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<references />
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|}
 
 
=== ÉCHAFAUD ===
s. m. <i>Chaffaud</i>. Dans l'art de bâtir on entend par <i>échafaud</i> l'œuvre de charpente provisoirement établie pour
permettre d'élever
les maçonneries. Les échafauds sont adhérents à la construction qu'on
élève ou en sont indépendants. Les constructions du moyen âge, ainsi
que les constructions romaines, étaient montées au moyen d'échafauds tenant à la maçonnerie, et qu'on posait en élevant celle-ci. À cet
effet, on réservait dans les murs soit en brique, soit en moellon, soit
en pierre, des trous de 0,15 c. de côté environ, profonds, et dans
lesquels on engageait des chevrons ou des rondins en bascule que l'on
soulageait à leur extrémité opposée par des pièces de bois verticales.
Ces chevrons ou rondins engagés sont les <i>boulins</i>, et les trous réservés
pour les recevoir s'appellent <i>trous de boulins</i>; les pièces de bois verticales
sont désignées sous le nom d'<i>échasses</i>. Les architectes du moyen
âge élevaient ainsi leurs plus grands édifices au moyen de boulins et
d'échasses d'un médiocre équarrissage. Sur ces boulins, placés à des
distances assez rapprochées, on posait des planches, <i>plateaux</i>,
<i>plabords</i>,
sur lesquels se tenaient les ouvriers; ces planchers, plus ou moins larges,
suivant le besoin, se répétaient de six pieds en six pieds au plus;
afin de
rendre chaque partie de la construction accessible aux travailleurs. Les
matériaux de gros volume n'étaient jamais montés sur ces planchers ou
<i>ponts</i>, mais sur les murs eux-mêmes, au moyen d'engins placés sur le
sol correspondant à des grues ou chèvres haubannées sur la construction
même. D'ailleurs, presque toujours, les matériaux étaient montés par
l'intérieur, bardés sur les murs, posés et jointoyés par les ouvriers circulant
sur ces murs mêmes ou sur les échafauds.
 
L'échafaud d'un édifice romain ou du moyen âge montait donc en
même temps que la construction. Les constructeurs de ces temps reculés
ne faisaient certainement pas de grands frais d'échafaudages. Ils laissaient
les trous de boulins apparents sur les parements, ne se donnant pas la
peine de les boucher à mesure qu'ils démontaient les échafauds lorsque
la construction était terminée. Alors on ne <i>ravalait</i> pas les édifices;
chaque pierre était posée toute taillée, et il n'y avait plus à y toucher;
donc le jour où la dernière pierre était mise en place, l'édifice était
achevé, et l'échafaud pouvait être enlevé. Il faut observer aussi que les
grands édifices gothiques présentent des retraites prononcées à différentes
hauteurs, ce qui permettait de reprendre sur chacune de ces retraites un
système d'échafaudage, sans qu'il fût nécessaire de porter les échafauds
de fond. Cependant il est tels édifices, comme les tours de défense, par
exemple, qui s'élèvent verticalement à une grande hauteur sans ressauts,
sans retraite aucune. Il est intéressant d'étudier comment ont été montées
ces énormes bâtisses.<span id=Coucy>
</div>
[[Image:Echafaud.donjon.Coucy.png|center]]
<div class="text">
La construction du donjon de [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes C#Coucy|Coucy]], qui présente un cylindre dont les
parois verticales ont 60 mètres d'élévation, n'a exigé qu'un échafaudage
extrêmement simple, échafaudage qui avait encore le mérite d'éviter les
montages lents obtenus par des engins. On remarque sur la surface de
l'énorme cylindre, à l'extérieur, une suite de trous de boulins disposés en
spirale et formant, à cause de la largeur extraordinaire du diamètre, une
pente assez douce. Ces trous de boulins, espacés de quatre en quatre
mètres environ, sont doubles, c'est-à-dire qu'ils présentent deux spirales,
ainsi que le fait voir la fig. 1. Au moyen de chevrons engagés dans les
