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<section begin="CARÊME"/>jeûne. D’autres dirent que ce fut le Pape Télesphore qui l’institua vers le milieu du II{{e}} siècle ; mais Bellarmin répond que S. Ignace, qui vivoit avant ce Pape parle clairement du ''Carême'', dans l’on Epître ''{{lang|la|ad Philippenses}}'' ; que ce qui a donné occasion à cette opinion, c’est que Télesphore ordonna l’abstinence de chair pendant sept semaines entières, au lieu que les Laïques ne la gardoient pas pendant sept semaines toutes entières. D’autres conviennent que l’on observoit à la vérité le ''Carême'' dans l’Eglise, c’est-à-dire, un jeûne de quarante jours avant Pâque dès le temps des Apôtres ; mais que c’étoit volontairement, & qu’il n’y eut de loi que vers le milieu du III{{e}} siècle. Ce que nous avons dit de Tertullien paroît détruire ce sentiment. Enfin, il paroît par les Constitutions Apostoliques ''V, c''. i8, que les Chrétiens dès le commencement de l’Eglise ont jeûné par obligation pendant le temps qui précédoit la Pâque. Ce jeûne duroit jusqu’à l’heure de vêpres, c’est-à-dire, jusqu’au soir. Tertullien en parle aussi dans son Traité du jeûne, &C S. Irenée dans Eusebe ''Liv, V, c''. 24, Saint Basile, ''Orat. 2, de Jejun''. Saint Ambroise ''Serm''. 54. Socrate, ''L. V, c''. 21.Cassien, ''Collat.'' 21, ''c''. Z7. Saint Léon, ''de Quadragesimâ'', &c. Voyez Bellarm. ''de bonis Operib. in pattic. L. II, c.'' 41, 15, 16.
<section begin="CARÊME"/>jeûne. D’autres dirent que ce fut le Pape Télesphore qui l’institua vers le milieu du II{{e}} siècle ; mais Bellarmin répond que S. Ignace, qui vivoit avant ce Pape parle clairement du ''Carême'', dans l’on Epître ''{{lang|la|ad Philippenses}}'' ; que ce qui a donné occasion à cette opinion, c’est que Télesphore ordonna l’abstinence de chair pendant sept semaines entières, au lieu que les Laïques ne la gardoient pas pendant sept semaines toutes entières. D’autres conviennent que l’on observoit à la vérité le ''Carême'' dans l’Eglise, c’est-à-dire, un jeûne de quarante jours avant Pâque dès le temps des Apôtres ; mais que c’étoit volontairement, & qu’il n’y eut de loi que vers le milieu du III{{e}} siècle. Ce que nous avons dit de Tertullien paroît détruire ce sentiment. Enfin, il paroît par les Constitutions Apostoliques ''V, c''. i8, que les Chrétiens dès le commencement de l’Eglise ont jeûné par obligation pendant le temps qui précédoit la Pâque. Ce jeûne duroit jusqu’à l’heure de vêpres, c’est-à-dire, jusqu’au soir. Tertullien en parle aussi dans son Traité du jeûne, &C S. Irenée dans Eusebe ''Liv, V, c''. 24, Saint Basile, ''Orat. 2, de Jejun''. Saint Ambroise ''Serm''. 54. Socrate, ''L. V, c''. 21.Cassien, ''Collat.'' 21, ''c''. Z7. Saint Léon, ''de Quadragesimâ'', &c. Voyez Bellarm. ''de bonis Operib. in pattic. L. II, c.'' 41, 15, 16.


Socrate & Sozomene disent, le premier, ''L. V, c''. 22 ; l’autre, ''L. VII, c''. 19, que le jeûne du ''Carême'' étoit de six semaines avant Pâque, en Illyrie, en Grèce, à Alexandrie, dans toute l’Egypte, dans l’Afrique & la Palestine ; mais qu’à Constantinople & dans toutes les Provinces d’alentour, jusqu’en Phénicie, on commençoit le ''Carême'' sept semaines avant Pâque. que de ces six ou sept semaines quelques-uns n’en jeûnoient que trois par intervalles, & cinq jours seulement chaque semaine. Quelques-uns, ajoutent ils, jeûnoient trois semaines de suite comme à Rome, excepté le Samedi & le Dimanche. Socrate se trompe en ceci ; car on jeûnoit à Rome le Samedi toute l’année : mais un Grec a pû l’ignorer, & prendre l’usage de quelque autre Eglise pour celui de Rome. Par-tout on nommoit également ce temps ''Carême'', ou Quarantaine.
