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Lorsque leur âge leur permettra d’être désignés pour les colonies, les premiers n’auront plus une durée suffisante de service à courir. Ils seront donc restés une force perdue sous le rapport colonial, peut-être même bien souvent une non-valeur absolue, si l’on calcule qu’épuisés par la chaleur d’Algérie, vaincus par les marches dans le Sud, anémiés, guettés par le germe typhique, ils n’auront cessé d’encombrer les hôpitaux, pour y traîner, quand ce n’aura pas été pour y mourir. Et que dire de ces engagés de quarante ans et plus, — car aucune pièce ne justifie de leur état civil, et nous verrons que leur acceptation est souvent bien légère, — sinon que leur usure physique ne s’accorde que trop avec leur dégradation morale ?

Mélanger ces trop vieux à ces trop jeunes ne peut avoir moralement et militairement que des conséquences désastreuses, par l’ascendant d’expérience qu’exerce l’âge en tous les milieux humains, ici à l’exclusif profit du vice, où s’est formée celle de tous ces chevaux de retour.

Pour ces différentes raisons, il serait à souhaiter que les limites d’âge à l’engagement au titre étranger fussent ramenées entre vingt et trente-cinq ans. La composition des régimens étrangers y perdrait en nombre, mais sa valeur y gagnerait ; elle deviendrait rationnelle et homogène. L’Etat de son côté y réaliserait des économies bien entendues. Conçoit-on, en effet, un argent plus mal dépensé que celui qui entretient un noyau d’ivrognes dont la main tremblante est incapable d’ajuster un coup de feu, dont les jambes ruinées refusent le service aux premiers kilomètres, dont la tête ne s’éveille qu’à l’idée de boire et aux mauvais instincts qui lui font cortège ? N’est-elle pas incompréhensible, la législation qui permet aux plus détestables sujets, refusés à se rengager au titre français, de s’imposer à l’armée envers et contre tous, par des engagemens successifs au titre étranger, jusqu’à arracher à l’Etat une pension de retraite, qu’on eût crue réservée à d’autres droits acquis ?

D’autre part, il y a beaucoup à dire sur la manière dont les bureaux de recrutement comprennent leurs devoirs, dès qu’il s’agit d’acceptations à délivrer pour la Légion. La fluctuation d’appréciations, ou la facilité d’examen, permet toujours à celui qui se donne la peine de frapper à plusieurs portes de passer au travers des mailles du filet. Si limitée que soit leur tâche à la simple constatation de l’aptitude physique, encore devraient-ils se souvenir que cette aptitude se réclame ici d’un service militaire tout spécial et particulièrement pénible. L’on est forcé de s’avouer que les choses ne se passent pas comme elles le devraient, si l’on en juge par l’étonnante proportion d’infirmes et de