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de Katucha le remplissait de bonheur; et elle, de son
côté, elle rayonnait de bonheur à la pensée qu’il exis-
tait. Et si, par hasard, Nekhludov avait reçu de sa mère
une lettre qui l’avait chagriné; si son travail ne mar-
chait pas bien, s’il ressentait un accès de ces tristesses
vagues que connaissent tous les jeunes gens, il songeait
à Katucha, et toute sa peine aussitôt s’enfuyait.
Katucha avait beaucoup à faire dans la maison, mais
elle travaillait vite; et, dans ses instants de loisir, elle
aimait a lire. Nekhludov lui prèta des romans de Dos-
toïevsky et de Tourguenef; l’Antchar, de Tourguenef,
surtout, l’enchanta. `
Plusieurs fois par jour, ils échangeaient quelques pa-
roles en se rencontrant dans le corridor, sur le perron,
et dans la cour; et parfois ils se rejoignaient a l’0ftice,
en compagnie de la vieille gouvernante des deux demoi-
selles, Matrena Pavlovna: Nekhludov y venait goûter
et prendre le thé. Et ces entretiens, en présence de Ma-
trena Pavlovna, leur étaient à tous deux d`une exquise
douceur. Mais quand, au contraire, ils étaient seuls dans
la salle, la conversation n’allait pas aussi bien. Tout de
suite leurs yeux se mettaient àparler de choses tout
autres, et infiniment plus intéressantes pour eux, que ce
quo disaient leurs lèvres; et leurs lèvres se taisaient, et
un sentiment de gêne les envahissait, et ils se hâtaient
de se séparer.
Ces relations nouvelles se prolongèrent entre eux
tout le temps que Nekhludov resta chez ses tantes. Et
les tantes s`aperçurent de ces relations : elles s‘en in-
quiétèrent et crurent même devoir en informer, dans
une de leurs lettres, leur belle-sœur, la mère du jeune
homme. La tante Marie lvanovna craignait que Dimitri
n'eût une liaison galante avec Katucha: crainte bien
vaine, car Nekhludov n’avait aucune idée d’une liaison
de ce genre. Il aimait Katucha, mais d’un amour abso-
lument ingénu; et cet amour même aurait suffi à le
préserver d’une chute, aussi bien qu'elle. Non seulement
il ne désirait point la posseder, mais il n`on eût pas ·
admis la possibilité.