<div style="background-color:#E0E0E0; border:2px solid #ffffff; text-align:center; padding:0.2em;"><span id="sommaire"></span>'''Sommaire'''</div>
Introduction<br />
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/1|1° mécanique° mécanique]]<br/>
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/2|2° géométrie° géométrie et trigonométrietrigonométrie pratique]]<br />
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/3|3° ° coupe des pierre et maçonneriemaçonnerie]]<br />
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/4|4° ° charpente]]<br />
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/5|5° ° dessin de l'architecturel’architecture]]<br />
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/6|6° ° dessin de l'ornementl’ornement]]<br />
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/7|7° ° dessin de la figure]]<br />
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/8|8° ° objets d'ameublementd’ameublement]]<br />
[[notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/9|9° matières° étrangèresmatières étrangères aux connaissances spécialesspéciales de l'architectel’architecte et du dessinateur]]<br />
[[Notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle/Conclusion et planches|Conclusion et planches]]
</div>
<center>
<big>NOTICE<br /><br />SUR<br /><br />L'ALBUML’ALBUM DE VILLARD DE HONNECOURT<br /><br />ARCHITECTE DU XIII<sup>e</sup> SIÈCLESIÈCLE<span id="sdfootnote1anc">[[#sdfootnote1sym|<sup>1</sup>]]</span><br /><br /></big>'''</center>
L'incertitudeL’incertitude qui règnerègne sur les procédésprocédés manuels des artistes du moyen âgeâge, l'ignorancel’ignorance absolue oùoù l'onl’on est de la manièremanière dont se faisait leur instruction, donneront quelque intérêtintérêt àà la description d'und’un manuscrit unique en son genre, qui paraîtparaît avoir étéété le livre de croquis d'und’un architecte du XIII<sup>e</sup> sièclesiècle. J'appelleraiJ’appellerai ''Album'' ce singulier ouvrage qui fait partie des manuscrits de Saint-Germain conservésconservés àà la BibliothèqueBibliothèque nationale (S. G. latin, 1104)<span id="sdfootnote2anc">[[#sdfootnote2sym|<sup>2</sup>]]</span>. C'estC’est un petit volume de 33 feuillets de parchemin cousus sous une peau épaisseépaisse et grossièregrossière qui se rabat sur la tranche. Une note, écriteécrite au XV<sup>e</sup> sièclesiècle sur le verso du dernier feuillet, prouve qu'àqu’à cette époqueépoque l'albuml’album en contenait quarante et un<sup><span id="sdfootnote3anc">[[#sdfootnote3sym|<sup>3</sup>]]</span></sup> ; les mutilations qui ont réduitréduit ce nombre ont l'airl’air d'êtred’être déjàdéjà anciennes.
Comme les feuillets ne sont pas égaliséségalisés entre eux, leurs dimensions varient de 15 àà 16 cent. en largeur sur 23 àà 24 de haut. Chacun d'euxd’eux est couvert sur les deux côtéscôtés de dessins àà la plume, qu'onqu’on voit avoir étéété esquissésesquissés àà la mine de plomb. Des notes explicatives, conçuesconçues dans le dialecte picard du XIII<sup>e</sup> sièclesiècle et écritesécrites en belle minuscule de la mêmemême époqueépoque, accompagnent plusieurs de ses dessins.
L'albumL’album fut connu de Willemin qui y prit de quoi composer une planche de costumes pour ses ''AntiquitésAntiquités inéditesinédites''<span id="sdfootnote4anc">[[#sdfootnote4sym|<sup>4</sup>]]</span>. Cela fournit àà M. Pottier l'occasionl’occasion de voir le manuscrit et d'end’en dire quelques mots dans sa notice explicative des ''AntiquitésAntiquités''. Il fut communiquécommuniqué, depuis àà plusieurs antiquaires habiles qui en prirent connaissance, et n'enn’en parlèrentparlèrent pas, peut-êtreêtre par la difficultédifficulté qu'ilsqu’ils éprouvaientéprouvaient àà donner une interprétationinterprétation satisfaisante de tout ce qu'ilqu’il renferme. Je serai plus hardi n'ayantn’ayant pas la mêmemême ambition. Je ne prétendsprétends pas tout expliquer dans un recueil oùoù les matièresmatières touchent àà la fois àà toutes les branches de la construction et de la décorationdécoration. Mon but est de faire, aprèsaprès Wilemin et M. Pottier, un appel plus marquémarqué àà l'attentionl’attention des éruditsérudits pour qu'unqu’un si précieuxprécieux livre soit étudiéétudié àà fond, discutédiscuté par qui de droit, et qu'ilqu’il fournisse àà la science archéologiquearchéologique tout ce qu'ilqu’il contient pour elle de donnéesdonnées certaines et de problèmesproblèmes àà résoudrerésoudre.
