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des années, après, à Ravenne, il fut pris par la mort à la gorge, au moment même où la bataille était gagnée et tout péril passé, lorsque Gaston de Foix, emporté par son ardeur méridionale, alla s’engager sur une étroite chaussée pour donner la chasse aux ennemis qui s’en retournaient déconfits sans se douter que l’impatience irréfléchie d’un héros allait leur offrir la bonne fortune de venger leur défaite sur la personne de leur vainqueur. Il mourut au moment même de son propre triomphe, car on peut dire en un certain sens que cette journée fut son œuvre. C’est lui qui, au début de l’action, avisant une certaine manœuvre d’artillerie, fît perdre patience aux Espagnols, qui avaient résolu d’attendre dans leur camp que les Français vinssent les assaillir. Le nom de Gaston de Foix reste justement attaché à cette journée célèbre, mais c’est justice aussi de rendre une part de cette gloire au capitaine plus modeste qui força la main de la fortune, et conduisit au-devant de Gaston l’occasion de la victoire.
des années, après, à Ravenne, il fut pris par la mort à la gorge, au moment même où la bataille était gagnée et tout péril passé, lorsque Gaston de Foix, emporté par son ardeur méridionale, alla s’engager sur une étroite chaussée pour donner la chasse aux ennemis qui s’en retournaient déconfits sans se douter que l’impatience irréfléchie d’un héros allait leur offrir la bonne fortune de venger leur défaite sur la personne de leur vainqueur. Il mourut au moment même de son propre triomphe, car on peut dire en un certain sens que cette journée fut son œuvre. C’est lui qui, au début de l’action, avisant une certaine manœuvre d’artillerie, fît perdre patience aux Espagnols, qui avaient résolu d’attendre dans leur camp que les Français vinssent les assaillir. Le nom de Gaston de Foix reste justement attaché à cette journée célèbre, mais c’est justice aussi de rendre une part de cette gloire au capitaine plus modeste qui força la main de la fortune, et conduisit au-devant de Gaston l’occasion de la victoire.


Des souvenirs de tout autre nature s’éveillent dans la mémoire au nom de la seconde de ces alliances, Louise Borgia, duchesse de Valentinois, car ce nom est celui de la propre fille de ce profond et terrible César Borgia, fils d’Alexandre {{rom-maj|VI|6}}, le grand politique de Machiavel et le dandy fascinateur du portrait de Raphaël à la galerie Borghèse. Louise Borgia, qui par sa mère appartenait à la maison d’Albret, vivait à la cour de France, où peut-être elle était vue avec quelque froideur, tant pour ce qu’elle était orpheline, et par conséquent sans soutien, que pour les souvenirs que son père avait laissés. Ce qui pourrait le faire croire, c’est le singulier mariage auquel consentit pour elle Louise de Savoie, la mère de François {{Ier}}, qui était sa tutrice. Elle était toute jeune, presque encore enfant, lorsque le vieux capitaine Louis de La Trémouille, après la mort de son fils aîné tué à Marignan et de sa femme Gabrielle de Bourbon, eut l’étrange courage de la demander en mariage. Louis de La Trémouille était alors, il est vrai, chargé de gloire, mais il était aussi chargé d’années, car il y avait beaux jours qu’il avait gagné pour le compte d’Anne de Beaujeu la bataille de Saint-Aubin. Louise Borgia répondit tranquillement et froidement, comme une personne qui n’est pas sa maîtresse, que son vouloir était entre les mains de la régente, et que, si cette alliance lui était ordonnée, elle en serait très honorée. En recueillant ses souvenirs, le vieux capitaine aurait reconnu que ce n’était pas précisément avec cette froideur respectueuse que quarante ans auparavant sa première femme, Gabrielle de Bourbon, l’avait accepté pour mari. Son panégyriste, Jean Bouchet, dans sa charmante et romanesque ''Chronique du chevalier sans reproche'', nous a raconté ce premier amour. Que de flammes alors, maintenant que de cendres ! En dépit de ses soixante ans (son {{tiret|pan|négyriste}}
Des souvenirs de tout autre nature s’éveillent dans la mémoire au nom de la seconde de ces alliances, Louise Borgia, duchesse de Valentinois, car ce nom est celui de la propre fille de ce profond et terrible César Borgia, fils d’Alexandre {{rom-maj|VI|6}}, le grand politique de Machiavel et le dandy fascinateur du portrait de Raphaël à la galerie Borghèse. Louise Borgia, qui par sa mère appartenait à la maison d’Albret, vivait à la cour de France, où peut-être elle était vue avec quelque froideur, tant pour ce qu’elle était orpheline, et par conséquent sans soutien, que pour les souvenirs que son père avait laissés. Ce qui pourrait le faire croire, c’est le singulier mariage auquel consentit pour elle Louise de Savoie, la mère de François {{Ier}}, qui était sa tutrice. Elle était toute jeune, presque encore enfant, lorsque le vieux capitaine Louis de La Trémouille, après la mort de son fils aîné tué à Marignan et de sa femme Gabrielle de Bourbon, eut l’étrange courage de la demander en mariage. Louis de La Trémouille était alors, il est vrai, chargé de gloire, mais il était aussi chargé d’années, car il y avait beaux jours qu’il avait gagné pour le compte d’Anne de Beaujeu la bataille de Saint-Aubin. Louise Borgia répondit tranquillement et froidement, comme une personne qui n’est pas sa maîtresse, que son vouloir était entre les mains de la régente, et que, si cette alliance lui était ordonnée, elle en serait très honorée. En recueillant ses souvenirs, le vieux capitaine aurait reconnu que ce n’était pas précisément avec cette froideur respectueuse que quarante ans auparavant sa première femme, Gabrielle de Bourbon, l’avait accepté pour mari. Son panégyriste, Jean Bouchet, dans sa charmante et romanesque ''Chronique du chevalier sans reproche'', nous a raconté ce premier amour. Que de flammes alors, maintenant que de cendres ! En dépit de ses soixante ans (son {{tiret|pa|négyriste}}