Socrate & Sozomene disent, le premier, ''L. V, c''. 22 ; l’autre, ''L. VII, c''. 19, que le jeûne du ''Carême'' étoit de six semaines avant Pâque, en Illyrie, en Grèce, à Alexandrie, dans toute l’Egypte, dans l’Afrique & la Palestine ; mais qu’à Constantinople & dans toutes les Provinces d’alentour, jusqu’en Phénicie, on commençoit le ''Carême'' sept semaines avant Pâque, que de ces six ou sept semaines quelques-uns n’en jeûnoient que trois par intervalles, & cinq jours seulement chaque semaine. Quelques-uns, ajoutent ils, jeûnoient trois semaines de suite comme à Rome, excepté le Samedi & le Dimanche. Socrate se trompe en ceci ; car on jeûnoit à Rome le Samedi toute l’année : mais un Grec a pû l’ignorer, & prendre l’usage de quelque autre Eglise pour celui de Rome. Par-tout on nommoit également ce temps ''Carême'', ou Quarantaine.


Les Grecs commencent l’abstinence après le Dimanche que nous nommons de la Sexagésime, & qu’ils appellent {{grec}}, c’est- à- dire, selon M. l’Abbé Fleury, Dimanche gras, ou plutot, ''Carême prenant'' ; car {{grec}} signifie proprement, sévrement de chair, privation de chair, ''{{lang|la|carniprivium}}'', comme quelques-uns traduisent. Du reste, les Grecs commencent le Lundi qui suit ce Dimanche à ne point manger de chair, & toute cette semaine-là ils ne mangent que du laitage & des œufs, mais sans jeûne encore ; de-là vient qu’ils appellent le Dimanche suivant, qui est celui de la Quinquagésime, {{grec}}. Le Lundi suivant ils entrent en ''Carême'', & commencent le jeûne & l’entière abstinence, non-seulement d’œufs & de laitage, mais de poisson & d’huile. Néanmoins s’ils commencent plutôt que nous, ils ne jeûnent point les Samedis comme nous. L’Abbé Théonas étant venu voir Cassien & Germain, celui-ci demanda pourquoi le ''Carême'' n’étoit que de six semaines, ou de sept, en quelque pays, puisque ni l’un ni l’autre nombre ne font quarante Jours, en ôtant le Samedi & le Dimanche, où l’on ne jeûnoit point, mais seulement trente-six jours ? Théonas répondit : ces trente-six jours font la dixme de toute l’année, qui est de 365 jours ; & ce qui fait la diversité, c’est que ceux qui ne jeûnent que six semaines, jeûnent le Samedi. On n’a pas laissé de nommer tout ce temps ''Carême'', ou quarantaine, peut-être à cause des quarante jours de jeûne de Moyse, d’Elie & de {{sc|Jesus-Christ}}. Les parfaits ne s’astreignent pas à des bornes si étroites, & cette loi du ''Carême'' n’a été introduite qu’en faveur des foibles ; afin qu’ils donnassent à Dieu au moins la dixme de l’année. On voit ici combien Cassien, & ceux dont il rapporte les discours, croient persuadés de l’antiquité & de l’utilité du ''Carême''. {{sc|Fleury}}.