trous A supérieurs et soulagés par des liens portant dans les trous B inférieurs,
le constructeur établissait ainsi, en même temps qu'il élevait sa
bâtisse, un chemin en spirale dont l'inclinaison peu prononcée permettait
de monter tous les matériaux sur de petits chariots tirés par des hommes
ou au moyen de treuils placés de distance en distance. La fig. 2 fera
comprendre cette opération. Les maçons et poseurs avaient le soin d'araser
toujours la construction sur tout le pourtour du donjon, comme on le voit
ici, et, sur cet arasement, ils circulaient et bardaient leurs pierres. Afin
de poser les parements extérieurs verticalement (parements taillés à
l'avance sur le chantier), il suffisait d'un fil-à-plomb
</div>
[[Image:Echafaud.donjon.Coucy.2.png|center]]
<div class="text">
<br>
et d'un rayon de bois tournant horizontalement sur un arbre vertical planté au centre de la
tour. Aujourd'hui, nos maçons procèdent de la même manière lorsqu'ils
élèvent ces grandes cheminées en brique de nos usines, de l'intérieur du
tuyau, sans échafaudage. L'échafaud dont la trace existe sur les parois du
donjon de [[Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle - Index communes C#Coucy|Coucy]] n'est réellement qu'un chemin de bardage, et ce chemin
pouvait être fort large, ainsi que le démontre la fig. 3, donnant une de ses
fermes engagées. En A et B sont les deux trous espacés de 1<sup>m</sup>,80; au
moyen des deux moises C étreignant les poutrelles à leur sortie des trous,
on pouvait avoir deux liens EF, le second formant croix de Saint-André
avec une contre-fiche
</div>
[[Image:Echafaud.donjon.Coucy.3.png|center]]
<div class="text">
<br>
G. La tête du lien F et le pied de la
contre-fiche G s'assemblaient dans un potelet H, moisé à son extrémité inférieure avec la
poutrelle B. Un lien extrême K, assemblé dans le pied de cette poutrelle B,
soulageait l'extrémité de la poutrelle supérieure A. Il était ainsi facile
d'avoir un chemin de 5<sup>m</sup>,30 de largeur, non compris un garde-corps. Ces
fermettes recevaient des solives qui portaient les madriers posés en travers
de manière à présenter un obstacle au glissement des chariots. Il eût fallu
un poids énorme pour rompre des fermettes ainsi combinées, bien qu'elles
ne fussent maintenues dans la muraille que par deux scellements.
Non-seulement
la combinaison de ces fermettes ne leur permettait pas de
quitter les scellements; mais, étant réunies par des solives formant une
suite de polygones autour du cylindre, elles étaient toujours bridées contre
la muraille.
 
Dans les provinces où l'on bâtit encore sans faire de ravalements après
la pose, on a conservé ces moyens primitifs d'échafaudages. Les
échafauds
ne se composent que de boulins engagés dans des trous ménagés en
construisant et d'échasses, les boulins étant liés aux échasses par des
cordelettes. À Paris même ces traditions se sont conservées, et nos
<i>Limousins</i> déploient une habileté singulière dans la combinaison de ces
légers échafaudages composés de brins de bois qui n'ont guère que 0,10 c.
de diamètre en moyenne.
</div>
[[Image:Echafaud.Bourgogne.et.Champagne.png|center]]
<div class="text">
En Bourgogne et en Champagne (pays de bois), nous avons vu souvent
employer des échafauds en potence taillés conformément au tracé
perspectif
(4). La partie A de la poutrelle horizontale AB est engagée dans le
trou de boulin; cette poutrelle est entaillée en C au ras du mur, ainsi que
l'indique le détail C'. Deux jambettes DD, assemblées à la tête à
mi-bois,
entrent dans cette entaille C, et, s'appuyant le long du mur, sont reliées
entre elles par l'entre-toise E. Deux liens GG, assemblés dans le
pied de
ces jambettes, vont soutenir, au moyen de deux <i>joints-à-paume</i>, l'extrémité
de la pièce horizontale AB. C'est une potence avec deux liens qui
empêchent la poutrelle horizontale de fléchir à droite ou à gauche sous la
charge et la maintiennent rigide.