Les notes manuscrites que je signalais tout àà l'heurl’heur fournissent, sur l'auteurl’auteur de l'albuml’album, sur 'époque’époque àà laquelle il vivait, sur ses travaux, quelques notions que je commencerai par mettre en évidenceévidence.
Au verso du premier feuillet, on lit ceci :
« « ''Wilars de Honecort vous salue, et si proie u tos ceus qui de ces engiens ouverront, con trovera en cest livre, qu'ilqu’il proient por s'armes’arme et qu'ilqu’il lor soviengne de lui ; car en cest livre puet on trover grant consel de le grant force de maconerie et des engiens de carpenterie ; et si troveréstroverés le force de le portraiture les traits ensi come li ars de jometri le command et ensaigne.'' Villard de Honnecourt vous salue et prie tous ceux qui travailleront aux divers genres d'ouvragesd’ouvrages contenus en ce livre, de prier pour son âmeâme et de se souvenir de lui ; car dans ce livre on peut trouver grand secours pour s'instruires’instruire des principes fondamentaux de la maçonneriemaçonnerie et de la construction en charpente. Vous y trouverez aussi la méthodeméthode pour dessiner au trait, selon que l'artl’art de géométriegéométrie le commande et l'enseignel’enseigne. » »
Cette note peut passer pour une préfacepréface. Elle apprend le nom de l'auteurl’auteur, le lieu de son origine, la nature ainsi que la destination de son livre. Villard de Honnecourt ayant composécomposé ce recueil, le lèguelègue aux gens de son métiermétier, qui y trouveront nombre de procédésprocédés pour la pratique de la maçonneriemaçonnerie, la construction en charpente et l'applicationl’application de la géométriegéométrie au dessin. Il leur demande, en récompenserécompense, d'avoird’avoir mémoiremémoire de lui et de prier pour son âmeâme.
Villard de Honnecourt, àà en juger par son surnom, étaitétait Cambraisien, car Honnecourt est un village sur l'Escautl’Escaut, àà cinq lieues de Cambrai. Cette présumableprésumable origine prend la consistance d'und’un fait certain par la présenceprésence dans l'albuml’album de deux dessins, dont l'unl’un est le plan de l'églisel’église de Vaucelles, abbaye situéesituée tout àà côtécôté d’Honnecourt d'Honnecourt ; dont l'autrel’autre représentereprésente égalementégalement, en plan, le chœurchœur de l'églisel’église cathédralecathédrale de Cambrai.
De mêmemême que tous les hommes de son temps qui savaient quelque chose, notre architecte avait beaucoup voyagévoyagé. « '« 'J'ayJ’ay estéesté en moult de terres,'' » » dit-il en un endroit, et àà l'appuil’appui de son dire, il invoque les monuments de tous pays réunisréunis dans son album. En effet, c'estc’est presque un itinéraireitinéraire que ce manuscrit. On l'yl’y voit traverser la France du nord àà l'ouestl’ouest, puis parcourir l'empirel’empire d'Alllemagned’Alllemagne jusque par de làlà ses limites les plus reculéesreculées. S'arrêtantS’arrêtant une fois àà Laon, il y prend le croquis de l'unel’une des tours de la cathédralecathédrale, « « ''la plus belle tour qu'ilqu’il y ait au monde,'' » à» à son avis. Ses étudesétudes minutieuses sur la cathédralecathédrale de Reims prouvent qu'ilqu’il séjournaséjourna longtemps dans cette ville. Son passage àà Meaux est constatéconstaté par un plan de Saint-ÉtienneÉtienne, son passage àà Chartres par un dessin de la grande rose occidentale de Notre-Dame. Plus loin, on le trouve installéinstallé devant le portail méridionalméridional de la cathédralecathédrale de Lausanne dont il copie la rose existante encore aujourd'huiaujourd’hui. Enfin, l'albuml’album atteste un long séjourséjour de l'auteurl’auteur en Hongrie.
