« Du libre arbitre (Lorenzo Valla) » : différence entre les versions

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AN. Tu penses que l'on ne peut trouver ces mets des dieux --- comme tu dis --- chez personne?
 
LAU. Comment ne le penserais-je pas? N'as-tu pas lu les écrits de Paul, à propos des deux enfants de Rebecca et de Isaac? «En effet, lorsqu'ils n'étaient pas encore nés, et n'avaient fait ni bien ni mal, afin que la volonté de Dieu préserve [son] choix dans l'avenir, ce n'est pas par des actes, mais par une voix, qu'il est dit que l'aîné servira le plus jeune, ainsi il est écrit: j'ai aimé Jacob, mais j'ai haï Esau. Que devrions nous dire? Est-ce qu'en cela Dieu est inique? Non. Car il dit à Moise: j'aurai pitié de celui qui me fait pitié, et je ferai preuve de compassion envers celui dont j'aurai pitié. Ainsi ce n'est pas de celui qui veut, ni de celui qui agit que cela dépend mais de la miséricorde de Dieu. Car l'Écriture dit à Pharaon: Voilà pourquoi je t'ai moi-même éveillé, ainsi par toi je montre mon pouvoir, et ainsi mon nom sera annoncé à toute la terre. Aussi de qui il veut il a pitié, et qui il veut il endurcit. C'est pourquoi tu me dis: Qu'y a-t-il encore à chercher? Qui résistera à sa volonté? O' homme, qui es-tu pour tenir tête à Dieu? Est-ce que la création dit à celui qui l'a créé: pourquoi m'as tu fait ainsi? Le potier n'a-t-il pas le pouvoir, de la même masse, certes de faire un vase d'honneur, mais aussi un autre d'outrage?» Et Paul ensuite, comme si ses yeux étaient alors aveuglés par la trop grande magnificence de la sagesse de Dieu, s'écrit: «Ô, grandeur des richesses de la sagesse et de la science de Dieu, comme ses jugements sont incompréhensibles et ses voies impénétrables!». Mais si lui, qui est un vase élu, et qui fût emporté jusqu'au troisième ciel, a entendu les paroles secrètes, qu'il n'est pas permis à l'homme de prononcer, celles-ci d'ailleurs, que l'on ne peut ni simplement prononcer, ni même saisir, qui donc espère pouvoir [les] découvrir et comprendre? Ainsi, remarque attentivement le fait, que ce n'est pas de la même manière qu'il est dit que le libre arbitre est empêché par la volonté de Dieu, que par la prescience: car la volonté possède une cause antérieure qui se trouve dans la sagesse de Dieu. En effet, s'il endurcit l'un et a pitié de l'autre, c'est parce que, très sage et très bon, il [y] est amené par une digne cause; et il est impie de penser autrement, [car] à moins qu'il ne soit pas parfaitement bon, il agit convenablement; en ce qui concerne la prescience au contraire, elle n'est pas antérieure, et n'est en aucun cas la cause de la justice et de la bonté; en effet nous ne parlons pas ainsi: pourquoi a-t-il préconnu cela? mais ainsi: pourquoi a-t-il voulu? nous dorénavant, recherchons seulement dans quelle mesure Dieu est bienveillant lorsqu'il supprime la liberté de l'arbitre; or il [la] supprime s'il est impossible que cela advienne autrement que ce qui est préconnu. Mais en réalité il ne cause aucune nécessité, et ne nous prive pas du libre arbitre, en endurcissant les uns, et en ayant pitié des autres, lorsque en vertu de son immense sagesse et de son immense pureté il fait cela: pour ce qui est des causes, il en a élaboré la raison caché pour ainsi dire dans quelque mystérieux atelier. Et je ne vais pas dissimuler les quelques tentatives audacieuses pour découvrir cette raison, qui disaient que ceux qui sont endurcis et éprouvés sont endurcis et éprouvés conformément à la justice: car nous sommes [faits] de cette masse, souillée par la faute des premiers aïeux et changée en argile [boue]. Ainsi, pour aller plus loin, et répondre d'un seul raisonnement: pourquoi Adam lui-même, fait à partir d'une matière non souillée, non seulement s'est endurci en péchant, mais encore a engendré une universelle masse d'argile dans sa descendance?
 
Et il en est de même avec les anges. Certains sont endurcis, et certains reçoivent la miséricorde, tandis que tous sont faits de la même substance, de la même masse, de [quelque chose] de non-souillé, eux de plus dont je dirais audacieusement qu'ils restent d'or dans la nature de leur substance et la qualité de leur masse, pour ainsi dire, et qui ne sont pas changés par leur élection en une meilleure matière, ni par leur réprobation en une plus mauvaise; et tandis que les uns recueillent pour ainsi dire la grâce de ceux des vases qui ont l'honneur d'être choisis pour le service de la table divine, les autres en vérité peuvent être jugés, comme des vases, à exiler des yeux, car toute l'horreur et l'immondice qu'ils engendrent est un plus grand outrage que s'ils étaient en argile; pour cette raison leur condamnation est plus affligeante que celle des hommes. Plus grands en effet sont les outrages infligés à l'or, dont sont faits les anges, [que ceux infligés] à l'argent, dont sont faits les hommes, lorsqu'on les recouvre d'immondices. Aussi en Adam, ce n'est pas de la matière argenté immuable, ou, si tu préfères, de l'argile, mais elle est restée la même qu'elle était avant. C'est pourquoi, tel que c'était en lui, tel c'est en nous. Paul ne dit-il pas, de la même masse d'argile, on fait de l'un certes un vase d'honneur, mais de l'autre un vase d'injure? Et on ne peut pas dire que le vase honorable soit fait d'une matière souillée. Nous sommes donc des vases d'argent --- je préfère dire cela plutôt que d'argile --- et nous étions depuis longtemps des vases d'injure, de condamnation, dis-je, et de mort, et non d'insensibilité. En effet Dieu a répandu en nous, à cause de la prévarication des premiers aïeux en laquelle tous nous avons pêché, le châtiment de la mort, et non la faute, qui est venu de l'endurcissement. De même Paul dit «De Adam jusqu'à Moise a régné la mort, même en ceux qui n'ont pas pêché, par analogie avec la prévarication d'Adam».