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Il me semble que cet excès de paganisme est le fait
Il me semble que cet excès de paganisme est le fait d’un homme qui a trop lu et mal lu Henri Heine et sa littérature pourrie de sentimentalisme matérialiste.
d’un homme qui a trop lu et mal lu Henri Heine et sa
littérature pourrie de sentimentalisme matérialiste.


Et puisque j’ai prononcé le nom de ce coupable célèbre, autant vous raconter tout de suite un trait de lui qui me met hors de moi chaque fois que j’y pense. Henri Heine raconte dans un de ses livres que, se promenant au milieu de montagnes sauvages, au bord de précipices terribles, au sein d’un chaos de glaces et de neiges, il fait la rencontre d’un de ces religieux qui, accompagnés d’un chien, vont à la découverte des voyageurs perdus et agonisants. Quelques instants auparavant, l’auteur venait de se livrer aux élans solitaires de sa haine voltairienne contre les calotins. Il regarde quelque temps l’homme-humanité qui poursuit sa sainte besogne ; un combat se livre dans son âme orgueilleuse, et enfin, après une douloureuse hésitation, il se résigne et prend une belle résolution : ''Eh bien, non ! je n’écrirai pas contre cet homme !''
Et puisque j’ai prononcé le nom de ce coupable célèbre,
autant vous raconter tout de suite un trait de
lui qui me met hors de moi chaque fois que j’y pense.
Henri Heine raconte dans un de ses livres que, se
promenant au milieu de montagnes sauvages, au bord
de précipices terribles, au sein d’un chaos de glaces et
de neiges, il fait la rencontre d’un de ces religieux
qui, accompagnés d’un chien, vont à la découverte des
voyageurs perdus et agonisants. Quelques instants auparavant,
l’auteur venait de se livrer aux élans solitaires
de sa haine voltairienne contre les calotins. Il
regarde quelque temps l’homme-humanité qui poursuit
sa sainte besogne ; un combat se livre dans son
âme orgueilleuse, et enfin, après une douloureuse
hésitation, il se résigne et prend une belle résolution :
''Eh bien, non ! je n’écrirai pas contre cet homme !''


Quelle générosité ! Les pieds dans de bonnes pantoufles, au coin d’un bon feu, entouré des adulations d’une société voluptueuse, monsieur l’homme célèbre fait le serment de ne pas diffamer un pauvre diable de religieux qui ignorera toujours son nom et ses blasphèmes, et le sauvera lui-même, le cas échéant !
Quelle générosité ! Les pieds dans de bonnes pantoufles,
au coin d’un bon feu, entouré des adulations
d’une société voluptueuse, monsieur l’homme célèbre
fait le serment de ne pas diffamer un pauvre diable
de religieux qui ignorera toujours son nom et ses
blasphèmes, et le sauvera lui-même, le cas échéant !


Non, jamais Voltaire n’eût écrit une pareille turpitude.
Non, jamais Voltaire n’eût écrit une pareille turpitude. Voltaire avait trop de ''goût ;'' d’ailleurs, il était encore homme d’action, et il aimait les hommes.
Voltaire avait trop de ''goût ;'' d’ailleurs, il était
encore homme d’action, et il aimait les hommes.


Revenons à l’Olympe. Depuis quelque temps, j’ai
Revenons à l’Olympe. Depuis quelque temps, j’ai