 
Il n'est pas douteux que les charpentiers du moyen âge, qui étaient
fort ingénieux, ne fissent, dans certains cas, des échafauds en charpente,
indépendants de la construction, échafauds montant de fond ou
suspendus.
Nous ne pouvons avoir une idée de ces échafauds que par les traces
de leurs scellements encore existantes sur les monuments. Il arrive, par
exemple, qu'au-dessus d'un étage de bâtiment disposé de telle façon que
l'on ne pouvait établir des échafauds de fond, on aperçoit des trous
carrés de 0,30 c. sur 0,33 c., perçant la muraille de part en part, et
espacés de manière à laisser entre eux la longueur d'une solive;
au-dessus
de ces larges trous bien faits, on remarque d'autres petits trous de boulins
de 0,10 c. sur 0,10 c. environ et ne traversant pas la maçonnerie.
Ceci nous indique la pose d'un échafaud disposé comme l'indique la fig. 5.
AB est l'épaisseur du mur; les poutrelles C le traversaient de part en part
et étaient armées, à l'intérieur, d'une forte clef moisée D; deux moises E
verticales pinçaient la poutrelle au ras du mur sur le parement extérieur;
dans ces moises s'assemblaient deux liens F réunis à mi-bois qui venaient
soulager la poutrelle en G et H. Sur cette pièce, rendue rigide, on élevait
alors les échafaudages en échasses I et boulins K, avec contre-fiches L,
les boulins étant retenus au moyen de calles de bois dans les trous laissés
sur les parements extérieurs. Un pareil échafaud présentait toute la solidité
d'une charpente montant de fond.
</div>
[[Image:Echafaud.Bourgogne.et.Champagne.2.png|center]]
<div class="text">
La hauteur excessive de certains édifices gothiques, et notamment des
tours des églises surmontées de flèches en pierre, était telle qu'on ne
pouvait songer à élever ces constructions au moyen d'échafauds montant
de fond, car l'établissement de ces échafaudages eût absorbé des sommes
considérables, et ils auraient eu le temps de pourrir dix fois pendant le
travail des maçons. On élevait les soubassements avec des échasses et des
boulins; on profitait des retraites ménagées avec soin dans ces sortes de
constructions pour prendre des points d'appui nouveaux au-dessus du
sol; puis, arrivé à la hauteur des plates-formes ou galeries d'où les tours
s'élèvent indépendantes, on déchafaudait les parties inférieures pour
monter les charpentes nécessaires à la construction de ces tours. Les
baies de ces tours étaient alors d'un grand secours pour poser des
échafauds
solides, propres à résister à la violence du vent et à toutes les causes
de dégradations qui augmentent du moment qu'on s'élève beaucoup
au-dessus
du sol.
 
Pour peu que l'on examine avec soin les constructions gothiques, on
demeure persuadé que les architectes chargés de les élever ont souvent
manqué de ressources en rapport avec la nature et l'importance de ces
bâtisses. Ils devaient donc être fort avares d'échafaudages, lesquels coûtent
fort cher et ne représentent rien, du moment que l'édifice est achevé.
Au-dessus d'une certaine hauteur, on reconnaît encore, par la position
des trous d'échafauds, que ceux-ci étaient suspendus. Suspendre un
échafaud à un monument existant ne demande pas des combinaisons
bien savantes; mais suspendre un échafaud pour élever un édifice, avant
que cet édifice ne soit construit, c'est un problème qui paraît difficile à
résoudre: on sait que les difficultés matérielles n'arrêtaient pas les architectes
gothiques.
