« Métaphysique - Livre I (Cousin) » : différence entre les versions

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Quand on en fut là, la chose elle-même força d'avancer encore, et imposa de nouvelles recherches. Si tout ce qui naît doit périr et vient d'un principe unique ou multiple, pourquoi en est-il ainsi et quelle en est la cause? car ce n'est pas le sujet qui peut se changer lui-même ; l'airain, par exemple, et le bois ne se changent pas eux-mêmes, et ne se font pas l'un statue, l'autre lit, mais il y a quelque autre cause à ce changement. Or, chercher cette cause, c'est chercher un antre principe, le principe du mouvement, comme nous disions. Ceux des anciens qui dans l'origine touchèrent ce sujet, et qui avaient pour système l'unité de substance, ne se tourmentèrent pas de cette difficulté; mais quelques-uns de ces partisans de l'unité, inférieurs en quelque sorte à cette question, disent que l'unité et tout ce qui est, réel n'admet pas de mouvement, ni pour la génération et la corruption, ni même pour tout autre changement. Aussi, de tous ceux qui partent de l'unité du tout, pas un ne s'est occupé de ce point de vue, si ce n'est peut-être Parménide, et encore ne le fait-il qu'autant qu'à côté de son système de l'unité, il admet en quelque sorte deux principes. Mais ceux qui admettent la pluralité des principes, le chaud et le froid, par exemple, ou le feu et la terre, étaient plus à même d'arriver à cet ordre des recherches; car ils attribuaient au feu la puissance motrice, à l'eau, à la terre et aux autres éléments de cette sorte, la qualité contraire. Après ces philosophes et de pareils principes, comme ces principes étaient insuffisants pour produire les choses, la vérité elle même, comme nous l'avons déjà dit, força de recourir à un autre principe. En effet, il n'est guère vraisemblable que ni le feu, ni la terre, ni aucun autre élément de ce genre, soit la cause de l'ordre et de la beauté qui règnent. dans le monde, éternellement chez certains êtres, passagèrement chez d'autres ; ni que ces philosophes aient eu une pareille pensée : d'un autre côté, rapporter un tel résultat au hasard ou à la fortune n'eût pas été raisonnable. Aussi quand un homme vint dire qu'il y avait dans la nature, comme dans les animaux, une intelligence qui est la cause de l'arrangement et de l'ordre de l'univers, cet homme parut seul avoir conservé sa raison au milieu des folies de ses devanciers. Or, nous savons avec certitude qu'Anaxagoras entra le premier dans ce point de vue; avant lui Hermotime de Clazomène paraît l'avoir soupçonné. Ces nouveaux philosophes érigèrent en même temps cette cause de l'ordre en principe des êtres, principe doué de la vertu d'imprimer le mouvement.
 
<div title="ὑποπτεύσειε δ' ἄν τις Ἡσίοδον πρῶτον ζητῆσαι τὸ τοιοῦτον"></div>
On pourrait dire qu'avant eux, Hésiode avait entrevu cette vérité, Hésiode ou quiconque a mis dans les êtres comme principe l'amour ou le désir, par exemple Parménide. Celui-ci dit en effet dans sa théorie de la formation de l'univers:
 
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:Puis l'amour, le plus beau de tous les immortels. »
 
<div title="ὡς δέον ἐν τοῖς"></div>
Comme s'ils avaient reconnu la nécessité d'une cause dans les êtres capable de donner le mouvement et le lien aux choses. Quant à la question de savoir à qui appartient la priorité, qu'il nous soit permis de la décider plus tard.
Ensuite, comme à côté du bien dans la nature, on voyait aussi son contraire, non seulement de l'ordre et de la beauté, mais aussi du désordre et de la laideur, comme le mal paraissait même l'emporter sur le bien et le laid sur le beau, un autre philosophe introduisit l'amitié et la discorde, causes opposées de ces effets opposés. Car si l'on veut suivre de près Empédocle, et s'attacher au fond de sa pensée plutôt qu'à la manière presqu'enfantine dont il l'exprime, on trouvera que l'amitié est la cause du bien, et la discorde celle du mal ; de sorte que peut-être n'aurait-t-on pas tort de dire qu'Empédocle a parlé en quelque manière et a parlé le premier du bien et du mal comme principes, puisque le principe de tous les biens est le bien lui-même, et le mal le principe de tout ce qui est mauvais.