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EN ESPAGNE 657

sans porte et sans vitrage, — tressait des espa- drilles avec une rapidité, une aisance prodigieuses. Ses bras demi-nus et la longue aiguille saupoudrée d'une farine glissante semblaient escamoter les torsades de chanvre. " O peuple charmant, pensais- je, qui ne faites rien que par adresse, fantaisie ; dont chaque mouvement révèle l'aptitude à l'au- dace, à la grâce, à la souplesse, au plaisir ! Vous ne réussissez que la beauté ou la tragique détresse. Mais je vous aime de ne pas savoir servir ! J'ai vu dans cette petite ville un douanier, une hôtelière, un cocher, ils étaient ridicules ; ils avaient, en accomplissant leur humble devoir, la contenance effrayée des jeunes fauves travestis qu'on exhibe dans un cirque. Rien ne vaut, sur le sol d'Espagne, qui ne soit emportement, libre désir, volontaire abaissement ! "

Surpris par le crépuscule flamboyant, l'abon- dant azur, vertigineux et las, semblait tourbillon- ner ; il se colorait, au couchant, d'un rose incendié. Les hirondelles effilées, leur noir vol recourbé, leurs cris lancés et retombants dessinaient sur le ciel du soir quelque mosquée fantastique, aux arceaux d'amour et de mélodie !

Des larmes coulaient sur mon immobile visage ; chacun des nerfs du cœur, tenté, caressé, irrité par la beauté du jour, et douloureux par le trajet du désir, donnait sa suprême affliction. Une rose trop ouverte que je tenais à la main se laissait mourir

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