« Traité de la nature, de la culture et de l’utilité des pommes de terre » : différence entre les versions

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L'acide qu'on attribue aux pommes de terre eſt encore un deffaut dont on les accuſe ;
 
 
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Cependant, quoique l'uſage immodéré puiſſe le rendre mal ſain, cet acide n'eſt pas un deffaut : ſi tous les alimens en manquoient, la ſanté s'en trouveroit mal. Il s'agit toujours de tant de circonſtances, qu'on ne peut conſeiller, ni deffendre un aliment ſans aucune reſtriction.
 
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On conſeille cette culture pour ſatiſfaire aux beſoins de la nourriture, & pour les prévenir. Cela doit donc regarder principalement les gens mal aiſés & pauvres, qui on peu ou point de reſſources. Où prendront-ils le terain néceſſaire pour planter ? Ou l'engrais pour rendre cette cultur auſſi utile que poſſible ?
 
Ces deux queſtions méritent l'attention la plus ſcrupuleuſe. Si le général des cultivateurs parmi le peuple ne s'aveugloit pas tant ſur leur propre intérêt ; s'ils ſongeoient, qu'un arpent tant ſoit peu cultivé, rapporte plus que dix & que vingt, & en pomme de terre, autant que quarante ou cinquante qui ſont en friches ; que comme en Irlande & ailleurs, après en avoir tiré un produit incomparable, ils en feroient de bons champs pour les bleds ; d'excellens prez même pour une quantité de fourage, dont on manque, & au moyen duquel on nourriroit plus facilement quatre ou ſix bêtes à corne à l'écurie, qui ſeroient plus ſaines, plus vigourreuſes ; les vaches
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donnant plus de lait que celles qu'actuellement paiſſent en mauvais pâturages ; qu'ils quadrupleroient le fumier dans les courtines au moyen de ce bétail, & eu conſervant celui qui ſe perd au pâturage ſans l'améliorer, ſur-tout en Eté, où un char tiré de l'écurie, & provenant de l'herbe verte, vaut autant que deux faits en hyver ; que ces augmentations de bétail, de fourage, de fumier, de productions de la terre, allant par une circulation néceſſaire toujours plus en augmentant, les mettraient tous, ſ'ils ne craignent pas la peine, à leur aiſe & au-delà. Il ne feroit pas néceſſaire d'élever cette queſtion. Il faut pourtant eſpérer, que les grands, que les heureux ſuccès qu'ont éprouvé les Communes, qui ont ſuivi cette ſage méthode, les excitera à vouloir jouir du même bonheur ; comme entr'autres les colons du Canton de Zurich, où tout a pris la face la plus riante, au moyen d'un emploi convenable des Communs.
 
En attendant le leur préfenterai une autre .réflexion,
 
Lorſque les Communes ont acquis ces terrains, ſoit par la bénéficence de leurs ſuperieurs, ſoit, ce qui eſt plus rare, de leurs propres deniers, à quoi viſoit-on ? ''d'être en état de pourvoir aux beſoins de la Commune'', & ''de chacun de ſes membres''. Quel en eſt le plus fort, le plus indiſpenſable ? ''La nourriture''. Qui en a le plus de beſoin, de tous ceux qui comme Communiers ont droit d'y participer ? ſans doute les ''pauvres'', qui n'ont d'autre moyen de ſe la procurer, étant ou trop vieux ou
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trop infirmes, trop jeunes, eſtropiés, ou qui ſouhaitant de gagner leur vie parle travail, ne trouvent pas à ſ'occuper utilement, ſur-tout en hyver, ſaiſon pendant laquelle il leur faut également de la nourriture. ſi tout ceci ne ſauroit être nié, il faudroit avoir renoncé à l'eſſence de la religion, à tout ſentiment d'humanité, ſi on vouloit fermer ſon cœur aux cris douloureux de ces objets ſi dignes de pitié, & ne pas rechercher de pareils moyens ; je ne dirai pas, poſſibles, mais faciles, qui ſe préfentent d'eux-mêmes, de les ſoulager.
 
