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ambitieux et retentissans » des républicains qui vont plus loin que lui ; lorsque, dans son dernier discours, il parle encore de « tenir tête à toutes les anarchies, à l’anarchie révolutionnaire aussi bien qu’à l’anarchie cléricale, » il ne s’aperçoit pas qu’il est la dupe des contradictions de son esprit et de la situation qu’il s’est faite. Pour tenir tête à l’anarchie révolutionnaire qui ne manque certainement pas aujourd’hui, il faut oser lever le drapeau d’une politique d’équité supérieure, de modération libérale. Pour suivre cette politique, il faut chercher le vrai point d’appui là où il est, dans tous ces sentimens et ces instincts qui existent même dans la chambre et bien plus encore dans le pays, qui répugnent à toutes les violences de secte et de parti, aux procédés arbitraires, aux excès de domination. Non-seulement M. le président du conseil a cessé d’être avec les modérés animés de ces sentimens et de ces instincts ; il n’oserait pas même rechercher ou accepter trop ouvertement leur alliance ; il se croirait compromis par leur concours, de sorte qu’il se trouve dans cette position étrange où, après avoir tout fait pour s’aliéner les modérés par ses actes et par sa politique, il n’est jamais sûr d’avoir fait assez pour désarmer certains républicains qui viennent de voter pour lui par condescendance, sans lui cacher qu’ils lui ménagent prochainement de nouvelles surprises. Que M. le président du conseil, dans cette dernière échauffourée parlementaire, ait échappé aux conséquences des impossibilités ou des difficultés qu’il s’est créées, qu’il ait réussi à avoir son vote et qu’il continue à vivre tant qu’il pourra, il n’y a rien à dire ; il a visiblement bénéficié d’un ensemble de circonstances propres à rendre pour le moment toutes les combinaisons difficiles. Un vote l’a mis à mal, un vote l’a relevé, c’est une affaire de scrutin. L’essentiel est de ne pas se méprendre sur le caractère et la situation d’un ministère qui s’est tellement compromis, qui a désormais donné de tels gages qu’il ne peut plus reculer devant les concessions qu’on lui demandera, qui par toute sa politique a engagé la république dans une voie où elle peut être exposée à de singulières aventures.
{{tiret2|ambi|tieux}} et retentissans » des républicains qui vont plus loin que lui ; lorsque, dans son dernier discours, il parle encore de « tenir tête à toutes les anarchies, à l’anarchie révolutionnaire aussi bien qu’à l’anarchie cléricale, » il ne s’aperçoit pas qu’il est la dupe des contradictions de son esprit et de la situation qu’il s’est faite. Pour tenir tête à l’anarchie révolutionnaire qui ne manque certainement pas aujourd’hui, il faut oser lever le drapeau d’une politique d’équité supérieure, de modération libérale. Pour suivre cette politique, il faut chercher le vrai point d’appui là où il est, dans tous ces sentimens et ces instincts qui existent même dans la chambre et bien plus encore dans le pays, qui répugnent à toutes les violences de secte et de parti, aux procédés arbitraires, aux excès de domination. Non-seulement M. le président du conseil a cessé d’être avec les modérés animés de ces sentimens et de ces instincts ; il n’oserait pas même rechercher ou accepter trop ouvertement leur alliance ; il se croirait compromis par leur concours, de sorte qu’il se trouve dans cette position étrange où, après avoir tout fait pour s’aliéner les modérés par ses actes et par sa politique, il n’est jamais sûr d’avoir fait assez pour désarmer certains républicains qui viennent de voter pour lui par condescendance, sans lui cacher qu’ils lui ménagent prochainement de nouvelles surprises. Que M. le président du conseil, dans cette dernière échauffourée parlementaire, ait échappé aux conséquences des impossibilités ou des difficultés qu’il s’est créées, qu’il ait réussi à avoir son vote et qu’il continue à vivre tant qu’il pourra, il n’y a rien à dire ; il a visiblement bénéficié d’un ensemble de circonstances propres à rendre pour le moment toutes les combinaisons difficiles. Un vote l’a mis à mal, un vote l’a relevé, c’est une affaire de scrutin. L’essentiel est de ne pas se méprendre sur le caractère et la situation d’un ministère qui s’est tellement compromis, qui a désormais donné de tels gages qu’il ne peut plus reculer devant les concessions qu’on lui demandera, qui par toute sa politique a engagé la république dans une voie où elle peut être exposée à de singulières aventures.


S’il est difficile à l’heure qu’il est de réagir assez énergiquement pour redresser le cours des choses, pour revenir aux conditions d’un libre et utile développement des institutions nouvelles, — et personne ne méconnaît la difficulté, — c’est au moins le moment d’y songer. Qu’on y réfléchisse bien. On a voulu fonder la république : c’était et c’est toujours une pensée toute simple dans la situation où s’est trouvée la France. La faute des républicains n’est pas de s’être attachés à une entreprise légitimée par les circonstances, favorisée par toutes les impossibilités que les révolutions ont accumulées. Leur faute a été et est toujours de voir dans un régime, dont la création est l’œuvre de tout le monde, la victoire de leurs passions, de leurs préjugés et de leurs ressentimens,
S’il est difficile à l’heure qu’il est de réagir assez énergiquement pour redresser le cours des choses, pour revenir aux conditions d’un libre et utile développement des institutions nouvelles, — et personne ne méconnaît la difficulté, — c’est au moins le moment d’y songer. Qu’on y réfléchisse bien. On a voulu fonder la république : c’était et c’est toujours une pensée toute simple dans la situation où s’est trouvée la France. La faute des républicains n’est pas de s’être attachés à une entreprise légitimée par les circonstances, favorisée par toutes les impossibilités que les révolutions ont accumulées. Leur faute a été et est toujours de voir dans un régime, dont la création est l’œuvre de tout le monde, la victoire de leurs passions, de leurs préjugés et de leurs ressentimens,