« La physique depuis vingt ans/Le Temps, l’espace et la causalité dans la physique contemporaine » : différence entre les versions

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Correction complète des formules mathématiques
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toujours pour les observateurs O, avec une même vitesse V dans toutes les directions. Quand la lumière, transmise à travers la lame O, se propage vers le miroir N, celui-ci, pour les observateurs O, fuit devant la lumière avec la vitesse v ; cette lumière, qui se propage avec la vitesse V, mettra, par suite, pour atteindre le miroir, un temps : ON/(V-v) . Au retour la lame O vient au-devant de la lumière avec la vitesse v. La durée du retour sera par conséquent ON/(V+v) et le temps total pour l'aller ci retour sera
 
t1 = ON/(V-v) + ON/(V+v) = ON.[2V/(V2V^2-v2v^2)] .
 
La lumière réfléchie sur la lame O vers le miroir M trouvera à son retour, la lame O déplacée et devra parcourir les deux côtés du triangle isocèle OM1O1 dont la hauteur est égale à OM et tel que les chemins OM1O1 et OO1 sont parcourus pendant le même temps, le premier par la lumière avec la vitesse V, le second par la lame O avec la vitesse v. Ce temps a pour valeur
 
t2 = OO1/v = 2OM12.OM1/v = 2OM2.OM/[sqrt(V2V^2-v2v^2)]
 
Si l'appareil est réglé pour donner l'aspect de franges qui correspondent à l'égalité des temps, on doit avoir t1 = t2 d'où
 
ON/OM = 1 - sqrt(v2v^2/V2V^2) .
 
Supposons maintenant qu'on fasse tourner la plate-forme de 90°. Les distances ON et OM permutent leurs directions. La durée d'aller et retour dans la direction de la vitesse v devient
 
t'1 = OM × [2V / (V2V^2-v2v^2)]
 
et dans la direction perpendiculaire
 
t'2 = 2ON/[sqrt(V2V^2-v2v^2)]
 
Le rapport de ces temps est
 
t'2/t'1= [sqrt(1-v2v^2/V2V^2)] × ON/OM = 1 - (v2v^2/V2V^2) .
 
Les durées de propagation doivent donc être inégales : l'écart relatif étant égal au carré du rapport de la vitesse v à la vitesse de la lumière. Pour v = 60 km. par seconde et V = 300 000 km., cet écart est de 1 / 25 000 000 ou 40 milliardièmes, c'est-à-dire tel que la précision des mesures est largement suffisante pour le mettre en évidence s'il existe. On devrait s'attendre à ce que l'égalité des durées de parcours, réalisée pour une première position de la plate-forme cesse d'exister quand on fait tourner celle-ci, que l'aspect des interférences vues dans la lunette change à mesure que la plate-forme tourne.
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rotation. Si on suppose qu'elles puissent changer et devenir respectivement ON' et OM' on a, pour la seconde position
 
t'2/t'1 = sqrt[1-(v2v^2/V2V^2)] × ON'/OM'
 
et l'hypothèse de Lorentz conduit aux relations suivantes : la distance OM, primitivement perpendiculaire à la direction du mouvement, doit se contracter pendant la rotation et devenir
 
OM' = OM. sqrt[1 - (v2v^2/V2V^2)] .
 
Inversement la distance ON, primitivement parallèle à la direction du mouvement doit, pendant la rotation, se dilater dans le même rapport et devenir
 
ON' = ON/sqrt[sqrt(1-(v2v^2/V2V^2))]
 