Il est àà regretter que le manuscrit de Villard de Honnecourt fournisse moins de renseignements sur ses travaux comme architecte que sur ses pérégrinationspérégrinations. On n'yn’y voit qu'unequ’une composition signéesignée de lui ; encore en partage-t-il le méritemérite avec un confrèreconfrère. Cet ouvrage consiste en un plan de sanctuaire pour une égliseéglise de premier ordre. Le chœurchœur est enveloppéenveloppé d'uned’une double galerie et de neuf chapelles, les unes de forme carréecarrée, les autres en hémicyclehémicycle. Elles alternent sur ce double patron àà droite et àà gauche de l'absidel’abside qui est carréecarrée. Dans l'intérieurl’intérieur, on lit cette légende légende : ''Istud presbiterium<span id="sdfootnote5anc">[[#sdfootnote5sym|<sup>5</sup>]]</span> invenerunt Vlardus de Huncort et Petrus de Corbeiainter se disputando''. Ainsi, cette disposition insolite fut le résultatrésultat d'uned’une conférenceconférence entre Villard et un sien confrèreconfrère appeléappelé Pierre de Corbie ; rien n'indiquen’indique d'ailleursd’ailleurs qu'ellequ’elle ait étéété exécutéeexécutée.
A défautdéfaut de preuve directes qui permettent de placer notre maîtremaître Cambraisien parmi les grands constructeurs du XIII<sup>e</sup> sièclesiècle, il y a lieu de recourir àà l'inductionl’induction.
L'uneL’une des mentions de son voyage en Hongrie arrive àà propos d'und’un dessin qu'ilqu’il prit àà Reims :« « Lorsque je le fis, » écrit» écrit-il au-dessous, « j'étais« mandéj’étais mandé en la terre de Hongrie. » » Pourquoi mandé mandé ? ÉvidemmentÉvidemment pour faire œuvreœuvre de son art. Sa réputationréputation étaitétait donc déjàdéjà si bien établieétablie qu'ellequ’elle allait le recommander jusqu'auxjusqu’aux confins de l'Europe l’Europe ; et comme l'ouvragel’ouvrage pour lequel on fait faire quatre cents lieues àà un homme ne saurait êtreêtre de médiocremédiocre importance, on peut en conclure que Villard de Honnecourt n'allaitn’allait àà Bude ou àà Strigonie que pour y éleverélever quelque somptueuse égliseéglise.
J'aiJ’ai dit précédemmentprécédemment qu'unqu’un plan de l'anciennel’ancienne cathédralecathédrale de Cambrai faisait partie des dessins de l'albuml’album. La légendelégende qui accompagne ce plan est ainsi conçueconçue : ''Vesci l'esligementl’esligement del chavec Medame Sainte Marie de Cambrai, ensi com il ist de tierre. Avant en cest livre en troveréstroverés les montéesmontées dedens et dehors, et tote le manièremanière des capeles et des plains pans autresi, et li manièremanière des ars boteres''. C'estC’est àà dire :« « Voici la disposition du chevet de Notre-Dame de Cambrai, tel qu'ilqu’il sort de terre. Plus loin en ce livre vous en trouverez les élévationsélévations intérieuresintérieures et extérieuresextérieures avec le dessin des chapelles, des murs latérauxlatéraux et des arcs boutants. » » Maintenant, si l'onl’on cherche ces élévationsélévations, chapelles, clôturesclôtures annoncéesannoncées par l'auteurl’auteur, on ne les trouve pas dans le manuscrit, mais on trouve les parties analogues de la cathédralecathédrale de Reims, dessinéesdessinées avec le plus grand soin, et expliquéesexpliquées par une autre légendelégende oùoù on dit, en parlant des chapelles, que celles de Cambrai seront toutes pareilles si on les mènemène àà fin : ''d'autreteld’autretel maniere doivent estre celes de Canbrai s'ons’on lor fait droit''. Donc au moment oùoù Villard de Honnecourt écrivaitécrivait cela, le chevet de la cathédralecathédrale de Cambrai, sorti de terre, mais non élevéélevé, attendait qu'onqu’on le terminât terminât ; donc le renvoi aux élévationsélévations du chevet de Cambrai n'an’a pu êtreêtre qu'unqu’un renvoi aux élévationélévation du chevet de Reims, modèlemodèle de l'autrel’autre.
