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jouir que d’une sécurité transitoire ; tôt ou tard la colonisation anglaise rejoindrait leurs frontières.
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Pour administrer et conduire le vaste empire qui, par la force des choses, se constituait ainsi sous son égide et sans qu’elle y apportât ni élan ni orgueil — tant elle se fiait peu à sa durée — de quels hommes disposait l’Angleterre? Il semble que les collaborateurs de la reine Victoria, quelle qu’ait été la diversité deleurs caractères, puissent être répartis en deux équipes portant les noms des chefs d’école dont l’esprit et les méthodes les pénétrèrent : Palmerston et Gladstone. Esprit et méthodes à ce point contradictoires qu’à vouloir rapprocher ces deux hommes, on risque de paraître naïf en soulignant leurs contrastes et paradoxal en leur découvrant quelque similitude. Ils eurent pourtantune conviction commune. Tous deux crurent à la qualité individuelle du citoyen britannique, à sa valeur en tant que ferment mondial ; mais Palmerston, réaliste et moins scrupuleux, conclut de là à l’obligation pour la nation d’épouser les querelles lointaines de ses fils et de les faire siennes, qu’elles fussent bonnes ou mauvaises. C'était là une doctrine expansioniste assez nouvelle. Le citoyen romain avait tiré son prestige du reflet triomphal dont Rome le revêtait. La gloire de Rome, sans doute, était le produit des efforts de ses fils. L’antiquité n’ignorait pas cette solidarité puisqu’elle en avait donné la formule : ''civium vires, civitatis vis'' : les forces des citoyens font la force de la cité. Mais Rome alors fixait les regards et s’imposait à tous. Quel rapport y avait-il entre sa situation dominatrice et celle de l’Angleterre de 1840 avec ses destins incertains, sa médiocre dynastie, ses difficultés intérieures, ses tares et la rivalité de puissances continentales récemment illustrées par leurs exploits comme la France ou fortifiées comme la Prusse par leurs agrandissements territoriaux ?
Pour administrer et conduire le vaste empire qui, par laiorce
des choses, se constituait ainsi sous son égide et sans qu’elle y
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de quels hommes disposait l’Angleterre? Il semble que les colla—
borateurs de la reine Victoria, quelle qu’ait été la diversité de
leurs caractères, puissent être répartis en deux équipes portant
les noms des chefs d’école dont l’esprit et les méthodes les péné-
trèrent : Palmerston et Gladstone. Esprit et méthodes à ce point
contradictoires qu’à vouloir rapprocher ces deux hommes, pn
risque de paraître naïf en soulignant leurs contrastes et para-
doxal en leur découvrant quelque similitude. Ils eurent pourtant
une conviction commune, Tous deux crurent à la qualité indi-
viduelle du citoyen britannique, à sa valeur en tant que ferment
mondial ; mais Palmerston, réaliste et moins scrupuleux, conclut
de là à l’obligation pour la nation d’épouser les querelles lointai-
nes de ses fils et de les faire siennes, qu’elles fussent bonnes ou
mauvaises. C'était là une doctrine expansioniste assez nouvelle.
Le citoyen romain avait tiré son prestige du reflet triomphal
dont Rome le revêtait. La gloire (le Rome, sans doute, était le
produit des efforts de ses fils. L’antiquité n’ignorait pas cette
solidarité puisqu‘elle en avait donné la formule: cit-5mn vires,
civitatis vis: les forces des citoyens font la force de la cité..
Mais Rome alors fixait les regards et s’imposait à. tous. Quel
rapport y avait-il entre sa situation dominatrice et celle de
l’Angleterre de 1840 avec ses destins incertains, sa médiocre
dynastie, ses difficultés intérieures, ses tares et la rivalité de
puissances continentales récemment illustrées par leurs exploits
comme la France ou fortifiées comme la Prusse par leurs agran-
dissements territoriaux?


Les Anglais n’en ignoraient rien ; ils sentaient leur faiblesse collective mais beaucoup d’entre eux ne s’en croyaient pas moins supérieurs comme échantillons d’humanité au reste de l’univers. Et parce que cette conviction ne pouvait reposer encore que surdes présomptions mentales et non sur des preuves tangibles, ellese traduisit chez Palmerston par une sorte de crispation de la volonté, de rage interne qui lui firent détester tout ce qui n’était
Les Anglais n’en ignoraient rien ; ils sentaient leur faiblesse collective mais beaucoup d’entre eux ne s’en croyaient pas moins supérieurs comme échantillons d’humanité au reste de l’univers. Et parce que cette conviction ne pouvait reposer encore que surdes présomptions mentales et non sur des preuves tangibles, ellese traduisit chez Palmerston par une sorte de crispation de la volonté, de rage interne qui lui firent détester tout ce qui n’était