d'où par division
 
ON'/OM' = 1/[1-(v2v^2/V2V^2)] × ON/OM
 
et
 
t'2/t'1 = ON/OM × sqrt[1/(1-v2v^2/V2V^2)] = t2/t1
 
de sorte que l'égalité de t1 et t2 entraîne l'égalité de t'1 et t'2. L'aspect des franges, conformément à l'expérience, ne doit pas changer pendant la rotation. On peut montrer que cette même hypothèse de la contraction suffit à expliquer le résultat négatif des autres expériences électromagnétiques. Voyons nettement comment cette hypothèse est en contradiction avec l'univers de la mécanique. Elle exige que tous les corps solides changent de forme pour des observateurs qui les voient passer avec la vitesse v quand leur orientation change. Au contraire, pour des observateurs liés à ces objets, la forme doit rester invariable puisque les règles dont ils pourraient se servir pour mesurer les dimensions étant liées au corps à mesurer devraient, pour les premiers observateurs, subir la même contraction. Il en résulte que la forme d'un solide devra être différente pour des observateurs qui lui sont liés et pour d'autres en mouvement par rapport à lui. Ceci est en contradiction avec la remarque faite plus haut à propos de l'espace ordinaire. Le raisonnement que nous avons fait sur l'expérience optique en nous plaçant au point de vue d'observateurs qui voient passer la plateforme, pourra être fait, naturellement, par des observateurs liés à celle-ci, s'ils se considèrent comme en mouvement avec la vitesse v par rapport au milieu qui transmet la lumière ou les actions électromagnétiques, et s'ils pensent tirer de l'expérience un moyen de mettre ce mouvement en évidence. C'est à ce point de vue qu'on s'est placé tout d'abord. Le résultat négatif d'une première expérience pouvait signifier qu'à ce moment particulier la Terre se trouvait, par hasard, immobile dans l'éther ; mais alors six mois plus tard, elle aurait dû se mouvoir par rapport au milieu à raison de 60 kilomètres par seconde et cependant à ce moment, l'expérience restait toujours
négative. L'hypothèse de la contraction, destinée à expliquer ce résultat, fut faite d'abord sous cette forme qu'un corps en mouvement par rapport à l'éther se contracte, dans la direction de sa vitesse, dans le rapport sqrt([1-(v2/V2)].
Cet énoncé a, selon M. Einstein, l'inconvénient de faire intervenir,avec l'idée d'éther, celle d'un système de référence particulier qui serait immobile par rapport à lui, alors que l'expérience au contraire nous montre simplement que rien ne différencie les divers systèmes de référence, en mouvement les uns par rapport aux autres, qui sont liés à la Terre dans ses positions successives sur l'orbite. M. Einstein a traduit de façon immédiate et simple les faits expérimentaux en énonçant, sous sa forme générale le principe de relativité que j'ai donné au début. En se plaçant au point de vue particulier des
phénomènes optiques, on peut dire : si divers groupes d'observateurs sont en mouvement les uns par rapport aux autres, les choses se passent de la même façon pour tous ; chacun d'eux peut se considérer comme immobile par rapport au milieu qui transmet la lumière et tout se passe pour lui comme si la lumière se propageait avec la même vitesse dans toutes les directions. Pour qu'il puisse en être ainsi, le raisonnement qui précède nous montre qu'un corps ne doit pas avoir la même forme pour des observateurs qui lui sont liés et pour d'autres qui le voient passer, et qu'il doit paraître à ces derniers contracté, dans la direction de sa vitesse, dans le rapport de sqrt([1-(v2/V2) ].
Soient O les observateurs liés à la Terre dans sa première position, O' ceux qui font six mois plus tard l'expérience négative de Michelson et Morley. Au point de vue de M. Einstein, ces derniers observateurs O' feront sur cette expérience le raisonnement I, et les observateurs O, qui feront le raisonnement II, devront conclure à la contraction de Lorentz pour le système en mouvement par rapport à eux sur lequel l'expérience est faite. Cette contraction de Lorentz, incompatible avec les conceptions habituelles de l'espace et du temps, s'accompagne d'autres divergences analogues, d'égale importance, et que nous allons envisager successivement. Ayant d'y arriver, nous pouvons montrer d'une autre manière comment les faits expérimentaux exigent un remaniement du groupe de Galilée, de l'espace et du temps qui lui correspondent. Ces faits conduisent à admettre que les lois des phénomènes physiques sont les mêmes pour divers groupes d'observateurs en mouvement les uns par rapport aux autres, et par suite que les équations qui traduisent ces lois doivent se présenter sous la même forme pour tous ces groupes. Quand un même phénomène est examiné simultanément, comme nous venons de le faire pour l'expérience de Michelson et Morley, par deux groupes d'observateurs O et O', les mesures des diverses grandeurs, distance dans l'espace, intervalles dans le temps,
grandeurs mécaniques, électro-magnétiques, optiques, etc., faites par les observateurs O doivent s'exprimer en fonction des mesures faites par les observateurs O' et des paramètres qui déterminent le mouvement relatif des deux groupes, de manière que ces expressions substituées dans les équations exprimant les lois telles qu'elles se présentent pour les observateurs O, conservent à celles-ci leur forme en fonction des mesures faites par les observateurs O'. Les transformations qui permettent de passer d'un système à l'autre doivent donc être telles qu'elles laissent invariante la forme des lois de la physique, comme la transformation du groupe de Galilée et les transformations connexes de la masse et de la force laissaient invariantes les équations de la mécanique. Or nous connaissons, avec un haut degré d'exactitude, les lois qui régissent les phénomènes
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comme cette distance est parcourue pendant le temps t - t0 par la lumière et que celle-ci, pour des observateurs quelconques, se déplace avec la vitesse V dans toutes les directions, on doit avoir, pour le couple considéré d'événements :
 