Mais pour faire, dans son esprit, cette confusion de la cathédralecathédrale de Reims avec la cathédralecathédrale de Cambrai ; pour déclarerdéclarer d'avanced’avance, et d'und’un ton décidédécidé, la forme que devaient recevoir les parties inachevéesinachevées de celles-ci ; enfin pour se livrer, àà Reims, aux étudesétudes les plus minutieuse sur ces parties mêmemême dont la copie étaitétait en voie d'exécutiond’exécution àà Cambrai, ne faut-il pas que Villard de Honnecourt ait étéété l'architectel’architecte de l'églisel’église de Cambrai ? Cela me paraîtparaît d'uned’une grande probabilitéprobabilité.
Les personnes qui ne connaissent ni l'espritl’esprit ni les pratiques du moyen âgeâge vont dire que raisonner comme je fais, c'estc’est se donner bien de la peine pour arriver àà prouver, quoi ? qu'unqu’un homme dont je cherche àà établirétablir la valeur, n'an’a étéété qu'unqu’un plagiaire. Mais il y avait une raison plus forte que la volontévolonté d'aucund’aucun architecte pour que le sanctuaire d la cathédralecathédrale de Cambrai fûtfût fait àà l'imagel’image de celui de Reims. Cambrai, n'étantn’étant pas encore métropolemétropole, dépendaitdépendait de la province rémoise rémoise ; son égliseéglise étaitétait donc fille de l'églisel’église de Reims. Or, l'archéologiel’archéologie a déjàdéjà constatéconstaté que ces sortes de relations entre les égliseséglises s'exprimaients’exprimaient, en architecture, par la conformitéconformité du plan et du style. La reproduction partielle de la basilique de Reims àà Cambrai confirme donc le fait archéologiquearchéologique, mais n'infirmen’infirme pas la capacitécapacité du constructeur.
Tout copiécopié qu'ilqu’il étaitétait, le sanctuaire de la cathédralecathédrale de Cambrai n'enn’en présenteprésente pas moins l'aspectl’aspect d'uned’une magnifique construction. Il y avait anciennement un dicton dans le Nord, que, pour faire une égliseéglise parfaite, il aurait fallu joindre au chœurchœur de Notre-Dame de Cambrai la nef de Notre-Dame d'Arrasd’Arras, la croiséecroisée de Notre Dame de Valenciennes et le clocher de Notre-Dame d'Anversd’Anvers. Les vieillards qui l'ontl’ont vu ne se consolent pas de sa perte. Il fut renversérenversé àà la RévolutionRévolution. Il y a vingt-cinq ans, lorsqu'onlorsqu’on acheva de déblayerdéblayer l'emplacementl’emplacement de l'églisel’église, l'architectel’architecte de la ville, M. AiméAimé Boileux, put encore en relever le plan. Ce plan, gravégravé dans les ''Recherches sur l'églisel’église métropolitainemétropolitaine de Cambrai'', de M. Leglay, est parfaitement conforme au dessin du manuscrit.
J'aiJ’ai voulu, par les développementsdéveloppements qui précèdentprécèdent, retrouver quelqu'unquelqu’un des titres perdus de Villard de Honnecourt. Mes efforts m'ontm’ont peut-êtreêtre conduit moins au vrai qu'auqu’au vraisemblable ; mais ils m'ontm’ont mis du moins en possession d'uned’une sériesérie de faits au moyen desquels va êtreêtre résoluerésolue d'uned’une manièremanière mathématiquemathématique la question d'âged’âge du manuscrit, et subséquemmentsubséquemment l'âgel’âge de l'auteurl’auteur. Il n'yn’y a pour cela qu'àqu’à tirer de l'histoirel’histoire des cathédralescathédrales e cambrai et de Reims quelques-unes des dates de leur construction.
La cathédralecathédrale de Cambrai, qui étaitétait romane, fut accommodéeaccommodée àà un nouveau plan lorsque l'architecturel’architecture gothique prévalutprévalut. M. Leglay mentionne des travaux exécutésexécutés dèsdès 1227 pour la reconstruction des bras du transept. Le tracétracé d'und’un nouveau chœurchœur, derrièrederrière celui qui existait, fut commencécommencé, en 1241, la seconde chapelle àà droite en 1243. Quant àà la premièrepremière àà droite, qui complétaitcomplétait le pourtour du chevet, on ignore sa date, mais d'aprèsd’après la marche du reste des travaux qu'onqu’on voit avoir étéété dirigésdirigés du transept vers l'absidel’abside, on peut raisonnablement supposer que cette chapelle fut commencéecommencée entre 1230 et 1239. Ainsi, c'estc’est de 1230 àà 1243 que s'élevas’éleva la clôtureclôture du nouveau chevet de Notre-Dame de cambrai.