 
Habituellement les tours des grandes églises sont, dans leur partie
supérieure, à la hauteur des beffrois, sous les flèches, percées, sur chaque
face, de doubles baies étroites et longues. Les angles sont renforcés de
contre-forts terminés par des pinacles; mais dans les angles rentrants
formés par ces contre-forts, et suivant les diagonales du carré sur lequel
le plan de ces tours est tracé, on remarque presque toujours, à la base
des beffrois, des trous plus ou moins grands et quelquefois des repos.
Au-dessus de la partie verticale des tours, à la base des flèches qui s'élèvent
sur plan octogonal, on voit, sur les huit faces, des lucarnes, des
issues plus ou moins larges, mais étroites et longues. Ces dispositions
nous conduisent à admettre que les échafauds destinés à élever les
parties supérieures et dégagées des tours d'églises étaient suspendus,
c'est-à-dire qu'ils laissaient la partie inférieure des façades complètement
libre. Partant de ce principe, soit A (6) le plan d'une tour de
façade d'une grande église à la base du beffroi, et B le plan de cette tour
à la base de la flèche en pierre qui la couronne. Ayant deux baies sur
chacune des faces du beffroi, nous disposons à travers ces baies des
fermes d'échafauds se croisant en G et se rapprochant le plus possible
des contre-forts d'angles. En élévation, chacune de ces fermes donne le
tracé F; les quatre poteaux G montent d'une seule pièce ou sont entés
(en raison de la hauteur du beffroi) de E en H; de H en K est un chapeau
qui traverse d'une baie à l'autre. Les deux liens IL assemblés à
mi-bois
soulagent puissamment ces chapeaux. Du point M pendent de doubles
moises inclinées MN, qui portent l'extrémité de la pièce horizontale NO
posant sur l'appui des baies; des moises horizontales P, serrant tout le
système intérieur et se réunissant à leur extrémité extérieure pour être
pincées à leur tour par les grandes moises inclinées MN, composent
autant de planchers pour les maçons. Ainsi, avant que la tour ne soit
élevée, cet échafaud suspendu peut être établi. La construction arasée au
niveau des chapeaux HK, nous posons sur les premiers poteaux G
d'autres
poteaux G', d'autres chapeaux RS, d'autres liens TV, puis des moises
doubles X qui suspendent encore l'extrémité des premiers chapeaux et
les ponts intermédiaires. On remarquera que les seconds chapeaux RS et
les liens T passent à travers la flèche en pierre dans des trous ménagés
exprès, bouchés après coup ou même laissés apparents. Des
</div>
[[Image:Echafaud.suspendu.png|center]]
<div class="text">
<br>
lucarnes sur les quatre faces de la flèche, parallèles à celles de la tour, partent des
pièces en gousset empêchant le hiement de l'échafaudage. Les huit baies
du beffroi permettent donc ainsi de sortir, au dehors de la construction,
des échafauds saillants, sur lesquels on peut établir des ponts. Restent les
angles à échafauder. Pour ce faire, nous avons un grand poteau central <i>ab</i>,
un repos en <i>c</i> dans l'angle rentrant, et un trou réservé en <i>d</i> suivant la
diagonale du carré (voy. le tracé J sur la diagonale UZ du plan); cela
suffit. Les chapeaux <i>ef</i>, passant à travers ces trous, reposent sur les
poteaux G et le poteau central, sont soulagés par les grands liens
<i>il</i>; deux
moises pendantes <i>no</i> suspendent les ponts intermédiaires. Arasés au
niveau <i>ef</i>, nous retrouvons la continuation du poteau central et des
poteaux G; nous assemblons le second chapeau <i>pq</i>, les liens <i>rs</i> qui le
soulagent en passant à travers les lucarnes de la flèche; nous disposons les
moises pendantes <i>tv</i>, et nous réunissons ces pièces diagonales avec les
pièces parallèles au moyen de solives horizontales, qui font, à différentes
hauteurs, tout le tour du clocher. La construction terminée, tous ces
échafaudages sont facilement déposés par l'intérieur.