(x - x0)^2 + (y - y0)^2 + (z - z0)^2 - V^2.(t - t0)^2 = 0
 
La lumière se propageant aussi avec la vitesse V dans toutes les directions pour les observateurs O', on doit avoir en même temps :
 
(x' - x'0)^2 + (y' - y'0)^2 + (z' - z'0)^2 - V^2.(t' - t'0)^2 = 0
 
Pour qu'une valeur nulle de la première expression entraîne nécessairement une valeur nulle de la seconde, il faut que les formules de transformation, qui permettent d'exprimer les composantes de la distance dans l'espace et l'intervalle dans le temps de deux événements pour les observateurs O, en fonction des mêmes éléments mesurés par les observateurs O', possèdent la propriété de laisser invariante l'expression :
 
R = (x - x0)^2 + (y - y0)^2 + (z - z0)^2 - V^2.(t - t0)^2 = d^2 - V^2.(t - t0)^2 (1)
 
x0, y0, z0, t0, x, y, z, t, étant deux événements, quelconques. Cette quantité R, qui a la même valeur pour tous les groupes d'observateurs, joue dans l'Univers de Minkowski un rôle analogue à celui de la distance de deux points en géométrie. Le groupe de Lorentz est déterminé par la condition d'invariance de cette quantité. Dans le cas particulier où les deux systèmes d'axes ont même orientation et où leur mouvement relatif a lieu dans la direction des x, avec la vitesse v, la transformation de l'espace et du temps est déterminée par les équations suivantes, où ß représente le rapport v/V, de la vitesse du mouvement relatif à la vitesse de la lumière :
 
x - x0 = [1/(sqrt(1 - ß2ß^2) )].[((x' - x'0)^2 + v(t' - t'0)]
 
y - y0 = y' - y'0
 
z - z0 = z' - z'0
 
t - t0 = [1/(sqrt(1 - ß2ß^2))].[t'-t'0-(ß/V).(x' - x'0)]
 
Dans le cas particulier où l'on suppose que le premier événement est choisi simultanément comme origine par les deux groupes
d'observateurs, ces équations deviennent simplement
 
x = [1/(sqrt(1 - ß2ß^2))].(x'+vt')
 
y = y'
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z = z'
 
t = [1/(sqrt(1 - ß2ß^2))].(t' - (ß/V ).x') .
 
Remarquons d'ailleurs que ce groupe se confondrait avec le groupe de Galilée si l'on y supposait infinie la vitesse de propagation V, puisque ß deviendrait nul pour une vitesse v quelconque. Comme la vitesse de la lumière V est effectivement très grande par rapport aux vitesses v observables expérimentalement (au maximum 60 kilomètres par seconde), ß est toujours très petit et, par suite, le groupe de Galilée est, pour le groupe de Lorentz, une première approximation, largement suffisante d'ordinaire, sauf pour des expériences extraordinairement délicates comme celles de Michelson et Morley.
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d'où
 
x' - x'0 = (x - x0). [sqrt(1 - ß2ß^2)]
 
