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la conférence de Londres d’attribuer la possession de Candie et de Samos à la Grèce, cette revendication n’y trouva pas de défenseurs. On se mit d’accord « pour un état grec indépendant, » on se garda bien d’en reculer les limites. Le prince Léopold de Saxe-Cobourg avait, au mois de février 1830, accepté la couronne ; il déclina cet honneur quand il eut connaissance des restrictions apportées au bienfait de l’émancipation. Le comte Capo d’Istria conserva donc les rênes du pouvoir et accusa de plus en plus ses tendances à s’appuyer presque exclusivement sur la Russie. Le Magne, Hydra, Syra, presque tout l’Archipel, levèrent l’étendard de la révolte. D’un côté se rangèrent Miaulis et Petro-Bey, de l’autre Colocotroni et Canaris. Apaisée, non sans peine, par l’intervention passionnée de l’amiral Ricord, par les conseils plus impartiaux du capitaine Lyons et du capitaine Lalande, cette crise déplorable laissa dans les esprits de nombreux fermens de haine. Le 9 octobre 1831, le président fut assassiné par deux chefs maniotes, George et Constantin Mavromichali. Sa mort fut un deuil national à Saint-Pétersbourg ; elle aurait dû être aussi un deuil pour la Grèce, car il n’est pas certain que le gouvernement de cet homme intègre et capable ne fût pas encore la meilleure combinaison que l’on pût trouver pour préparer le terrain à la monarchie.
la conférence de Londres d’attribuer la possession de Candie et de Samos à la Grèce, cette revendication n’y trouva pas de défenseurs. On se mit d’accord « pour un état grec indépendant, » on se garda bien d’en reculer les limites. Le prince Léopold de Saxe-Cobourg avait, au mois de février 1830, accepté la couronne ; il déclina cet honneur quand il eut connaissance des restrictions apportées au bienfait de l’émancipation. Le comte Capo d’Istria conserva donc les rênes du pouvoir et accusa de plus en plus ses tendances à s’appuyer presque exclusivement sur la Russie. Le Magne, Hydra, Syra, presque tout l’Archipel, levèrent l’étendard de la révolte. D’un côté se rangèrent Miaulis et Petro-Bey, de l’autre Colocotroni et Canaris. Apaisée, non sans peine, par l’intervention passionnée de l’amiral Ricord, par les conseils plus impartiaux du capitaine Lyons et du capitaine Lalande, cette crise déplorable laissa dans les esprits de nombreux fermens de haine. Le 9 octobre 1831, le président fut assassiné par deux chefs maniotes, George et Constantin Mavromichali. Sa mort fut un deuil national à Saint-Pétersbourg ; elle aurait dû être aussi un deuil pour la Grèce, car il n’est pas certain que le gouvernement de cet homme intègre et capable ne fût pas encore la meilleure combinaison que l’on pût trouver pour préparer le terrain à la monarchie.


La royauté ne prit pas facilement racine sur le sol mouvant où, le 1er février 1833, on réussit enfin à l’implanter ; le règne du roi Othon se termina par une révolution, et la diplomatie dut se remettre à l’œuvre. Elle s’y remit sans confiance, inquiète et mécontente du résultat auquel ses longs efforts et ses perplexités avaient abouti. Heureusement les destinées de la race grecque ne sont pas liées d’une façon aussi intime qu’on pourrait le supposer à celles de la monarchie hellénique. Le résultat capital de l’insurrection de 1821, ce n’est pas la fondation du petit royaume de Grèce, c’est la transformation de la Turquie. L’empire ottoman renferme plus de 12 millions de chrétiens, et parmi ces chrétiens les Grecs sont incontestablement appelés à être la race dirigeante. Tout les désigne pour ce rôle, leur activité, leur intelligence et surtout leur patriotisme. Si l’on a pu dire de l’Égypte qu’elle était devenue une colonie française, on peut dès à présent affirmer que la Turquie ne tardera pas à être une colonie européenne. Cet immense territoire attire déjà les capitaux nomades, qui ne sauraient rencontrer nulle part un plus utile emploi. La Roumélie d’abord, l’Asie-Mineure ensuite, se verront dans un avenir très prochain sillonnées par des voies rapides. Ces contrées, si riches et presque abandonnées, manquaient de routes ; elles auront des chemins de fer. Les Grecs peuvent sans regret abandonner la poursuite de la ''grande idée'' ; leur industrie
La royauté ne prit pas facilement racine sur le sol mouvant où, le 1{{er}} février 1833, on réussit enfin à l’implanter ; le règne du roi Othon se termina par une révolution, et la diplomatie dut se remettre à l’œuvre. Elle s’y remit sans confiance, inquiète et mécontente du résultat auquel ses longs efforts et ses perplexités avaient abouti. Heureusement les destinées de la race grecque ne sont pas liées d’une façon aussi intime qu’on pourrait le supposer à celles de la monarchie hellénique. Le résultat capital de l’insurrection de 1821, ce n’est pas la fondation du petit royaume de Grèce, c’est la transformation de la Turquie. L’empire ottoman renferme plus de 12 millions de chrétiens, et parmi ces chrétiens les Grecs sont incontestablement appelés à être la race dirigeante. Tout les désigne pour ce rôle, leur activité, leur intelligence et surtout leur patriotisme. Si l’on a pu dire de l’Égypte qu’elle était devenue une colonie française, on peut dès à présent affirmer que la Turquie ne tardera pas à être une colonie européenne. Cet immense territoire attire déjà les capitaux nomades, qui ne sauraient rencontrer nulle part un plus utile emploi. La Roumélie d’abord, l’Asie-Mineure ensuite, se verront dans un avenir très prochain sillonnées par des voies rapides. Ces contrées, si riches et presque abandonnées, manquaient de routes ; elles auront des chemins de fer. Les Grecs peuvent sans regret abandonner la poursuite de la ''grande idée'' ; leur industrie