« Waterloo, trente-quatre ans après la bataille » : différence entre les versions

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{{titrejournal|Waterloo, trente-quatre ans après la bataille|[[Léon Gozlan]]|[[Revue des Deux Mondes]]|t.3 1849}}
 
Cinq lieues au moins séparent la plaine de Waterloo de la ville de Bruxelles, peu riche, malgré ses faux airs de capitale, en moyens de locomotion rurale. Bruxelles n’a pas, comme Paris, qu’il faut bien lui opposer, puisqu’elle cite toujours Paris, des escadrons volans de diligences et d’onmibus prêts à toute heure du jour et de la nuit à vous conduire dans tous les sens possibles jusqu’aux confins du département. Il faut négocier une journée entière à Bruxelles pour se procurer à un prix assez élevé la voiture convenablement solide et légère qui vous conduira à Waterloo. Ajoutez à cette journée perdue celle qu’exige presque entièrement votre pèlerinage, et l’excursion vous aura pris un temps qui suffirait pour aller deux fois de Bruxelles à Cologne. Le touriste fait ce calcul, regarde sa bourse, exhale un soupir de regret mêlé de résignation, et il ne va pas à Waterloo. Les Anglais, les poètes et les commis voyageurs savent seuls se mettre au-dessus de ces considérations de temps, d’argent et d’espace. A celui qui s’étonnerait de voir les commis-voyageurs figurer ici d’une manière si honorable, nous répondrions qu’ils sont depuis plus d’un siècle, sans que l’on paraisse s’en douter, les missionnaires les plus ardens et les plus actifs de la civilisation française. A la faveur de leurs vins, de leurs soieries, de leurs draps, de leurs bijouteries, ils répandent nos idées, font dominer nos goûts, prévaloir notre langue, qu’ils forcent partout à parler. Il n’est pas de ville, de bourg, de hameau en Espagne, en Italie, en Belgique, en Hollande, en Allemagne, et même en Russie, où le commis-voyageur ne passe une fois par semaine. Il a remplacé le livre français que la censure étrangère proscrit, il tient lieu du journal qu’on brûle à la frontière. Il sait tout, il dit tout sans danger. Lui-même profite de cette éducation qu’il donne à son insu, et revient avec des connaissances très étendues.