D'autreD’autre part, il est constant que l'œuvrel’œuvre circonscrite par la mêmemême clôtureclôture fut achevéeachevée en 1251, puisque le jour de PâquesPâques de cette annéeannée, le clergéclergé prit possession du nouveau chœurchœur.
Maintenant, qu'onqu’on se reporte àà l'étatl’état des lieux constatéconstaté tant par le dessin que par les annotations du manuscrit. Le nouveau chevet est fondéfondé sur tout le développementdéveloppement de sa ligne de ceinture ; néanmoinsnéanmoins, l'achèvementl’achèvement des travaux est assez éloignééloigné pour que l'architectel’architecte en parle comme d'uned’une chose problématique problématique :« « Les chapelles, dit-il, auront telle figure si jamais on les termine, ''s'ons’on lor fait droit''. » » Et il n'yn’y a pas que les chapelles qui demeurent inachevéesinachevées, mais encore les arcs-boutants, piècepièce essentielles de la construction du chœurchœur, pour le dessin desquelles on renvoie aux analogues de l'églisel’église de Reims. Cela concorde donc parfaitement avec la suspension des travaux qui résulterésulte du silence de l'histoirel’histoire entre 1243 et 1251 ; par conséquentconséquent, c'estc’est dans l'intervallel’intervalle de ces deux annéesannées que Villard de Honnecourt écrivitécrivit la légendelégende rapportéerapportée ci-dessus.
Les dates connues de l'l’ œuvreœuvre de Reims ne contrarient en rien ce résultatrésultat. L'édificeL’édifice, commencécommencé en 1211 par Robert de Couci, étaitétait achevéachevé jusqu'aujusqu’au transept lorsque ce maîtremaître mourut en 1241 ; le chevet avec sa ceinture de chapelles étaitétait montémonté certainement dèsdès 1215<span id="sdfootnote6anc">[[#sdfootnote6sym|<sup>6</sup>]]</span>. Quant àà la nef, dont Villard nous a laissélaissé aussi des dessins, elle s'élevas’éleva de 1241 àà 1257 ; et comme ces dessins sont ceux d'uned’une travéetravée prise isolémentisolément, pourvu qu'onqu’on suppose une seule travéetravée construite avant 1251 (et c'estc’est le moins que l'onl’on puisse faire), notre chronologie subsiste : c'estc’est toujours de 1243 àà 1251 que le manuscrit de Saint-Germain a étéété annotéannoté.
Par une sériesérie d'autresd’autres rapprochements, il est possible de réduireréduire encore ce terme, et subséquemmentsubséquemment de placer àà la date qui lui convient, le point le plus marquant de la biographie de Villard de Honnecourt.
Le dessin qu'ilqu’il fit àà Reims lorsqu'illorsqu’il s'ens’en allait en Hongrie, ce dessin est celui d'uned’une fenêtrefenêtre des bas côtéscôtés de la nef : :donc il est postérieurpostérieur àà 1241, donc le voyage de Hongrie lui-mêmemême se place aprèsaprès 1241.
Interrogeons maintenant l'histoirel’histoire de Hongrie.
En 1242, les Tartares ayant envahi les provinces danubiennes, la nation hongroise presque tout entièreentière fut forcéeforcée d'émigrerd’émigrer. Elle revint l'annéel’année suivante, expulsa ses vainqueurs, mais ne trouva plus que des ruines àà la place oùoù ses villes avaient existéexisté. Strigonie surtout, Strigonie, la capitale et l'ornementl’ornement de l'empirel’empire, avait étéété comme effacéeeffacée du sol. C'estC’est àà la restauration de cette grande citécité que Bela, qui régnaitrégnait alors sur les Hongrois, commençacommença par appliquer toutes ses ressources. Il tâchatâcha de lui rendre sa splendeur, son animation, sa physionomie toute européenneeuropéenne, car au moment de l'invasionl’invasion, elle étaitétait peupléepeuplée presque exclusivement de FrançaisFrançais et d'Italiensd’Italiens<span id="sdfootnote7anc">[[#sdfootnote7sym|<sup>7</sup>]]</span>. Entre autres monuments, il y fit construire, pour les frèresfrères mineurs chez qui il avait éluélu sa sépulturesépulture, une somptueuse égliseéglise sous l'invocationl’invocation de la sainte Vierge<span id="sdfootnote8anc">[[#sdfootnote8sym|<sup>8</sup>]]</span>.
