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Mais aussi ''Weir of Hermiston'' n’est-il pas, à proprement parler, un morceau de roman : c’est plutôt une esquisse, la première ébauche d’une œuvre que l’auteur n’eût point manqué ensuite de remanier et de mettre au point, avec la conscience méticuleuse qu’il apportait à ses moindres travaux. Et le plaisir qu’elle nous procure n’est pas, comme celui qui nous vient d’''Edwin Drood'', un plaisir tout objectif, l’abandon complet de nous-mêmes à la fantaisie du conteur : nous en jouissons au contraire indirectement et par réflexion, en devinant sous ces aventures à peine indiquées la qualité de l’âme qui les a conçues, et, à travers ces chapitres trop longs ou trop courts, en nous représentant l’œuvre vivante, harmonieuse, et belle, qu’avait rêvée Stevenson.
Mais aussi ''Weir of Hermiston'' n’est-il pas, à proprement parler, un morceau de roman : c’est plutôt une esquisse, la première ébauche d’une œuvre que l’auteur n’eût point manqué ensuite de remanier et de mettre au point, avec la conscience méticuleuse qu’il apportait à ses moindres travaux. Et le plaisir qu’elle nous procure n’est pas, comme celui qui nous vient d’''Edwin Drood'', un plaisir tout objectif, l’abandon complet de nous-mêmes à la fantaisie du conteur : nous en jouissons au contraire indirectement et par réflexion, en devinant sous ces aventures à peine indiquées la qualité de l’âme qui les a conçues, et, à travers ces chapitres trop longs ou trop courts, en nous représentant l’œuvre vivante, harmonieuse, et belle, qu’avait rêvée Stevenson.




Il avait rêvé de faire de ce roman le plus parfait de ses livres, celui qui porterait témoignage de ses dons de poète et de psychologue. « Rappelez-vous ma prédiction, écrivait-il en décembre 1892 à M. Baxter : c’est ce roman-là qui sera mon chef-d’œuvre ! » Il en avait déjà, à cette époque, fixé le plan général et esquissé les principales figures. « Mon ''juge-pendeur'', écrivait-il à M. Baxter, est dès à présent une très belle chose, et, — jusqu’au point de mon récit où je suis arrivé, — le meilleur à beaucoup près de tous mes personnages. » Mais surtout il avait depuis longtemps arrêté le caractère et la portée qu’il devrait donner à son livre. A côté, au-dessus de ses romans d’aventure, où il ne cessait point de s’employer entre temps, il avait formé le projet d’une œuvre plus littéraire et plus haute, d’une façon de grande tragédie, très réaliste tout ensemble et très pathétique, telle enfin que personne, après l’avoir lue, ne pourrait plus lui reprocher d’être un simple amuseur.
Il avait rêvé de faire de ce roman le plus parfait de ses livres, celui qui porterait témoignage de ses dons de poète et de psychologue. « Rappelez-vous ma prédiction, écrivait-il en décembre 1892 à M. Baxter : c’est ce roman-là qui sera mon chef-d’œuvre ! » Il en avait déjà, à cette époque, fixé le plan général et esquissé les principales figures. « Mon ''juge-pendeur'', écrivait-il à M. Baxter, est dès à présent une très belle chose, et, — jusqu’au point de mon récit où je suis arrivé, — le meilleur à beaucoup près de tous mes personnages. » Mais surtout il avait depuis longtemps arrêté le caractère et la portée qu’il devrait donner à son livre. A côté, au-dessus de ses romans d’aventure, où il ne cessait point de s’employer entre temps, il avait formé le projet d’une œuvre plus littéraire et plus haute, d’une façon de grande tragédie, très réaliste tout ensemble et très pathétique, telle enfin que personne, après l’avoir lue, ne pourrait plus lui reprocher d’être un simple amuseur.