y' - y'0 = y - y0
 
z' - z'0 = z - z0
 
l'objet aura donc les mêmes dimensions pour les deux groupes d'observateurs dans les directions des y et des z perpendiculaires au mouvement; il sera au contraire plus court dans la direction du mouvement pour les observateurs 0', qui le voient passer, que pour les observateurs 0, pour lesquels il est immobile. Cette contraction de Lorentz a lieu dans le rapport sqrt(1 - ß2ß^2) . Il est d'ailleurs remarquable que cette contraction est réciproque, puisqu'au point de vue du principe de relativité rien ne différencie les observateurs O des observateurs O', un objet fixe par rapport aux observateurs O paraissant contracté aux observateurs O'. Si par exemple les deux groupes tiennent chacun une règle et si ces règles leur paraissent égales au passage quand elles sont tenues perpendiculairement à la direction du mouvement, au contraire, quand les règles seront tenues parallèles à la direction du mouvement relatif, chacun des groupes verra, au passage, la règle de l'autre plus courte que la sienne. Pour comprendre qu'il en puisse être ainsi, il faut porter notre attention sur un second aspect paradoxal de la transformation de Lorentz, sur le fait que la simultanéité n'a plus qu'un sens relatif, contrairement à l'hypothèse fondamentale du groupe de Galilée ; deux événements simultanés pour l'un des groupes d'observateurs ne le sont
pas en général pour l'autre à moins que leur coïncidence dans le temps ne s'accompagne en même temps d'une coïncidence dans l'espace. En effet, la dernière des formules de transformation nous donne pour deux événements simultanés au point de vue des observateurs O', c'est-à-dire pour t' - t'0 = 0 :
 
t - t0 = [1/sqrt(1 - ß2ß^2)] × (ß/V ).(x0' - x') .
 
Les deux événements ne sont donc pas simultanés pour deux observateurs O, en même temps que pour O', à moins que x' ne soit
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et en N dans l'expérience précédente, puisque pour les observateurs O, la distance dans l'espace des deux événements est 2V et que leur intervalle dans le temps est nul. Il est facile de voir que si cette condition est remplie pour un groupe d'observateurs, elle l'est en même temps pour tous les autres. En effet, si d est la distance dans l'espace des deux événements et t- t0, leur intervalle dans le temps pour un groupe particulier d'observateurs, cette condition peut s'écrire:
 
d^2 > V^2.(t- t0)^2
 
d'où il résulte que la quantité R, d'après l'équation (1), est positive, et comme cette quantité est invariante, elle conserve sa valeur et son signe pour tous les groupes d'observateurs, et la condition est par suite remplie pour eux tous. Pour montrer que cette condition est nécessaire, remarquons que si l'ordre de succession de deux événements peut être renversé, quand on
passe d'un système de référence à un autre, il y a, certainement, un système de référence par rapport auquel les deux événements sont simultanés (les observateurs O de l'expérience précédente) et, pour celui-ci, la quantité R se réduit au carré de la distance, qui est une quantité essentiellement positive. Pour un couple d'événements de ce genre, on a :
 
d^2 = R + V^2.(t- t0)^2,
 
comme l'invariant R est le même pour tous les groupes d'observateurs, il résulte de là que la distance dans l'espace de deux événements de ce genre est la plus petite possible pour les observateurs qui voient ces événements simultanés. C'est précisément là l'énoncé le plus profond de la contraction de Lorentz. La longueur d'une règle étant la distance dans l'espace de deux positions simultanées des extrémités de cette règle, par rapport à certains observateurs qui la voient passer, cette
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de Lorentz. Appelons temps propre pour une portion de matière, l'intervalle de temps pour des observateurs qui lui sont liés entre deux événements qui s'y succèdent, qui coïncident dans l'espace pour ces observateurs. Pour tout autre groupe d'observateurs du mouvement, pour tous systèmes de référence par rapport auxquels la portion de matière se meut, l'intervalle de temps entre ces événements sera plus grand que le temps propre, de même que la distance dans l'espace de deux événements, dont le couple appartient à la première catégorie, est plus grande pour des observateurs quelconques que pour ceux à qui les événements paraissent simultanés. En effet, pour un couple de la seconde catégorie, la quantité R est négative et l'on a
 
V^2.(t- t0)^2 = d^2 - R.
 
R étant invariant, t- t0 sera minimum pour les observateurs par rapport auxquels d sera nulle, c'est-à-dire par rapport auxquels les deux événements coïncident dans l'espace. Cette valeur minimum mesurera, pour les deux événements, l'intervalle de temps propre à la portion de matière où ils se succèdent, au système de référence pour lequel ils coïncident dans l'espace. Pour tous les autres systèmes de référence l'intervalle de temps sera plus grand et ceci montre encore qu'aucun renversement dans l'ordre de succession n'est possible. Cette existence du temps propre m'a permis de conclure que si un système matériel se meut avec une vitesse suffisamment grande, suivant un cycle fermé, par rapport à des observateurs O en mouvement uniforme, le temps propre qui se sera écoulé pour lui entre le départ et le retour sera moindre que la mesure de même intervalle, faite par les observateurs O entre son départ et son retour. Cette conclusion est exacte dans la mesure où nous pouvons affirmer