Ignorant l'annéel’année préciseprécise de la construction de Notre-Dame de Strigonie, je ne me hasarderai point àà y faire intervenir Villard de Honnecourt ; mais il est impossible de ne pas voir de relation entre son voyage et tant de travaux entrepris pour réparerréparer les ravages des Tartares. Je suppose, en conséquenceconséquence, qu'ilqu’il partit pour la Hongrie en 1244, aprèsaprès délivrancedélivrance complètecomplète du pays. De son aveu, il y fit un assez long séjour séjour : ''la u je mes maint jor''. Deux ou trois ans justifieraient l'expressionl’expression qu'ilqu’il emploie. Donc, de retour en france vers 1247, il aurait annotéannoté son album lorsqu'illorsqu’il n'étaitn’était pas encore question de reprendre, àà la cathédralecathédrale de Cambrai, les travaux qui furent terminésterminés en 1251. Probablement qu'ilqu’il étaitétait alors sur le déclindéclin de sa vie ou àà la veille de se retirer du monde, puisqu'ilpuisqu’il se séparaitséparait de ses instruments de travail.
Le voyage de notre auteur en Hongrie pourrait donner lieu encore àà d'autred’autre aperçus aperçus :
1° ° Le roi Bela étaitétait frèrefrère d'Élisabethd’Élisabeth de Hongrie, princesse trèstrès dévotedévote àà Notre-Dame de Cambrai, et dont les offrandes servirent précisémentprécisément àà payer les travaux de reconstruction commencéscommencés au transept de ladite égliseéglise en 1227, sous la direction présuméeprésumée de Villard de Honnecourt.
2° Élisabeth° Élisabeth de Hongrie mourut en 1231, fut canoniséecanonisée, et devint l'objetl’objet d'und’un culte particulier àà Marbourg oùoù elle avait reçureçu la sépulturesépulture. LàLà, sous son invocation, fut construite en 1235 une magnifique égliseéglise, la premièrepremière, de l'aveul’aveu des archéologuesarchéologues, que l'Allemagnel’Allemagne ait vue s'élevers’élever dans le style purement gothique ou, pour mieux dire, françaisfrançais. De plus, cette égliseéglise de Marbourg a ses croisillons arrondis : :disposition assez rares des égliseséglises gothiques, que la cathédralecathédrale de Cambrai présentaitprésentait égalementégalement.
3° ° A sainte ÉlisabethÉlisabeth fut consacréeconsacrée encore celle des chapelles de la cathédralecathédrale de Cambrai dont la fondation, fixéefixée dans l'histoirel’histoire àà 1239, serait, selon nous, du nombre des travaux exécutésexécutés par Villard de Honnecourt.
Ce sont làlà de simples rapprochements opérésopérés sur des faits qui peut-êtreêtre n'ontn’ont entre eux aucune connexitéconnexité, mais dont peut-êtreêtre aussi la parentéparenté sera établieétablie un jour par des documents sortis des archives de l'Allemagnel’Allemagne ou de la Hongrie. Jusque-làlà tenons-nous-en sur Villard de Honnecourt aux dates précédemmentprécédemment obtenues. Elles permettent de la faire sortir de la grande écoleécole du temps de Philippe-Auguste ; elles le placent au beau milieu de cette générationgénération d'hommesd’hommes par l'industriel’industrie de qui le genre gothique atteignit, comme systèmesystème de construction, ses derniers perfectionnements. Quoi de plus digne d'attentiond’attention que cette circonstance, lorsque tout àà l'heurel’heure nous verrons Villard de Honnecourt nous livrer les procédésprocédés de l'artl’art de bâtirbâtir usitéusité de son temps ? ÉvidemmentÉvidemment le manuscrit de Saint-Germain est destinédestiné àà devenir le point de départdépart de toutes les étudesétudes sur cette matièrematière, étudeétude bien neuves encore, car jusqu'àjusqu’à présentprésent il n'yn’y a guèreguère que la conjecture qui ait étéété appeléeappelée àà expliquer le faire des grandes constructions du XIII<sup>e</sup> sièclesiècle.
