« L’Égalité (Maupassant) » : différence entre les versions

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|'''Les Chroniques de'''
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|'''L’égalité'''</br>''Le Gaulois'', 25 juin 1883
|[[De Paris à Rouen]]
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|[[Petits voyages]]
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Quand on aura établi l’égalité des tailles et l’égalité des nez, je croirai à l’égalité des êtres.
 
On me répondra : « Nous ne voulons parler ni d’égalité sociale, - un ministre est plus qu’un charbonnier, - ni d’égalité intellectuelle, - un artiste est plus qu’un ministre, - ni d’égalité de fortune, - M. de Rothschild possède plus qu’un simple électeur, son égal par le vote, - ni d’aucune sorte d’égalité effective ; nous voulons dire seulement que tous les Français sont égaux devant la loi. » (Ce principe, bien entendu, n’est ni appliqué ni applicable rigoureusement.)
 
Cependant cette idée de l’égalité des êtres a déjà fait faire, en politique, une série de folies que va bientôt terminer la plus pommée de toutes. Je veux parler du service militaire de trois ans obligatoire pour tout le monde.
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Ils ont pensé, ces naïfs, qu’un peuple était surtout grand par les arts, grand par ses grands hommes, grand par toutes les manifestations du talent et du génie. L’égalité ne les inquiétait guère ! Ils n’auraient point confondu Michel-Ange avec le fusilier Pitou. Ils n’auraient pas invité le sieur Raphaël, exerçant la profession de peintre, à perdre trois ans de ses travaux, afin d’apprendre à marcher en ligne et à astiquer des boutons de cuivre pour la plus grande gloire et le plus grand bien de sa patrie.
 
Ils s’étaient dit qu’un gouvernement artiste est le plus immortel de tous, et ils ont protégé les artistes, ils les ont aimés, soutenus, payés, attirés de tous les coins du monde ; si bien que le monde entier, encore aujourd’hui, a les yeux sur l’Italie. De tous les bouts de la terre, on vient voir cette terre peuplée de chefs-d’œuvre, mère des arts, mère des peintres, des poètes, des sculpteurs, des ciseleurs et des architectes ; non pas l’Italie du roi Humbert, ni (Italie de Garibaldi, - on va voir (Italie des Médicis, celle qu’ils ont faite et laissée immortelle, celle qu’ils ont meublée de merveilles pour jusqu’à la fin des siècles, celle où ils ont su faire éclore tous les génies en même temps.
 
On ne dit pas : le siècle de Charlemagne, ni le siècle de Henri IV, ni le siècle de Napoléon. On ne dira point, plus tard, le siècle de Bismarck, malgré les victoires de ce ravageur stérile. On ne dira pas non plus : le siècle de la République, soyons-en bien persuadés.
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L’égalité est en ce cas le grand ''cheval de bataille'' du corps des députés qui, eux aussi, utiliseraient sans doute plus avantageusement leurs facultés à la caserne qu’à la Chambre.
 
Ils vont tuer, d’un coup, toute la production .artistique de notre pays. Le talent et le génie ont besoin d’être traités comme les plantes délicates qu’on élève en serre. Ils meurent étouffés dans la forêt populaire.
 
L’égalité est le mal dont nous mourrons, parce qu’elle n’existe nulle part dans la création ; elle est contraire aux lois du monde et dangereuse comme tout ce qui fait obstacle à l’ordonnance naturelle des choses.