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confessés fondirent bruyamment sur les autres messieurs pour leur faire avouer, et sauf le poète qui s’obstina avec l’histoire de son ami, tout le monde allégua le miroir maudit de la galerie.

— Dites béni, messieurs — observa la comtesse en riant, car je vois que sans lui vous m’arriviez avec une lamentable figure.

— Ce n’est que trop vrai — répondit le général — demandez à Frédéric. Frédéric, le garçon, entra, à ce moment pour annoncer que le dîner était servi.

— N’est-il pas vrai, Frédéric — lui dit le général — que j’avais le visage dans un joli état ? Et les autres aussi, n’est-ce pas ?

— En vérité — répondit Frédéric — pour ce qui est de Monsieur le général, de Monsieur le conseiller et de Monsieur le lieutenant, je ne puis rien dire car ils avaient le visage couvert, mais quant aux autres messieurs, j’ai vu parfaitement qu’ils n’avaient rien.

Tous protestèrent, et le domestique tint bon, laissant même entendre que le général et le lieutenant se trouvaient dans le même cas.

— Comment, comment ? — exclama la comtesse ! — c’est de la magie ! Nous n'irons pas à table que nous n’ayons découvert ce mystère !

— La petite table, comtesse ! — dit la dame anglaise qui était spirite et se livrait souvent à des expériences en compagnie de la maîtresse de la maison — il faut interroger la petite table.

Ce qui fut dit fut fait. On apporta la petite table qui se mit aussitôt à tourner avec un craquement général comme si elle riait. Interrogée sur le comment et sur le pourquoi des fameuses taches elle fit cette judicieuse réponse :

Chaque miroir est ma demeure,
Les taches sont ma tromperie
Toutes les autres sont tromperies
De leurs seigneuries.

Le Follet de la Galerie.

Sans attendre la fin, ces Messieurs crièrent : — à table ! à table ! Vite ! Vite ! Des histoires ! Des blagues ! À table ! à table ! — Et entraînant avec eux les dames qui, comme des folles, riaient d’eux et surtout du poète, de sa duchesse et de son ami, ils se précipitèrent comme un ouragan dans la salle à manger.