de l’art. {{Mme}} Ward leur a opposé Eugénie de Pastourelles et Welby, avec leurs délicatesses, leurs raffinemens et leurs nuances, leur tenue aussi et cette souplesse résistante que donnent une longue culture et des siècles d’adaptation. John et Phœbe ont fait souffrir ; ils ont souffert et payé d’épreuves sans nombre leur ignorance de toutes choses, la naïveté de leurs élans, la force de leurs instincts naturels, que rien ne contrôle, ni ne retient. C’est le seul roman de {{Mme}} Humphry Ward dont le principal personnage n’appartienne pas au « monde, » et nous voyons mieux ainsi la part respective qu’elle attribue, dans l’harmonie finale où l’amour tend comme tout le reste, à l’individu et à la société. Le jeune couple a contre lui d’ailleurs sa jeunesse même, et ici encore nous retrouvons {{Mme}} Ward d’accord avec la tradition des romanciers anglais. Ils sont généralement sévères pour la témérité dans le mariage ; ils nous montrent volontiers les faillites des unions prématurées. La sagesse pratique et le sens positif de ce peuple ont créé chez lui une disposition des mœurs à regarder le mariage, — précisément parce qu’il devient un choix individuel, un acte d’initiative, — comme engageant à fond la responsabilité de l’homme. Le premier devoir de celui-ci, avant de fonder une famille, est de s’assurer les moyens de la faire vivre, de même qu’il doit, avant de lier à sa destinée celle d’une femme, être capable de les diriger. Il paie cher, dans les romans anglais, le manquement à l’une ou à l’autre de ces obligations, combien plus encore à toutes les deux !


L’amour trouve un précieux auxiliaire dans l’amitié, et les romans de Mme Ward nous présentent de très belles figures d’amis ou d’amies, dont l’intelligence et le dévouement écartent bien des obstacles et contribuent pour leur part à ces victoires finales des forces de la vie. La littérature anglaise a toujours fait une large part à ce sentiment, et sans remonter aux sonnets de
L’amour trouve un précieux auxiliaire dans l’amitié, et les romans de {{Mme}} Ward nous présentent de très belles figures d’amis ou d’amies, dont l’intelligence et le dévouement écartent bien des obstacles et contribuent pour leur part à ces victoires finales des forces de la vie. La littérature anglaise a toujours fait une large part à ce sentiment, et sans remonter aux sonnets de