Si on s'opiniâtroit à ne pas vouloir faire un arrangement général, que du moins on employe une partie de ce fond commun pour un but ſi ſaint, à tirer de la détreſſe, ces objets de compaſſion qui en ſont communiers, fait en aſſignant à chacun une portion convenable, & telle qu'il lui faut, pour, en la cultivant, remédier à ſes beſoins ; ſoit, ſi on croyoit, que, faute d'engrais, ou de la ligueur convenable à ce travail,' ils n'en puiſſent tirer tout l'avantage qu'on en devroit eſpérer, la Commune fit défricher une ou plusieurs pièces, la fumer & la travailler à ſes frais, en y employant ces mêmes pauvres entant qu'ils ſeroient en force de le faire ; néanmoins en leur payant leur ſalaire, puiſqu'ils doivent avoir dequoi vivre pendant ce temps; qu'en ne le faiſant pas, ils en ſeroient revoltés, & les uns fortitifiés dans leur goût pour la ſainéantife ; on diſtribueroit alors à l'approche de l'hyver ce qu'il leur faut pour leur nourriture, en divers légumes, principalement
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en pommes de terre., en excluant les ſainéans : ''Qui ne travaille pas, ne doit pas manger''. Les Communes ne ſauroient aſſez veiller à de pareilles gens, qui vivans dans l'oiſiveté & les vices, y élèvent leurs enfans, en perpétuent la race, en augmentent le nombre, en en attirant d'autres par leurs mauvais exemples ; gangrène qui gagne inſenſiblement, & énerve tout le corps.
 
Par un de ces moyens, on parviendra à toutes les parties de ce but ſalutaire ; les pauvres ſeront nourris, la mendicité ceſſera, ou diminuera ; les particuliers ne ſeront plus tant importunés ; les Communes, qui doivent pourvoir à pareils beſoins, d'une maniere ou d'autre, conſiderablement déchargées, & les fainéans obligés au travail. J'en ai vu l'expérience & la difference parmi celles qui agiſſoient differemment.
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Il y a des particuliers qui dorment des pièces à cultiver à des pauvres ; quand même ils n'en prendraient aucune retribution en moitereſſe ; ce qui n'eſt pas juſte, s'ils n'y fourniſſent point de fumier, iis y gagneroient conſiderablement : dans l'année de jachere ils n'en tirent rien, & on les leur rend prêtes à recevoir la ſemence, ſans qu'il leur en coute de la peine.
 
Si on entreprenoit pareilles inſtitutions, il ferait néceſſaire d'établir des infpecteurs charitables & vigilans en même temps, pour examiner d'un côté les beſoins réels & non mérités, & les ſoulager ; d'un autre en exclure les mendians volontaires, comme auſſi de tâcher de fournir de l'ouvrage des fabriques ou auſſi,
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pendant la ſaiſon morte, à ceux qui ne demandent pas mieux que de gagner leur vie par le travail.
 
Il faut encore engager ceux qui poſſedent quelque cabane, dont il n'y a aucune qui n'ait quelque terrain, ſi peu que ce ſoit, d'en cultiver chaque pas, chaque pied, où il y a ſouvent des buiſſons, des ronces, des vieilles hayes, de mauvaiſes herbes; tout ceci peut être mis en valeur par les pommes de terre ; la perſonne la moins propre au travail, peut s'amuſer d'une occupation ſi légere, & jouïr de la ſatisfaction d'en recueillir quelques paniers de pommes de terre, pour ſa proviſion d'hyver.
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On fait une ou pluſieurs foſſes, proportionnées à la quantité de materiaux que l'on compte pouvoir y employer, en lieu ſec, qu'il faudroit couvrir par le motif ci-après énoncé; ceux qui n'ont pas des planches, paille, &c. à y employer, peuvent ſe ſervir de branches d'arbres ou arbriſſeaux, ſur-tout de ſapin: quand même il faut renouveller cette operation chaque année, on ne doit pas en regretter la peine, les feuilles ou piquants, qui en tombent, augmentent l'engrais, & les branches ſeches fourniſſent quelque bois à la cuiſine; ſi ceci paroiſſoit donner encore trop de peine, il faudroit du moins tâcher d'adoſſer cette foſſe, contre quelque maiſon, &c. du côté du vent, pour la garantir des pluyes fortes & abondantes.
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On remplira peu à peu ces foſſes de tout ce qu'on peut ramaſſer de putreſcible, ou des choſes qui peuvent agir par la fermentation ; mauvaiſes herbes des jardins, de celles encore plus mauvaiſes, ſouvent venimeuſes & âcres, d'autant plus propres à cet uſage, qu'elles contiennent plus de ſels, & qu'on trouve en quantité le long des chemins & dans des terrains incultes ; des feuilles molles, [non de chêne ou de hêtre] le rebut de ce qu'on confume dans le ménage ; tous les animaux & leurs parties, le ſang, les lies de vin diſtillées; le marc de raiſins, ſuye, branches d'arbres menues & hachées, ſur-tout des lapins, cendres leſſivées ou non ; tout ce qu'on peut ramaffer autour & dans la maiſon ; bref tout ce qui peut ſe conſumer & changer de nature par la pourriture ou fermentation, comme il eſt dit ci-deſſus,
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Dans ces foſſes il faut jetter par couche de la terre, ſoit celle qu'on en a tirée, ſoit d'autre, auſſi bonne que poſſible, ou celle que l'on peut ſe procurer, pourvû que ce ſoit de la terre & non des pierres, ce qui, avec les autres materiaux deſignés ci-deſſus, & ſur-tout, les arroſemens d'urine, augmentera la maſſe d'un engrais excellent, ſur-tout pour les pommes de terre. Voilà pour le ſolide.
 
