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était appliquée sans pitié par l’Inquisition aux renégats. D’ailleurs, il ne suffisait pas de faire, de temps à autre, un voyage rapide en Afrique et d’en ramener une centaine de captifs ; on y laissait souvent les plus intéressantes victimes de la tyrannie barbaresque, les adolescens et les femmes. C’est pour remédier à ces maux que Pierre Nolasque fonda l’ordre de Notre-Dame de la Mercy. Nolasque, comme Jean de Matha, était Français ; il était né en 1190 au château de Mas de Saintes-Puelles, entre Carcassonne et Castelnaudary, et avait fait ses premières armes sous Simon de Montfort. Mais, dégoûté du métier de soldat, et attiré à Barcelone par la renommée du dominicain Raymond de Pennaforte, il songea d’abord à entrer dans son ordre. L’Espagne était alors engagée dans sa lutte héroïque contre le croissant, et Pierre, à Barcelone, entendit raconter les misères des captifs chrétiens et peut-être aussi les services rendus par les compagnons de Jean de Matha. Son biographe, le Père Auvry, attribue à une révélation de la vierge Marie la première idée qu’il eut de fonder un ordre de rédempteurs ; il fait même remarquer que l’ordre de Nolasque est d’autant supérieur à celui de J. de Malha que la Vierge est supérieure aux anges. Quoi qu’il en soit, Pierre donna à sa compagnie le nom de Notre-Dame de la Mercy et y introduisit un élément nouveau, chevaleresque.

Pour être admis, il fallait prononcer un quatrième vœu, celui de demeurer en otage, en cas de besoin, pour délivrer les fidèles chrétiens en puissance des Sarrasins et les empêcher d’abjurer : Et in Saracenorum potestate, déclarait le novice, in pignus detentus manebo, si necesse fuerit in redemptionem Christi fidelium. Les premiers compagnons de Pierre de Nolasque exercèrent leur office dans les royaumes de Valence et de Grenade, qui étaient encore au pouvoir des Maures assez civilisés ; mais, deux ou trois siècles après, quand ils passèrent dans le nord de l’Afrique, ils furent exposés, comme otages, aux cruels traitemens que les Maugrebins infligeaient à leurs esclaves. Et ce n’était pas seulement quelques mois, mais souvent plusieurs années qu’ils devaient rester ainsi détenus [1].

L’ordre Notre-Dame de la Mercy, ayant été fondé à Barcelone (1218) et placé sous le patronage de Jacques Ier, roi d’Aragon, eut d’abord un caractère semi-militaire. Les chevaliers qui y entraient s’engageaient à défendre la foi chrétienne les armes à la main. La maison mère était à Barcelone, mais l’ordre se propagea

  1. Citons entre autres Pierre Armengel, le P. Vigo et surtout le P. Jacques Castellar, qui restèrent en otages plusieurs années pour sauver déjeunes garçons en danger de reniement.