</div>
[[Image:Echafaud.XIVe.et.XVe.siecles.png|center]]
<div class="text">
À voir les dispositions encore existantes à l'extérieur des grands édifices
du moyen âge, il est certain que
les échafauds suspendus étaient
alors fort usités. Pendant les
XIV<sup>e</sup> et XV<sup>e</sup> siècles, on rhabilla
beaucoup de monuments d'une
époque antérieure, soit parce
que leurs parements étaient dégradés,
soit parce qu'on voulait
les mettre en harmonie avec les
formes nouvelles. Dans le cas de
reprises ou de restaurations
extérieures, ces échafauds
étaient très-utiles en ce qu'ils
n'embarrassaient pas les rez-de-chaussée
et qu'ils coûtaient
moins cher que des charpentes
montant de fond. Les charpentiers
établissaient une suite de
ponts principaux (7), au moyen
de poutres A engagées dans 1a
maçonnerie, dont la bascule
était maintenue par de grands
liens B et par des moises pendantes
C. Si l'espace qu'il fallait
laisser entre chaque armature
était trop large pour poser de
l'une à l'autre des solives simples,
on établissait d'une poutre à l'autre des fermes pendantes D,
</div>
[[Image:Echafaud.XIVe.et.XVe.siecles.2.png|center]]
<div class="text">
<br>
dont la disposition est détaillée dans le tracé perspectif (8). Les bouts <i>ab</i>
sont engagés dans le mur; les moises pendantes sont indiquées en M,
les entre-toises armées en E. Des plats-bords P, portant sur ces
entre-toises,
composaient les ponts principaux sur lesquels on pouvait barder
les matériaux. Suivant la méthode employée par les charpentiers du
moyen âge, les moises étaient serrées au moyen de clefs de bois, sans
qu'il fût besoin de boulons et de ferrements. Dans les échafauds, comme
dans toutes les constructions de cette époque, on cherchait à économiser
les matériaux, et on ne se préoccupait pas de la main-d'œuvre. De notre
temps, nous voyons faire des échafauds simplement et solidement
combinés;
cependant il faut dire que les architectes abandonnent trop facilement
la direction de cet accessoire nécessaire à toute construction importante:
un peu d'étude et d'attention de leur part éviteraient bien des dépenses
inutiles, et, grâce au déplorable système des adjudications, nous sommes
souvent obligés d'employer des entrepreneurs de charpente qui sont hors
d'état de trouver les moyens les plus propres à élever des échafauds solides
en employant peu de bois. Un échafaud bien fait est cependant une des
parties de l'art du constructeur qui accuse le mieux son intelligence et sa
bonne direction. On peut juger la science réelle du constructeur à la
manière dont il dispose ses échafauds. Les échafauds bien établis font
gagner du temps aux ouvriers, leur donnent de la confiance, les obligent
à plus de régularité, de méthode et de soin; s'ils sont massifs, s'ils
emploient le bois avec profusion, les ouvriers savent parfaitement le
reconnaître; ils jugent sur ce travail provisoire du degré de connaissances
pratiques de leur chef et ne lui savent aucun gré de cet abus de moyens.
Si, au contraire, des maçons sont appelés à travailler sur des échafauds
hardis, légers en apparence, mais dont quelques jours d'épreuve suffisent
pour reconnaître la solidité, ils apprécient bien vite ces qualités et comprennent
que, dans l'œuvre, ce qu'on exigera d'eux, c'est du soin, de la
précision, que l'on ne se contentera pas d'<i>à-peu-près</i>. Dans les restaurations
d'anciens édifices, les échafauds demandent chez l'architecte une
grande fertilité de combinaisons; on ne saurait donc trop attirer leur
attention sur cette étude: l'économie, l'ordre dans le travail, et, plus que
tout cela, la vie des ouvriers en dépendent.