« Qu’est-ce que le tiers état ? » : différence entre les versions
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==Chapitre 3. Que demande le tiers état ? à devenir quelque chose.==
Il ne faut point juger de ses demandes par les observations isolées de quelques auteurs plus ou moins instruits des droits de l’homme. L’ordre du tiers état est encore fort reculé à cet égard, je ne dis pas seulement sur les lumières de ceux qui ont étudié l’ordre social, mais encore sur cette masse d’idées communes qui forment l’opinion publique. On ne peut apprécier les véritables pétitions de cet ordre que par les réclamations authentiques que les grandes municipalités du royaume ont adressées au gouvernement. Qu’y voit-on ? Que le peuple veut être quelque chose, et en vérité le moins qu’il est possible. Il veut avoir de vrais représentants aux états généraux, c’est-à-dire des députés tirés de son ordre, qui soient habiles à être les interprètes de son vœu et les défenseurs de ses intérêts. Mais à quoi lui servirait d’assister aux états généraux, si l’intérêt contraire au sien y prédominait ! Il ne ferait que consacrer par sa présence l’oppression dont il serait l’éternelle victime.
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La véritable intention du tiers état est d’avoir aux états généraux une influence égale à celle des privilégiés. Je le répète, peut-il demander moins ? Et n’est-il pas clair que si son influence y est au-dessous de l’égalité, on ne peut pas espérer qu’il sorte de sa nullité politique et qu’il devienne quelque chose ? Mais ce qu’il y a de véritablement malheureux, c’est que les trois articles qui forment la réclamation du tiers sont insuffisants pour lui donner cette égalité d’influence dont il ne peut point, en effet, se passer. Vainement obtiendra-t-il un nombre égal de représentants tirés de son ordre : l’influence des privilégiés viendra se placer et dominer dans le sanctuaire même du tiers. Où sont les postes, les emplois, les bénéfices à donner ? De quel côté est le besoin de la protection ? De quel côté est le pouvoir de protéger ?… et les non-privilégiés qui paraîtraient les plus propres par leurs talents à soutenir les intérêts de leur ordre ne sont-ils pas élevés dans un respect superstitieux ou forcé envers la noblesse ? On sait combien les hommes en général sont faciles à se plier à toutes les habitudes qui peuvent leur devenir utiles. Ils pensent constamment à améliorer leur sort ; et lorsque l’industrie personnelle ne peut avancer par les voies honnêtes, elle se jette dans de fausses routes. Je ne sais quel peuple de l’antiquité, pour accoutumer ses enfants aux exercices violents ou adroits, n’accordait des aliments qu’après leurs succès ou leurs efforts en ce genre.
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