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maintienne par sa magistrature sa force publique, et est aussi impossible que de concevoir un empire comme l’empire romain, sans armée. Toute grande église laissée hors de la tutelle de l’état, en face de l’attaque des libres penseurs et des divisions de ses prêtres, se divisera infailliblement. Là est l’aveuglement du parti ultramontain. Il ne se rend pas compte de ce qu’il doit à l’état, du service que celui-ci lui rend en lui prêtant ses juges, ses gendarmes. Plein de confiance en la papauté, il ne voit pas que la papauté, privée du pouvoir temporel et ayant brisé ses concordats, roulera de schisme en schisme, que les élections douteuses se multiplieront, que chaque parti, chaque nuance aura un pape à son choix. Le catholicisme ultramontain, pour avoir poussé son principe d’unité à l’extrême, périra justement par la division. Si l’on adopte ces idées, on trouvera qu’il est bien peu politique de persécuter ce qui doit tomber de soi-même. Douceur et indifférence, voilà la plus dangereuse politique que les états puissent adopter à l’égard de l’ultramontanisme. Au contraire le moyen de le resserrer, de le faire durer, est d’employer avec lui de rudes procédés qui, loin de l’affaiblir, l’enracinent dans cette opinion qu’il doit régner ou souffrir, et qu’un gouvernement ne peut être à son égard sans amour et sans haine.
{{tiret2|main|tienne}} par sa magistrature sa force publique, et est aussi impossible que de concevoir un empire comme l’empire romain, sans armée. Toute grande église laissée hors de la tutelle de l’état, en face de l’attaque des libres penseurs et des divisions de ses prêtres, se divisera infailliblement. Là est l’aveuglement du parti ultramontain. Il ne se rend pas compte de ce qu’il doit à l’état, du service que celui-ci lui rend en lui prêtant ses juges, ses gendarmes. Plein de confiance en la papauté, il ne voit pas que la papauté, privée du pouvoir temporel et ayant brisé ses concordats, roulera de schisme en schisme, que les élections douteuses se multiplieront, que chaque parti, chaque nuance aura un pape à son choix. Le catholicisme ultramontain, pour avoir poussé son principe d’unité à l’extrême, périra justement par la division. Si l’on adopte ces idées, on trouvera qu’il est bien peu politique de persécuter ce qui doit tomber de soi-même. Douceur et indifférence, voilà la plus dangereuse politique que les états puissent adopter à l’égard de l’ultramontanisme. Au contraire le moyen de le resserrer, de le faire durer, est d’employer avec lui de rudes procédés qui, loin de l’affaiblir, l’enracinent dans cette opinion qu’il doit régner ou souffrir, et qu’un gouvernement ne peut être à son égard sans amour et sans haine.


Ce que nous venons de dire des partis religieux, nous le dirons de la philosophie dans ses rapports avec l’état. La philosophie doit être libre, elle doit énergiquement défendre son droit contre les prétentions des diverses orthodoxes religieuses ; mais elle doit s’interdire absolument, quand elle en a le pouvoir, toute autre mesure que la persuasion, la diffusion des lumières, l’instruction. Le progrès accompli autrement n’est pas le progrès. On ne guérit pas la superstition, l’idolâtrie en brisant les amulettes, les idoles, mais en mettant les esprits dans un état où la superstition et l’idolâtrie sont des non-sens. Que la libre pensée ait plus d’un grief contre les partis religieux, lesquels d’ordinaire ne se croient libres que quand ils règnent, cela est incontestable. Qu’elle maintienne ses revendications, mais qu’elle s’interdise toutes représailles. De fâcheuses mesures ont été prises. L’école publique, qui doit être neutre en matière de religion, est trop souvent un instrument de propagande pour un seul culte ; des règles pénibles ont été établies pour les funérailles. Les funérailles sont une sorte de sacrement <ref> Il va sans le dire que, si des actes délictueux se commettent à propos des funérailles, on a le droit de les réprimer. Il peut se commettre des actes délictueux à l’église, pendant l’office ; ferme-t-on pour cela les églises ? supprime-t-on les offices ?</ref> ; leur donner un cachet confessionnel contrairement à la volonté du mort est un sacrilège. Enfin les libres penseurs ont le droit de se plaindre que, contrairement à la vérité des faits, le parti catholique
Ce que nous venons de dire des partis religieux, nous le dirons de la philosophie dans ses rapports avec l’état. La philosophie doit être libre, elle doit énergiquement défendre son droit contre les prétentions des diverses orthodoxies religieuses ; mais elle doit s’interdire absolument, quand elle en a le pouvoir, toute autre mesure que la persuasion, la diffusion des lumières, l’instruction. Le progrès accompli autrement n’est pas le progrès. On ne guérit pas la superstition, l’idolâtrie en brisant les amulettes, les idoles, mais en mettant les esprits dans un état où la superstition et l’idolâtrie sont des non-sens. Que la libre pensée ait plus d’un grief contre les partis religieux, lesquels d’ordinaire ne se croient libres que quand ils règnent, cela est incontestable. Qu’elle maintienne ses revendications, mais qu’elle s’interdise toutes représailles. De fâcheuses mesures ont été prises. L’école publique, qui doit être neutre en matière de religion, est trop souvent un instrument de propagande pour un seul culte ; des règles pénibles ont été établies pour les funérailles. Les funérailles sont une sorte de sacrement{{lié}}<ref>Il va sans le dire que, si des actes délictueux se commettent à propos des funérailles, on a le droit de les réprimer. Il peut se commettre des actes délictueux à l’église, pendant l’office ; ferme-t-on pour cela les églises ? supprime-t-on les offices ?</ref> ; leur donner un cachet confessionnel contrairement à la volonté du mort est un sacrilége. Enfin les libres penseurs ont le droit de se plaindre que, contrairement à la vérité des faits, le parti catholique