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Achéménide une épopée d’une étonnante envergure. On eût dit que rien ne pouvait plus résister à l’élan des Perses. Cyrus débuta par la Lydie où régnait le fameux Crésus (580-545). Il l’abattit et annexa son royaume. Il se trouva ainsi en possession de l’Asie mineure et en contact avec le monde grec et la Méditerranée. Se retournant alors du côté de la Chaldée, Cyrus s’empara de Babylone en 538. Son fils Cambyse poursuivit les conquêtes de son père. Il osa attaquer {{corr|l’Egypte|l’Égypte}}, occupa Memphis et pénétra jusqu’en Nubie. Darius (521-485) cousin et successeur de Cambyse étendit encore ses possessions en y ajoutant les territoires orientaux sur la frontière de l’Inde. Mais c’est surtout comme organisateur que Darius s’impose à l’attention. Il divise l’empire en trente-deux régions administratives. {{corr|A|À}} la tête de chacune se trouvaient un « satrape » chargé des affaires civiles, un commandant militaire et une sorte de « secrétaire royal » représentant le pouvoir central. Ces trois fonctionnaires supérieurs étaient soumis à l’appréciation d’inspecteurs périodiques. Pareille initiative dans la conception gouvernementale représente une des plus fortes étapes qui aient jamais été franchies d’un seul coup dans la vie politique. Notons que nous sommes en 500 av. J.-C. Rome échappe aux Tarquins ; à Athènes, Clisthène va perfectionner l’œuvre de Sofon ; Confucius, en Chine, expose ses doctrines tandis que dans l’Inde, le {{corr|boudhisme|bouddhisme}} se propage. Partout ce ne sont si l’on peut ainsi dire, que des progrès en espérance. Ici nous voyons s’organiser soudainement et de façon pratique, un énorme empire composé de peuples différents et sur lesquels ne s’exerce aucune tyrannie en vue de les faire changer de langage ou de religion. Est-ce ce libéralisme si caractéristique de l’aryanisme iranien qui a déplu à Bossuet et l’a rendu injuste dans sa critique de l’empire perse ?… Cependant l’administration impériale ne se bornait pas à se superposer sans les opprimer aux nationalités assemblées sous son égide — ni même à appliquer les principes modernes de la séparation des pouvoirs et de l’inspection permanente. Des impôts réguliers à la place d’un rançonnage arbitraire, un réseau de routes bien entretenues avec un embryon de service postal par courriers, partout la paix au lieu de ces guerres de peuple à peuple, de race à race qui avaient été, sans aucune nécessité providentielle assurément, le régime habituel des temps chaldéens ; avec cela une efflorescence artistique pleine de promesses — enfin une morale individuelle claire et franche : voilà ce que représentait la Perse de Cyrus et de Darius. Il vaut la peine d’y réfléchir un instant. Car Darius est le {{tiret|souve|rain}}
Achéménide une épopée d’une étonnante envergure. On eût dit que rien ne pouvait plus résister à l’élan des Perses. Cyrus débuta par la Lydie où régnait le fameux Crésus (580-545). Il l’abattit et annexa son royaume. Il se trouva ainsi en possession de l’Asie mineure et en contact avec le monde grec et la Méditerranée. Se retournant alors du côté de la Chaldée, Cyrus s’empara de Babylone en 538. Son fils Cambyse poursuivit les conquêtes de son père. Il osa attaquer {{corr|l’Egypte|l’Égypte}}, occupa Memphis et pénétra jusqu’en Nubie. Darius (521-485) cousin et successeur de Cambyse étendit encore ses possessions en y ajoutant les territoires orientaux sur la frontière de l’Inde. Mais c’est surtout comme organisateur que Darius s’impose à l’attention. Il divise l’empire en trente-deux régions administratives. {{corr|A|À}} la tête de chacune se trouvaient un « satrape » chargé des affaires civiles, un commandant militaire et une sorte de « secrétaire royal » représentant le pouvoir central. Ces trois fonctionnaires supérieurs étaient soumis à l’appréciation d’inspecteurs périodiques. Pareille initiative dans la conception gouvernementale représente une des plus fortes étapes qui aient jamais été franchies d’un seul coup dans la vie politique. Notons que nous sommes en 500 av. J.-C. Rome échappe aux Tarquins ; à Athènes, Clisthène va perfectionner l’œuvre de Solon ; Confucius, en Chine, expose ses doctrines tandis que dans l’Inde, le {{corr|boudhisme|bouddhisme}} se propage. Partout ce ne sont si l’on peut ainsi dire, que des progrès en espérance. Ici nous voyons s’organiser soudainement et de façon pratique, un énorme empire composé de peuples différents et sur lesquels ne s’exerce aucune tyrannie en vue de les faire changer de langage ou de religion. Est-ce ce libéralisme si caractéristique de l’aryanisme iranien qui a déplu à Bossuet et l’a rendu injuste dans sa critique de l’empire perse ?… Cependant l’administration impériale ne se bornait pas à se superposer sans les opprimer aux nationalités assemblées sous son égide — ni même à appliquer les principes modernes de la séparation des pouvoirs et de l’inspection permanente. Des impôts réguliers à la place d’un rançonnage arbitraire, un réseau de routes bien entretenues avec un embryon de service postal par courriers, partout la paix au lieu de ces guerres de peuple à peuple, de race à race qui avaient été, sans aucune nécessité providentielle assurément, le régime habituel des temps chaldéens ; avec cela une efflorescence artistique pleine de promesses — enfin une morale individuelle claire et franche : voilà ce que représentait la Perse de Cyrus et de Darius. Il vaut la peine d’y réfléchir un instant. Car Darius est le {{tiret|souve|rain}}