Voici le ''liquide''. Toute urine eſt tellement ſuperieure à tout autre engrais, qu'on peut la nommer la ''quinteſſence'', au point que ceux qui en connoiſſent l'effet & la valeur, donneroient volontiers trois ou quatre chars de fumier, contre une boſſette d'égoût des écuries, ſurtout des vaches des brebis & des cochons, au lieu
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que cet engrais précieux eſt ſi à charge à la plus grande partie des habitans de ce pays qu'ils le font écouler dans les chemins, pour s'en débaraſſer ; de crainte apparemment que leurs terres, ſouvent ſi ſteriles, n'en ſoyent fécondées, reduits en prez, ou rendus propres aux productions les plus abondantes.
 
Si l'on veut les ramaſſer dans des reſervoirs; tels que j'ai fait faire, & les mener par boſſettes ſur les terrains qu'on veut améliorer, on en verra l'effet ; il faut pourtant avertir que cet ouvrage doit ſe faire pendant l'hyver, ou, ſi c'eſt en Eté, lorſque la quantité n'eſt pas ſi grande, ſoit parce que les vaches des riches ſont pour la plupart à la montagne, ſoit parce que cet égoût des autres ſe perd avec le fumier ſur les pâturages, il faut le mêler avec de l'eau, & l'y conduire pendant ou avant une pluye; les ſels fertiliſants y font ſi forts, qu'ils bruleroient ſoit l'herbe, ſoit autres productions. c'eſt ſur-tout pour les pommes de terre qu'il faut, ou s'en ſervir pour préparer la terre avant l'hyver, ou délayé avec beaucoup d'eau, pour les en arroſer lorſqu'elles ſont ſorties de terre, avant qu'on les butte pour la premiere fois.
 
Il y a peu de gens de la campagne qui n'ayent, ſinon une vache, du moins quelque brebis, cochons, chèvres, &c. ; qu'ils ayent donc un ſoin extrême de ces égoûts pour en arroſer les materiaux dans la foſſe ; les eaux des leſſives & autres, qui contiennent des ſels, font très bonnes, & ſi on n'a pas de bétail, qu'on ne néglige point l'urine que l'on peut ramaſſer dans la maiſon.
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On comprendra donc pourquoi j'ai fortement conſeillé de mettre cette foſſe à l'abri des fortes pluyes ; il pourroit en arriver de ſi abondantes & de ſi durables qu'elles rempliroient les foſſes, les feroient déborder & entraineroient une grande partie des ſels qui ſ'y feroient amaſſés & formés ; ce qui feroit une perte réelle & irréparable.
 
Apres une année, on fait paſſer par un temps ſec tout ce qui ſe trouve dans la foſſe par une claye pas trop ſerrée ; s'il y a des materiaux pas tout-à-fait conſumés, il n'en ſera que mieux pour les pommes de terre, parce qu'ils entretiendront la terre qui les entoure, toujours légere, en même temps qu'ils leur fourniront l'engrais néceſſaire. "
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Si les gens mal à leur aiſe veulent, ſuivre cette inſtructon, il n'y en a point, qui s'y appliquant, ne puiſſe ramaſſer ſuffiſamment d'engrais pour une plantation aſſez conſiderable & ſuffiſante.
 
Si les préjugés, la pareſſe ou la négligence empêchent quelques cultivateurs & habitans de la campagne de profiter des avis que j'ai eu ſoin de rendre auſſi utiles que faciles, je me flatte que mon eſpérance & mon but ſe trouveront remplis, par le nombre beaucoup plus conſiderable de ceux qui, en les ſuivant, y trouveront un très grand avantage : c'eſt tout ce
=== no match ===
que le ſouhaite !
 
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