Les Grecs commencent l’abstinence après le Dimanche que nous nommons de la Sexagésime, & qu’ils appellent {{lang|grc|Απόκρεως}}, c’est-à-dire, selon M. l’Abbé Fleury, Dimanche gras, ou plutot, ''Carême prenant'' ; car {{lang|grc|ό Απόκρεας}} signifie proprement, sévrement de chair, privation de chair, ''{{lang|la|carniprivium}}'', comme quelques-uns traduisent. Du reste, les Grecs commencent le Lundi qui suit ce Dimanche à ne point manger de chair, & toute cette semaine-là ils ne mangent que du laitage & des œufs, mais sans jeûne encore ; de-là vient qu’ils appellent le Dimanche suivant, qui est celui de la Quinquagésime, {{lang|grc|Τῆς Τυροφάγου}}. Le Lundi suivant ils entrent en ''Carême'', & commencent le jeûne & l’entière abstinence, non-seulement d’œufs & de laitage, mais de poisson & d’huile. Néanmoins s’ils commencent plutôt que nous, ils ne jeûnent point les Samedis comme nous. L’Abbé Théonas étant venu voir Cassien & Germain, celui-ci demanda pourquoi le ''Carême'' n’étoit que de six semaines, ou de sept, en quelque pays, puisque ni l’un ni l’autre nombre ne font quarante Jours, en ôtant le Samedi & le Dimanche, où l’on ne jeûnoit point, mais seulement trente-six jours ? Théonas répondit : ces trente-six jours font la dixme de toute l’année, qui est de 365 jours ; & ce qui fait la diversité, c’est que ceux qui ne jeûnent que six semaines, jeûnent le Samedi. On n’a pas laissé de nommer tout ce temps ''Carême'', ou quarantaine, peut-être à cause des quarante jours de jeûne de Moyse, d’Elie & de {{sc|Jesus-Christ}}. Les parfaits ne s’astreignent pas à des bornes si étroites, & cette loi du ''Carême'' n’a été introduite qu’en faveur des foibles ; afin qu’ils donnassent à Dieu au moins la dixme de l’année. On voit ici combien Cassien, & ceux dont il rapporte les discours, croient persuadés de l’antiquité & de l’utilité du ''Carême''. {{sc|Fleury}}.


Les anciens Moines Latins faisoient trois ''Carêmes'' ; le grand avant Pâque, l’autre, avant Noël, qu’on appeloit de la ''Saint Martin'' ; & l’autre de ''Saint Jean-Baptiste'', après la Pentecôte, tous trois de quarante jours. Les Grecs en observoient quatre autres outre celui de ''Pâques'' ; savoir ceux des ''Apôtres'', de l’''Assomption'', de ''Noël'', & de la ''Transfiguration'' ; mais ils les réduisoient à sept jours chacun. Les Jacobites en font un cinquième, qu’ils appellent ''de la pénitence de Ninive''. Les Chaldéens & les Nestoriens de même. Les Maronites en font six, y ajoutant celui ''de l’Exaltation de la Sainte Croix''. Une Relation imprimée en 1688, dit cependant que les Chrétiens du mont Liban, qui sont les Maronites, n’en font que quatre ; que durant le grand, qui est celui qui précède la Fête de Pâques, ils ne mangent qu’une fois le jour ; que la plupart font scrupule d’y manger du poisson, ni autre chose qui ait eu vie ; que les femmes grosses, ni les enfans qui ont l’usage de la raison, n’en sont que rarement dispensés. Les Jacobites anticipoient le Carême de deux semaines, & en jeûnoient huit avant la Semaine-Sainte. ''Voyez'' le P. le Quien dans une Préface sur une Lettre de saint Jean Damascène. Les Arméniens en font huit de différente durée.
Les anciens Moines Latins faisoient trois ''Carêmes'' ; le grand avant Pâque, l’autre, avant Noël, qu’on appeloit de la ''Saint Martin'' ; & l’autre de ''Saint Jean-Baptiste'', après la Pentecôte, tous trois de quarante jours. Les Grecs en observoient quatre autres outre celui de ''Pâques'' ; savoir ceux des ''Apôtres'', de l’''Assomption'', de ''Noël'', & de la ''Transfiguration'' ; mais ils les réduisoient à sept jours chacun. Les Jacobites en font un cinquième, qu’ils appellent ''de la pénitence de Ninive''. Les Chaldéens & les Nestoriens de même. Les Maronites en font six, y ajoutant celui ''de l’Exaltation de la Sainte Croix''. Une Relation imprimée en 1688, dit cependant que les Chrétiens du mont Liban, qui sont les Maronites, n’en font que quatre ; que durant le grand, qui est celui qui précède la Fête de Pâques, ils ne mangent qu’une fois le jour ; que la plupart font scrupule d’y manger du poisson, ni autre chose qui ait eu vie ; que les femmes grosses, ni les enfans qui ont l’usage de la raison, n’en sont que rarement dispensés. Les Jacobites anticipoient le Carême de deux semaines, & en jeûnoient huit avant la Semaine-Sainte. ''Voyez'' le P. le Quien dans une Préface sur une Lettre de saint Jean Damascène. Les Arméniens en font huit de différente durée.