« Historiens modernes de la France/Augustin Thierry » : différence entre les versions

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{{journal|[[Revue des Deux Mondes]], tome 26, 1841|[[Charles Magnin]]|Historiens modernes de la France. – Augustin Thierry}}
 
Lorsqu’il y a vingt ans environ une sorte de réaction et de révolte éclata tout à coup contre la pâle et terne littérature que nous avait léguée l’empire, on ne se borna pas à demander le rajeunissement du système poétique; on s’efforça encore de faire pénétrer la réforme dans la méthode historique. En effet, le règne de Napoléon n’avait pas été plus favorable à l’histoire qu’à la poésie. Pendant que le nouveau Charlemagne promenait son épopée ossianique de l’Escurial au Kremlin, écrivant l’histoire avec la pointe de son épée sur la carte de l’Europe, la préoccupation des esprits fascinés par ce spectacle était si complète, qu’il ne restait plus nulle part en France, sauf peut-être dans la seconde classe de l’Institut, d’attention à reporter sur le passé. Comme les individus dans les grandes crises de passions ne sentent que la peine ou la joie présente, la France pendant ce paroxisme de gloire, fut absorbée tout entière par l’effort ou l’émotion de la lutte. Mais quand, après le dénouement funeste de ce drame prodigieux, elle fut retombée dans le calme et eut repris le courant des traditions nationales, elle se trouva, par la conscience même des grandes choses auxquelles elle avait, assisté ou concouru, mieux préparée qu’auparavant à l’intelligence des évènemens de même nature qui se sont accomplis dans l’histoire. Cette active génération de la république et de l’empire qui avait vu des transformations sociales, des démembremens d’états, des chutes et des restaurations de dynasties, des chocs violens de castes et de peuples, cette génération qui avait fait ou avait vu faire, de l’histoire et de la poésie en action, sentit, dans son repos plein de souvenirs, le besoin d’une littérature plus poétique et d’une histoire plus réelle. Les compilations sans couleur de Velly, Garnier, Millot, Anquetil, ne lui parurent qu’une solennelle et insipide déception. La jeunesse surtout se prit d’un dégoût immense pour ces récits uniformes, glacés par l’étiquette moderne, et où toutes les nuances de lieux, de temps et de races disparaissaient sous des formules banales et convenues. Le même besoin d’émotions qui demandait à la poésie de nous donner une plus saisissante et plus vive perception du beau, demandait non moins impérieusement à l’histoire une plus franche et plus sensible manifestation du vrai. Alors aussi Walter Scott dans ''Waverley'' et dans ''Ivanhoe'', et, long-temps avant, un écrivain qu’on trouve toujours sur le seuil des grandes idées de notre siècle, M. de Châteaubriand, par ''les Martyrs'', avaient ajouté l’autorité de leurs exemples à l’impulsion déjà si puissante qui provenait de la disposition des esprits.