La meilleure description d'und’un livre de dessins serait de le reproduire par la gravure. Nayant l'avantagel’avantage de pouvoir faire passer sous les yeux du lecteur qu'unqu’un trèstrès petit nombre de figures, je devrai discourir avant tout. Cette nécessiténécessité m'enm’en impose une autre : :celle de soumettre àà une classification les matièresmatières jetéesjetées pèlepèle-mêlemêle dans l'albuml’album.
Je les classerai donc ; et pour cela je ne prendrai en considérationconsidération ni leur plus ou moins d'apparenced’apparence, ni le méritemérite plus ou moins grand de leur exécutionexécution mais seulement la nature des connaissances auxquelles elles ont rapport. Le mêmemême point de vue me fournira la mesure du développementdéveloppement àà donner àà chacune de mes explications. Les plus grands et les plus beaux dessins de Villard de Honnecourt pourront ne recevoir de moi qu'unequ’une simple mention, tandis qu j'insisteraij’insisterai sur des traits souvent informes et perdus entre d'autresd’autres figures : défautdéfaut de proportion qui en réalitéréalité n'enn’en est pas un ; car làlà oùoù l'auteurl’auteur se montre seulement dessinateur habile, il suffit du plus court élogeéloge donnédonné àà son talent ; tandis que les endroits oùoù paraîtparaît son instruction professionnelle ne sauraient êtreêtre trop discutésdiscutés, devant, par leur éclaircissementéclaircissement, fournir àà la science des donnéesdonnées qui lui ont manquémanqué jusqu'icijusqu’ici.
Neuf chapitres embrasseront facilement la totalitétotalité des remarques àà faire sur le manuscrit de Saint-Germain. Ils seront désignésdésignés par les titres suivants :
1° Mécanique ° Mécanique ; 2° géométrie° géométrie et trigonométrietrigonométrie pratique ; 3° ° coupe des pierre et maçonnerie maçonnerie ; 4° ° charpente ; 5° ° dessin de l'architecture l’architecture ; 6° ° dessin de l'ornement l’ornement ; 7° ° dessin de la figure ; 8° ° objets d'ameublement d’ameublement ; 9° matières° étrangèresmatières étrangères aux connaissances spécialesspéciales de l'architectel’architecte et du dessinateur.
----
<small>
<span id="sdfootnote1sym"><sup>[[#sdfootnote1anc|1]]</sup></span>[Extrait de la ''Revue archéologiquearchéologique'' de 1849, t. VI, p. 65 àà 80, 164 àà 188, 209 àà 226. -- ''Bibliogr''., n°° 189. -- Nous avons introduit dans le texte de ce mémoiremémoire de nombreuses additions et corrections que l'auteurl’auteur avait consignéesconsignées sur les marges d'und’un exemplaire que nous avons retrouvéretrouvé dans ses papiers. -- R. L.]
<br />
<span id="sdfootnote2sym"><sup>[[#sdfootnote2anc|2]]</sup></span>[Il porte le n° ° 19093 du fonds françaisfrançais.]
<br />
<span id="sdfootnote3sym"><sup>[[#sdfootnote3anc|3]]</sup></span>Elle est ainsi conçue :conçue :''En ce livre a quarente et j feillet'', signésigné J. Mancel avec paraphe.
<br />
<span id="sdfootnote4sym"><sup>[[#sdfootnote4anc|4]]</sup></span>T. 1, pl. 102.
<br />
<span id="sdfootnote5sym"><sup>[[#sdfootnote5anc|5]]</sup></span>''Bresbiterium'' pour ''presbyterium'' est ici l'équivalentl’équivalent de notre mot « chœur »« chœur ».
<br />
<span id="sdfootnote6sym"><sup>[[#sdfootnote6anc|6]]</sup></span>Le chœurchœur fut consacréconsacré le 18 octobre de cette annéeannée, selon Marlot.
<br />
<span id="sdfootnote7sym"><sup>[[#sdfootnote7anc|7]]</sup></span>Rogerii Varadicusis, ''De destructione HungariæHungariæ per Tartaros''.
<br />
<span id="sdfootnote8sym"><sup>[[#sdfootnote8anc|8]]</sup></span>Johannes de Thworez, ''Chronicon Hungarorum''.
|